Echo à l'Echo (07/10/2009)
On me dit long dans mes articles et par cela, je serais devenu vieux, disait un commentaire. L'idée de ce qu'est la vieillesse serait-elle liée à ne pas pouvoir suivre l'évolution que par le bout de la lorgnette comme il est très souvent le cas dans les médias? Notre ère d'agitation ne permet plus de faire le lien entre les événements comme s'ils étaient chacun dans un tube sans interactions. Alors, si j'appelais un jeune à la rescousse dans une conversation à bâton rompu...
Une voix jeune, plus forte, plus savante que les autres, se fait entendre.
- Cela prend du temps et on n'en a plus, t'as donc rien compris, l'Enfoiré. On a le temps de voir des images. Mais, nous sommes au temps de l'image, de la vidéo, pas au temps de l'écrit. Tu peux pas nous faire un dessin à la place? Si tu fais un billet, cela doit être comme tout le monde avec la réduction des traditionnelles 3 minutes impartîtes à tout bon éditeur en monologue.
- Mais je laisse ce rôle aux spécialistes, non? A des journalistes de grands journaux qui sont payés pour se trouver là où se passe l'action. A des caricaturistes pour donner une idée décalée avec le plus d'humour possible. Les médias sont limités par l'espace visuel et par le temps d'antenne et doivent se plier à ce genre de contrainte. A nous de les reprendre pour en tirer la substantifique moelle.
- Quand cela ne coute rien, je survole, je virevolte. Quand j'y ai mis le prix, je lis ce qui me plait. Je sélectionne. Je choisis. C'est mon droit, non?
- Bien sûr. Mais, tu payes pour des textes dont tu n'as que foutre en laissant peut-être échapper la montre en or? Tu te limite aussi dans tes progrès. Pas entendu parler du sommet de l'iceberg? En fais-tu au moins une synthèse, une analyse globale de ce que tu lis?
- Pourquoi faire? On ne me payes pas pour cela. Je consomme. Faut pas mélanger les pommes et les poires.
- Ne consumerais-tu pas plutôt que de consommer? Nous sommes à l'époque du durable. Ce qui nous impose d'utiliser l'information, de l'user jusqu'à risquer en abuser pour son propre besoin. Mais tu verras que tu as partiellement raison.
- Te rends-tu compte qu'en rassemblant tout cela comme si les éléments devaient se ressembler pour subsister, tu deviens complexe?
- Mais vivre est complexe. Je dois t'avouer que je suis un généraliste éclectique. Je vais t'étonner. Je suis d'accord avec toi. L'abondance de l'information nuit à sa compréhension. Elle noie son lecteur. Les médias sont tellement nombreux qu'il te font perdre énormément de temps dans une suite de répétitions, de déviances, de mauvaises prises de conscience. Les médias peuvent, en plus, te tromper. C'est pour cela qu'il faut toucher à tout. Car tout se tient, quelque part, pourtant.
- Ouais. Tu l'as dit. J'ai lu cela. Et tu voudrais, maintenant, que j'en fasse une analyse et que je te présente l'addition dans une synthèse?
- Ben, oui. C'est ça lire l'information. Tiens, on va se limiter. Je vais te prouver qu'il est possible d'aller bien plus loin avec une seule source, un seul journal. Prenons l'exemple de l'Echo que je viens d'acheter. L'Echo, journal qui se dit "Journal économique et financier". Le mot "écho" est bien choisi, à mon avis. Il veut dire "répétition d'un son due à la réflexion des ondes sonores sur un obstacle" d'après Larousse. Une "répétition", cela veut dire qu'il y a eu une origine précédente à ce son. Une "réflexion", une nécessité pour être bien comprise. Un "obstacle" puisque c'est ton rôle de jouer cette opposition en objectant par ta thèse, par ton opinion, si nécessaire, pour suivre ta propre pensée et ton expérience. Tu vas voir que tout se tient, pommes et poires, à condition d'en trouver la queue et d'ouvrir ces deux fruits pour en faire ressortir les pépins avant de l'avaler jusqu'au trognon. Commençons, résumons, mais, asseyons-nous, tout de même, car cela peut prendre du temps même pour résumer. Que tirer d'important de ce fatras d'informations qui te sont jetées en pâture et qui pourrait avoir un lien avec ton ego comme fil rouge et ton avenir dans la lucarne? Analysons chaque bout et faisons une synthèse intermédiaire avant d'en rassembler tous les bouts en finale. On risque de s'apercevoir qu'on a lu pour rien. C'est le risque.
- Essayons. Je te laisse le choix.
Première page: "La pyramide des âges pourrait permettre de faire des économies de plus de 3% de la masse salariale sans nuire au service".
- Sous-titre intéressant pour l'administration wallonne en temps de crise. L'atout magique serait la pyramide des âges. Un rapport de la DG Personnel, commandé par le ministre de tutelle. "Les départs massifs d'agents au plus haut niveau de leur rémunération devraient dégager de nouveaux moyens pour autant que le politique d'engagement veille à recruter des agents avec peu ou pas d'ancienneté". La logique du remplacement serait "davantage de "une entrée" pour "deux départs". "Le remplacement par des jeunes et leur embauche est, par ailleurs, cruciale, parce que les effectifs ne permettraient pas de remplacer le départ massif de cadres en préretraite", est-il ajouté. Et "La cote d'alerte est atteinte car il faudra ramer à contre-courant et développer des moyens pour allonger la durée d'activité des seniors".
Réactions : n'ai-je pas entendu qu'on est de plus en plus nombreux à chercher du travail et qu'il faut travailler plus et plus longtemps pour gagner plus? Le publique deviendrait-il l'équivalent du privé? Main dans la main, gauche et droite? L'expérience, on n'en a rien à faire. On redémarre à zéro, quitte à réinventer la roue. Adieu le savoir-faire par l'expérience. Où a été envoyé le "gras" de ce rapport? Ah, oui, plus loin, il faut "saisir l'opportunité d'adapter nos structures aux besoins d'une entreprise moderne. Le recrutement devient une priorité pour permettre une prise en charge progressive des postes tenus par les agents qui vont remplacer les futures retraités. Revisiter les processus, en les simplifiant ou, mieux, les automatiser dans l'urgence à mettre en place la structure hiérarchique.". Donc, revirement complet. Serait-ce plus de chefs pour faire tourner le bidule? Et, accroître encore le problème. A qui profite la crise? Quand on sait qu'au cours des 5 dernières années, il y a eu 5318 départs contre 2658 entrés. Qui a besoin de travailler après l'âge limite? Cherche bien. Moi, j'ai trouvé.
- Que vais-je tirer de cela? Ben, on dit tout et son contraire, à mon avis.
- Bien vu. Voilà le type de rapport qui veut le beurre, l'argent du beurre, le sourire de la crémière et la bénédiction par les esprits jeunes et vieux. Une sorte de quadrature du cercle consensuel. D'accord?
- Information nulle. Qui n'apporte aucune conclusion, si ce n'est de faire perdre le Nord et l'argent de ceux qui ont payé le rapport.
- Tout compris. Passons au sujet suivant.
"Il faut prolonger le nucléaire en Belgique.
- Le ministre de l'Energie plaide pour le maintien en activité de trois réacteurs nucléaires et prône un prélèvement structurel sur Electrabel. Ne trouves-tu pas qu'en période de crise, ce ne serait pas une solution? Je sais, l'énergie nucléaire fait toujours peur, mais qu'est-ce que quelques années en plus pourrait changer? Les experts de Gemix chargés de dessiner l'horizon 2020 préconisent de retarder la fermeture des centrales de dix ans. Une manière de reculer pour mieux sauter.
- "Pour mieux sauter". Amusant. Et les éoliennes, le solaire, les marées, n'est-ce pas la solutions dans le durable? Il faut investir dans celui-ci.
- C'est une optique. Tu as raison par "investir", mais ne se rend-on pas compte que l'approche de l'énergie produite par le nucléaire pourrait se faire par une autre manière? La fission, c'est le plus facile. La radioactivité existe déjà sous cette forme dans le processus naturel spontané. Créer l'énergie comme le soleil le fait, c'est moins facile. La fusion produit, après un "starter" important d'énergie, une énergie bien plus impressionnante encore. Alors, par manque d'investissements, pour des raisons politiques et financières, l'énergie pour tous et presque gratuite, a été mis entre parenthèses depuis des dizaines d'années. Le budget militaire, bien plus important, a permis de construire la bombe H avec la fusion nucléaire. Nous étions en 1945. Les écologistes ruent devant cette décision d'allonger de 10 ans l'usage des centrales, mais n'est-ce pas perdre une partie des solutions?
- On patiente avec du charbon, des éoliennes, du soleil, de l'énergie humaine à bon marché. C'est sûr. Mais quand dans la balance, il y a le risque le risque et les déchets...
- C'est comme devant ton banquier qui te parle des risques des actions avec des plus values importantes contre la sécurité des bons de caisse. Connais-tu des actions en Bourse qui préconiserait l'utilisation de la fusion nucléaire? Pour s'électrifier, le nucléaire "fission" est sauvé par le manque d'investissements. Le renouvelable, c'est bien. L'éternité, c'est encore mieux, non? C'est fou, ce qu'on traîne à trouver les bonnes et définitives solutions.
- Où en est-on dans la fusion? Pas bien loin. On s'impatienterait?
- On pourrait, oui, ta planète en dépend et t'auras toujours besoin de plus d'énergie avec tes gadgets.
- Lol... Passons à une autre page.
"La récession en Irlande sur le point de sauver le traité de Lisbonne"
- Il y avait la démocratie, il y a aujourd'hui la récession. "Par devant par derrière, tristement comme toujours", on ne chante plus cela de ton temps?
- Que veux-tu dire?
- Lis ceci: "Si l'Irlandais n'avait pas fait partie de l'union monétaire, nous aurions eu un scénario à l'islandaise. Qui nous dit que si l'Irlandais rejette le traité, la BCE continuera à injecter des liquidités dans notre secteur bancaire". La peur du vide. Une crise dans la crise. C'est à coup de référendum que l'on use tous les principes et les idéologies. Suspense? Ton pronostic, c'est quoi?
- J'en ai rien a cirer. Je n'ai jamais rencontré un Irlandais.
- C'est peut-être le même problème et ta réponse semblable pour le sujet suivant.
"La Lettonie, en récession profonde, paie cash sa folie des grandeurs"
- On y lit: "Une chute de 18,5% de son PIB. Ils vont devoir apprendre à gagner leur argent au lieu de l'emprunter. Dégringolade des salaires de 35% et les retraites de 10%. Plus grave pour l'avenir, les universités ont des budgets rabotés de 45%. Les gens voulaient tout et tout de suite." Tu te rends compte des résultats? Tu n'es pas un peu comme ça, aussi?
- Mais nous, jeunes, n'avons rien. Pas d'avenir.
- Conseil d'ami, ne pense pas ainsi. Nous n'avons pas d'avenir. Toi, bien, mais ce sera un peu plus dur pour trouver la bonne porte d'entrée et méritera beaucoup de patience, j'en conviens. Le sujet suivant, ce n'est plus pour toi, quoique...
Les seniories font une percée
- 3,7 % d'octogénaires. Voilà un secteur en expansion. Les plus de 60 ans varie de 9 à 25 % selon les régions. Les "baby boomers" attendent le 4ème âge sans impatience. L'autonomie recherchée donne des opportunités dans les portefeuilles immobiliers. Car il y a encore des moyens de ce côté-là. Les rendements sont en hausses pour suivre la demande.
Mais si si cela ne t'intéresse pas, si tu veux, nous pourrions passer à la synthèse.
- Pas si vite. T'as pas vu la dernière page?
"Spéculations dans la mode".
- Voilà, le bling-bling qui réapparait. Les ventes mondiales du luxe ont chuté de 10% en 2009. Des rumeurs de rapprochements. C'est encore des fusions de sociétés?, dit le jeune.
- Ouais. Même, dans le prestige, on ne compte pas que des amis. Là, on ...
- C'est bien fait pour eux. Le luxe, nous, jeune, on n'en veut pas.
- Tu as peut-être raison, mais, là aussi, dans le beau, il y a du business. Le low-cost regarde où cela a mené? Du chômage, des produits qui ne tiennent pas la route dans le temps. Toi, qui aime le durable. D'ailleurs, même après cette chute, on lit "à moyen terme, les acteurs du luxe ne devraient pas tous profiter de la même façon de la reprise attendue de la croissance". L'horlogerie-joaillerie, ce sera plus dur vu les prix d'entrée plus élevés que ceux de la mode ou de la maroquinerie. Donc, là, aussi, il faudra se plier à la demande.
- Mais, quel est le lien entre tout cela? Toi, qui aime en chercher partout.
- N'oublie pas de lire l'éditorial d'un journal. Le travail de collecte a souvent été prémâché. On y lit "La logique et l'équité voudraient que tous les acteurs socio-économiques participent à l'effort selon leur capacité contributive. Et c'est que l'on touche à l'essence du débat", voilà une synthèse, non? Et ta conclusion serait?
- Plus loin. "Secteur public à la diète ou dans la profusion comme pour le secteur privé. La concurrence existent même entre les deux". C'est la m... partout, quoi. Ils cherchent encore des profils de plus en plus qualifiés ? Mais jusqu'où ira-t-on?
- C'est pas la joie. Faut pas rêver. Tous resteront à naviguer sur un bateau imaginaire en louvoyant entre deux eaux. Ce sera ceux qui auront le gouvernail en main. Sous la pression, ils se retrouveront sur des bateaux de plus en plus rapides mais avec le feu du moteur des actionnaires au cul. Les autres devront apprendre le maniement du tuba. Au milieu, on apprend la brasse-clown en passant par la grève du zèle comme seul moyen de réaction. En fait, tout le monde est pris par les c... mais avec la pièce supérieure plus ou moins longue. Alors, on ne réfléchit plus. On fonce. Tu avais raison, je me fais vieux. Avant, on avait les moyens de sa politique. Aujourd'hui, la politique, sans moyens, ne sait plus où donner de la tête. Alors, quelle voie aimerais-tu suivre? Par ton Internet, tu tchates, tu ne lis plus que les eMails des copains...
Tiens, la Poste veut engager des facteurs de quartiers. Facteurs que tout le monde reconnait aussi comme du "low-cost". Le rendement n'est pas tout si l'on ne veut pas se limiter au superficiel.
- La Poste? Quelle importance? Tu me parles d'Internet et des mails, donc, on a la solution. Et puis, toujours l'argent...
- Mais tout ne passe pas par là. Tu devrais le savoir. Les colis, les lettres existeront toujours. C'est l'Europe qui veut privatiser à tout va. Elle dit qu'il faut toujours rester compétitif, mais par rapport à qui, à quoi? A eux-même, en cercle fermé? L'argent, comme disait Jacques Attali dans son "Le sens des choses", peut-être un instrument de la valeur, un moyen d'échange et un instrument de la conservation de la valeur".
- T'as pas vu, ils proposent d'accepter une croissance zéro pendant un temps?
- Cela impliquerait quoi? Le budget pour la croissance zéro, c'est quoi, d'après toi?
- Ben, c'est de ne plus lire les informations. Cela me donne mal à la tête et des nausées à l'estomac. Cela pousse à ne plus rien faire...
- Tu m'énerves. Dialoguer, avec toi, reste difficile. Du temps et de la longueur, je veux bien te les consacrer. Nous sommes en plein dans un conflit de l'eugénisme. Un nouveau conflit de générations. Tu deviens long, long à digérer. Tu n'aurais pas une boule de cristal pour lire notre présent en commun et pour entrevoir votre avenir? Çà, au moins, c'est un média qui nous manque déjà. Si je parle de tout, sans oublier d'ajouter son contraire, je ferais preuve d'un certain manque d'universalité dont nous avons tellement besoin dans un monde en expansion. Gardons l'ouverture d'esprit.
Je ne vais pas te gâcher ta journée en te disant que réduire son horizon, c'est, justement, un symptôme de la vieillesse et, sinon, d'un autre, plus grave, l'autisme.
La conclusion n'est pas celle-ci?
La longueur des propos, n'est-elle pas, simplement une habitude de vouloir tout découper en rondelles?
La jeunesse experte ne se se confronte plus avec l'autre que pour poursuivre une compétition. La solidarité, appuyée comme solution à nos crises, ne se trouve que dans les beaux principes du dons du plus riche vers le plus pauvre... Mais, il faut avouer que la jeunesse a l'esprit solidaire. Bien facile de donner l'aumône. Bien facile de pleurer pendant un instant et de penser à autre chose par après. Il y a un temps pour tout, pour expliquer nos penchants. L'analyse demande bien plus de temps. A chercher les sources des problèmes, les tenants et les aboutissants, les historiens seront là pour rassembler tout cela mieux que nous ne pourrions le faire. Ils auront le temps nécessaire à loisir.
On ne peut être long, d'accord Tout doit aller tellement vite.
Analyser n'est plus de mise. Je plains les historiens.
L'enfoiré,
Echo à l'écho,à l'écho sur Agoravox?
Citations:
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« Quand on montre du doigt, c'est parce qu'on veut être certain d'être du bon côté du doigt », F. Lordon
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« Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. », Jean de La Fontaine
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« La vie n'est ni longue ni courte ; elle a des longueurs. », Jules Renard
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« Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal informés ils deviennent des sujets. », Alfred Sauvy
Commentaires
Dialogue intéressant entre une personne d'âge mûr et un jeune homme en quête de réponses. La personne d'âge mûr sent même le besoin d'expliquer qu'elle est vieille : « Alors, on ne réfléchit plus. On fonce. Tu avais raison, je me fais vieux. Avant, on avait les moyens de sa politique. Aujourd'hui, la politique, sans moyens, ne sait plus où donner de la tête ». Et cela me ramène à cette phrase que je citais, ailleurs, de Brel : « Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en chagrin, Traverser le présent en s’excusant déjà de n’être pas plus loin ». Et cette propension de la jeunesse à ne voir que l'éphémère alors qu'elle pense que la vieillesse ne s'enfonce que dans l'archéologie fera toujours débat, comme il a toujours fait débat. Tchekhov disait déjà dans la Cerisaie, je crois, « Toutes les questions importantes, vous n'en faites qu'une bouchée, mais, mon petit, c'est parce que vous êtes jeune, et qu'aucune de ces questions ne vous a encore fait mal ».
Et si le dialogue avait été inversé? Si le jeune homme avait expliqué à la personne d'âge mûr son siècle? Est-ce que la position dominante aurait été la même? Un dialogue qui aurait pu faire même mentir Rimbaud : « On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans ».
En bref, la question que je me pose est la suivante : pourquoi faut-il que ce soit toujours les vieux qui doivent s'expliquer et se justifier devant la jeunesse? A contrario, pourquoi faut-il que les vieux justifient toujours leur point de vue auprès des jeunes?
Socrate a déjà écrit : « Nos jeunes aiment le luxe, ont de mauvaises manières, se moquent de l'autorité et n'ont aucun respect pour l'âge. À notre époque, les enfants sont des tyrans ». Pourquoi devrais-je donner mon avis sur cette opinion? Qu'en pense le jeune? Je connais mon point de vue. Et si « l'autre » me donnait son point de vue? A-t-il le goût d'entendre mon point de vue? Ai-je le goût d'entendre son point de vue?
Dialogue kafkaïen. On n'en sort plus de ce conflit des générations. Parce qu'on a eu le malheur d'y entrer.
Amicalement
Pierre R. Chantelois
Écrit par : Pierre R. Chantelois | 07/10/2009
Cher Pierre,
Le dialogue est évidemment imaginaire. La fin n'a pas justifié les moyens comme vous avez pu le constater.
Difficile de se mettre dans la peau de l'autre.
Comme vous savez Brel est mon maitre à danser et à réfléchir.
Comme on le disait dans la famille « si on ne veut pas vieillir, il faut mourir jeune ».
On se retrouve souvent vieux alors qu'on n'a pas vu le temps passé.
Avoir trouver son violon d'Ingres même dans sa profession, fait valser les années.
Je connais tout de même ce que les jeunes subissent aujourd'hui: ne plus pouvoir faire leurs preuves. Cela est nouveau, enfin presque. Quand on se prépare, plein de motivation, on tient le coup et on dérape en fin de parcours. Vous savez très bien qu'à une époque, on venait nous chercher. Maintenant, il faut avoir un CV en béton, mais pas trop lourd tout de même pour ne pas se voir refusé pour raison de « trop qualifié ».
Je suis un adepte de la maïeutique. On ne peut imposer, mais seulement proposer pour ne pas revenir zéro et réinventer la roue.
« Si le jeune homme avait expliqué à la personne d'âge mûr son siècle? »
Cela doit se passer souvent aujourd'hui, plus qu'à notre époque de « jeune » où on n'aurait pas osé.
Les jeunes doivent s'expliquer. Absolument. Pourquoi croyez-vous que je m'attarde sur un forum comme AV où il faut le dire, il y a plus de jeunes? Je m'y accroche. C'est parfois dur. Mais je n'en ai jamais eu peur et depuis longtemps.
Oui, nous y sommes. Une génération remplace l'autre. Le cycle de la vie l'impose et passer le flambeau ne m'est pas désagréable du moment qu'on me le donne le flambeau une dernière fois. (cela comme je le disais depuis longtemps dans "A la casse")
Écrit par : L'Enfoiré | 07/10/2009
L'enfoiré
Des contacts que j'ai, à l'occasion, avec les jeunes gens me montrent que leurs préoccupations quotidiennes ressemblent parfois aux nôtres et, d'autres fois, sont diamétralement opposées aux nôtres. Les frontières et les soucis identitaires ne sont plus au centre de leur vie. Comme elles l'ont été dans la nôtre. Dans la mienne, devrais-je dire. Nos inhibitions d'antan, nos craintes et nos restrictions mentales ne procèdent plus, aujourd'hui, des mêmes origines judéo-chrétiennes. Je les sens plus libres. Plus ouverts sur le monde. Moins écorchés et moins soumis. Parfois leur témérité m'exècre. Parfois elle me fascine.
Je voudrais tant un jour qu'un jeune m'explique son siècle et la vision qu'il en dresse. Si tant est que l'exercice lui tente, bien évidemment. Ils en sont si éloignés ;-)
Pierre R. Chantelois
Écrit par : Pierre R. Chantelois | 08/10/2009
Pierre,
Je vais vous avouer que cette vision jeune-là me plait assez.
Est-ce Internet qui a ouvert les contacts et que nous n'avons pas connu dès le début?
Mon récent article "Diviser ou multiplier?" apportait des idées dans ce sens. C'était la clé de l'article, qui essayait justement d'expliquer que nous ne pouvons plus faire comme avant.
J'ai déjà ressenti cette situation sur AV. Les idées émises dans certains articles et qui sont assez identitaires émises par certains seniors sont immédiatement attaquées par les commentaires.
Une franche des jeunes restent pourtant nostalgiques mais ont les rencontrent dans l'extrême droite. J'ai parlé de Antwerpen (Anvers) et là, il y a eu des drames racistes.
Vous expliquer leur siècle? N'oublions pas que c'était aussi partiellement le nôtre.
Personnellement, j'ai toujours aimé garder des contacts intergénérationnels mais je n'ai pas pu aller aussi loin. Pour "dessiner" son siècle, il faut aussi un peu de recul. Les jeunes aussi travaillent durs quand ils ont un emploi. Ils ont une autre peur, celle de le perdre. Emploi qui leur a occasionné des recherches lassantes et souvent infructueuses.
Et cela est une grande différence avec notre époque qui était dure, mais qui permettait d'exister si la volonté y était.
J'ai fait l'exercice de penser à "Si c'était à refaire". http://vanrinsg.hautetfort.com/archive/2006/09/27/et-si-c-etait-a-refaire.html
Écrit par : L'Enfoiré | 08/10/2009
Pierre,
Dans mon "interview" avec le jeune, j'aurais pu parler de la Chine car elle en faisait aussi partie de ce journal.
Je ne l'ai pas fait parce que j'en avais parlé précédemment en long et en large.
Mais comme sur AV, on remettait le couvert, avec un certain Hengxi et sa propagande assez marquée, nous sous sommes un peu égratignés dans un dialogue de sourd dans ses 2 derniers articles.
http://www.agoravox.fr/auteur/hengxi
Je parle de cela car de ce côté, il faudra aussi s'intéresser aux jeunes. Et ce ne sera pas facile.
Écrit par : L'Enfoiré | 08/10/2009
L'enfoiré
J'ai bien suivi le débat. Merci.
Pierre R.
Écrit par : Pierre R. Chantelois | 09/10/2009