Le client est roi (09/09/2006)
Cette formule 'Le client est roi" revient sur toutes les lèvres avec un sourire en coin. Elle parait fort obsolète dans la pratique d'aujourd'hui. Ca ne semble pas générer de troubles. Cette vieille habitude est là.
Malgré ce qu'en laisse montrer vers l'extérieur, toutes les pubs et vitrines souriantes à outrance, le désir de respecter l'annonce est bien là. Quant à la réalisation effective?
Prêchée pour attirer le consommateur que nous sommes, elle obligerait néanmoins à reconsidérer le credo et à s'appliquer à des bases plus proches du désir des gens.
En période de vacances, ne remarquez-vous pas une ineptie digne de la plus parfaite ignorance du client dans ce qui va suivre?
La présence de deux boulangers à proximité l'un de l'autre et que constatez-vous surpris?
Deux volets baissés avec l'affichette évocatrice: "Fermé pour cause de vacances jusqu'au ....".
Comble de l’ironie, les périodes d'absence correspondent parfaitement dans les deux cas. Une concertation entre commerçants n'a même pas effleuré l'esprit ni de l'un ou de l'autre pour assurer au mieux les besoins de la clientèle.
Dans le passé, cette situation pouvait se justifier car la période de vacances se présentait à date fixe et correspondait quasiment pour tout le monde. Ce phénomène n'entravait donc que peu de personnes. Clients et fournisseurs se retrouvaient dans les mêmes trains.
Aujourd'hui, les vacances s'étalent sur plusieurs mois, désengorgeant un peu les routes mais demandant un peu de suivi en plus dans la continuation des activités.
Là, changeons de braquet, car le client peut se souvenir (et apprécier) que la tarte à la crème de la pâtisserie-boulangerie, qu'il fallait rejoindre avec un temps de déplacement un peu plus long, était diablement bonne.
J'ai pris pour exemple le petit commerce de la boulangerie, domaine sensible par excellence. Je suis sûr que vous pourrez l'adapter sans difficulté à beaucoup d'autres activités qui vous entourent dans la vie de tous les jours.
Les banques poussent à l'utilisation de l'argent électronique avec l'utilisation du téléphone, en mettant à disposition des appareils de virement ou par l'intermédiaire de son propre PC comme des avantages qui ne forcent plus à se déranger pendant les heures d’ouverture à leurs guichets pour rédiger nos virements.
Ces systèmes sont appréciés par une clientèle jeune mais ce n'est pas le cas pour la catégorie plus âgée. Ce qui n'est pas dit non plus c'est que le personnel des guichets perdra progressivement des postes de travail et, de plus, le consommateur devient son propre fournisseur de service puisque le travail d'encodage est entre ses mains et à ses propres risques d’erreurs.
Dans la grande distribution, la marge de manœuvre étant limitée, l'idée de la diminution des coûts est devenu le souci majeur.
On apprenait déjà durant l'été 2005, que Louvain la Neuve devenait pilote dans le remplacement des caissières par des systèmes automatiques qui obéissaient au principe du 'do it yourself' sans en rétribuer les acteurs. Le gestionnaire du magasin avoue, en toute bonne foi, que l'opération de payement de vos achats n'ira pas plus vite dans son exécution. Pour le vérifier, il suffit de suivre la progression de la file automatique avec la méthode manuelle plus archaïque. Les clients, questionnés à la sortie, n'apprécient pas ce nouveau système mais on les aura à l'usure comme d'habitude !
Ne croyez pas que je vais maintenant lancer des éloges aux entreprises de taille importante et représentant de grandes marques. Dans la théorie et les principes de base édictés par la pression patronale, oui, l'effort est plus important.
La Réputation et le Client ont une place de choix dans la hiérarchie des choses à choyer. Analyser la lecture des résultats des "surveys" renvoyés par le Client pour évaluer le degré de satisfaction n'est pas pris à la légère.
Mais, ces résultats permettent aussi de 'savoir jusqu'où aller trop loin'.
Si 95% d’Ok sont là, le résultat est satisfaisant: à l'année prochaine, pour de nouveaux sondages!
Pour augmenter ce score et atteindre les 100%, l'effort relatif occasionnerait une augmentation de coût et doublerait à chaque pour-cent gagné.
Rembourser les clients malheureux qui se retrouvent dans ces derniers pour-cents de mécontents, revient beaucoup moins cher. Pas besoin de le faire dans le secret. Il est de bon ton, commercialement parlant, d'en faire l'annonce d'entrée de jeu officiellement. "Client mécontent remboursé".
De plus, dans ces 5% qui représentent tout de même pas mal de clients, beaucoup ne bougeront pas, ne réclameront pas. C'est déjà ça de gagné au sujet de la marchandise douteuse qui ne s'entassera pas dans le stock de rebus.
Se retrouver dans le club (de moins en moins) fermé des fournisseurs ayant gagné le label "ISO 9000" reste important. L'étape mérite une attention particulière mais les règles qui permettent d'y arriver ne sont pas toujours revisitées dans la fonction ni dans le cahier des charges, ni dans le renouvellement du test.
Dans la pratique, l'érosion de l'efficacité vient souvent d'en haut, de décisions prises en dépit de l'impérative bonne gestion. Elles paraissent souvent sortir de toute logique aux employés de la base qui sont sur le terrain.
La loi du moindre effort pour le meilleur rendement au moindre coût est un adage bien plus proche de la réalité.
C'est un peu la suite du 'Faites ce que je dis, pas ce que je fais' que j'ai eu déjà le plaisir d'entrevoir en votre compagnie.
Au sujet du souci de qualité, en surface, pas de problème mais il ne faut pas gratter trop fort cette couche de protection! "Customer focus" en anglais, le leitmotiv par excellence. Je dirais plutôt que tout comme les employés, c'est du domaine du 'mal nécessaire'. Un peu, mais pas trop (je veux dire 'pas trop d'ennuis' liés à cette obligation, mais pas trop peu de limitation pour atteindre la manne financière qu'elle est susceptible d'apporter).
Un des volets les plus marquants de notre temps est bien la volonté en amont et en aval de ce que l'on appelle communément le problème du "low cost". Les responsables sont partout sur l'échelle. Mon premier texte intitulé "Nous sommes tous responsables" en parlait en long et en large. Le malheur, c'est qu'il n'est plus possible de retourner en arrière de manière aisée. On s'y fait tant bien que mal. Plus personne n'est prêt à payer le prix des choses. Les vendeurs ne sont plus ce qu'ils étaient non plus. L'expérience de nombreuses années permettant d'orienter le client par le passé n'est plus à l'ordre du jour face à la descente aux enfers des prix. Une vente doit se dérouler dans un minimum de temps. Pas question d'apporter des plus qui ne se retrouveraient pas dans l'addition.
Dans le domaine plus dépendant de la sécurité de ses clients, des précautions plus drastiques sont observées. Le pourcentage à atteindre est supérieur pour correspondre aux critères obligés par ce genre de secteur mais le rapport qualité/prix reste de vigueur.
La subtilité du réajustement de ce rapport est la perpétuelle préoccupation.
Le fait de se retrouver au dessus du pivot fixé sera suivi d'un relâchement pour réduire le coût, en dessous, un resserrement de l'attention et des mesures pour augmenter la qualité sera l’objectif suivant.
Le client participera également financièrement, par une augmentation du prix, pour combler le surplus qui a été nécessaire par son mécontentement.
Pas de problème dans ce principe-là. Toutefois, l'amélioration du produit devra cependant être sensible et justifier l'augmentation de prix.
Même la navette de la NASA n'échappe pas aux principes de calcul des risques.
La barre est placée beaucoup plus haut, c'est tout.
Le risque zéro qui protégerait les astronautes n'existe pas.
Comme certains ironisaient : "Pourquoi ne pas construire les avions dans la même matière que les fameuses boîtes noires qui se retrouvent toujours?".
Le 14 novembre 2006, le journal l'Echo titrait : "Penser client plutôt que consommateur". Le "shopper marketting" part du comportement du client dans le magasin car acheteur et consommateur, ne sont pas nécessairement les mêmes. 70% des décisions d'achats se prennent sur place dans le magasin. Donc, il faut rester vigilent pour faire es affaires.
Aujourd'hui, le client doit d'ailleurs attendre. Les caissières dans les grands magasins, les guichets doivent avoir un nombre de clients en attente et ce malgré les caisses automatiques. Il en va du rôle du prestataire de services calculé au plus juste par le magasin et qui ne peut pas chaumer en vous attendant. Pas de perte de temps, c'est le principe. Le temps, rappelons-le, c'est de l'argent pour le magasin mais pas forcément pour vous. Dans le domaine médical, c'est encore plus vrai. Les "patients" ne sont-ils pas là pour patienter?
"Service quand tu nous manques" Le client qui se présente avec une demande ou un besoin est souvent perçu comme une source d'interruption intempestive, comme un gêneur.
Les CRM ("Customer Relationship Management") existent et essayent d'aller à contre courant. Les errances téléphoniques prouvent que le chemin est encore loin pour arriver à la personne qui pourra donner la réponse à ses besoins.
Cela commence par "Pour le français, tapez "1" et se termine le plus souvent par "Toutes nos lignes sont occupées. Veuillez patienter". Les help desk en sont très friands. En plus quand la conversation avec le client tourne au vinaigre la tentation de raccrocher est grande. Rappeler et ce sera un autre interlocuteur auquel il faudra répéter tout le laïus.
Quand il s'agit d'un monopole oligarchique, ça craint vraiment. Plus de proactivité. Plus d'envie de vouloir aider le client. Une checklist d'action à prendre avec une structure plus élaborée, plus spécifique pour s'adapter au client. Tout cela serait nécessaire.
Le Client est Roi. Oui, peut-être encore quelque part ou pour certains.
Je crois qu'il n'y a plus assez de Rois pour avoir une base de comparaison.
Même le nôtre a dû restreindre ses ambitions et son pouvoir. Alors ?
Non, vraiment, malgré notre royauté, en tant que client, nous restons des enfants du Bon Dieu qu'il ne faudrait surtout pas prendre pour des "canards sauvages". C'est fragile et tellement récalcitrants, ces volatiles.
L'enfoiré de service,
Citations:
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"Le patron qui déclare que ses cadres constituent une barrière au changement est aussi celui qui se plaint de ne pas être écouté par ses clients", Jean Abraham
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"Quand un client achète une chose, il en achète deux : premièrement, celle qu'il croit avoir achetée, deuxièmement celle que réellement on lui a vendue.", Quino
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"Le client a toujours raison aussi longtemps qu'il paie et donne des pourboires", Gérard Bessette
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Commentaires
Il est vrai que tout vendeur souhaite rendre le client captif. Mais je préconise une solution : sortir du jeu. C'est à dire ne consommer que ce dont nous avons réellement besoin. Posez-vous cette question : ce bien ou ce service qui me tente va-t-il améliorer la qualité de ma vie ?
Mais il est vrai qu'en agissant ainsi il n'y a plus de client dans la relation. C'est donc le citoyen qui est roi ! L'achat ou son refus est un acte politique.
http://classemoyenne.hautetfort.com
Écrit par : éric | 12/09/2006