Faire moins en faisant mieux ? (27/09/2005)

1.jpgTout n'est pas bon à prendre sans réfléchir aux conséquences et aux relations avec la réalité.

Oui, il y a des jours où on aurait mieux fait de ne rien entendre !  Jugez plutôt.

Ce matin, j'écoutais la journaliste de la RTBF, Chantal Istace relater les dernières nouvelles de la Commission José Manuel Barroso. Je vous la livre telle quelle retranscrite, car j'en reste bouche bée.

L'Europe est paralysée mais la Commission bouge encore. Qu'on se le dise.

José Manuel Barroso va remettre l'Europe au travail en faisant moins.

Si, si, pour lui, faire mieux, c'est faire moins.

Il veut donc faire le ménage en tout ce que l'Europe fait, parait-il, en trop. Cette semaine la Commission va mettre des dizaines de directives en chantier à la poubelle, environ 70, rien que ça, sur les 200 qui attendent d'être définitivement adoptées. Cela fait bien. Les bureaucrates tant décriés par certains partent en chasse contre la bureaucratie. Cela pourrait, parait-il, rassurer ces citoyens qui ont dit "non" à l'Europe en rejetant la Constitution. Sauf que, à bien regarder, les quelques exemples de directives à rayer de la carte que José Manuel Barroso a épinglées, on reste perplexe.

Il veut, par exemple, zapper la directive sur l'étiquetage des aliments pour le bonheur du citoyen consommateur, c'est quand même difficile à croire. Ce sont plutôt les géants de l'agroalimentaire qui vont se frotter les mains. 

Même chose pour la directive qui veut mettre les maçons et autres travailleurs exposés aux méfaits du soleil à l'abri des risques de cancer de la peau. Ce sont leurs employeurs qui vont être contents de n'avoir pas à s'en soucier.

Il parait que tout ça, c'était bon pour l'Europe du temps de Jacques Delors. C'était bon pour l'Union d'il y a 10, 20 ou même 50 ans. C'est José Manuel Barroso qui le dit. Le monde a changé et l'Europe doit se moderniser. Par exemple, en adoptant plus vite la fameuse directive, dite Bolkestein, ou en rabotant les ambitions du Commissaire à l'environnement quand il veut empêcher que la pollution de l'air continue à tuer 370.000 Européens par an.

On ne va tout de même pas handicaper la compétitivité des entreprises pour sauver 5000 vies de plus ou de moins !

D'ailleurs, en langage pragmatique, José Manuel Barroso coupe les ailes au débat politique. Bien sûr, il ne le dit pas comme ça. Il jure que l'Europe politique est nécessaire à l'intégration économique des 25, mais il se dépêche en créant la Constitution, que la majorité des Etats membres ont quand même approuvée.

Entre Toni Blair à la présidence de l'Union et José Manuel Barroso à la tête de la Commission, une chose est claire, la seule Europe qui bouge, c'est celle des grands marchés.        

0.jpgUne autre directive que Chantal n'a pas mentionné dans la poubelle : l'harmonisation des interdictions de circuler des camions le week-end et les jours fériés, texte qui se heurte à forte partie dans l'opposition.

Toutes ces mesures mises à l'écart mais favorables à la sacro-sainte compétitivité des entreprises ont été néanmoins accueillies fraîchement par les parlementaires eurodéputés qui en ont pris connaissance par la presse et n'ont pas manqué de réclamer d'en être informés et d'être consultés auparavant. La Commission s'estime, elle, disposer du droit d'initiative sans demander leur avis ni celui des Etats membres. Après le ballottage des résultats des élections allemandes, l'Europe n'avait vraiment pas besoin de ça !

Louis Michel, fidèle à ses idées libérales, revient pour soutenir la mise à la trappe en affirmant que "la simplification, devenu le nouvel axe culturel de politique de la Commission n'a rien à voir avec le retrait de politique sociale" bien qu' "elle serve de prétexte à une entreprise généralisée de dérégulation" ne manque pas d'ajouer les autres.  

Je sais que j'ai dépassé mon quota de BLOGs pour cette fois, mais cela ne pouvait rester lettre morte.

Merci, Chantal et la presse en général pour nous réveiller quelques fois devant tant d'anomalies de fonctionnements de nos institutions. 

 

L'enfoiré,

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