Ça va, les mecs? (24/06/2011)

25ème anniversaire de la disparition de Coluche. Le 19 juin 1986, sa moto heurte ce «putain de camion». Le 19 juin, France2 présentait "Coluche, l'histoire d'un mec", après plusieurs autres émissions qui avaient déjà rassemblé les anciens "mecs" de l'époque pour parler de lui. Qu'est-ce qui a changé? Que serait-il devenu s'il avait vécu?

0.jpgQue n'a-t-on pas tout dit sur lui? Le pire et le meilleur. Un clown qui faisait rire. Un homme désespéré qui s'était laissé prendre à son propre jeu. Fasciné par le motard rebelle incarné par Marlon Brando.

Il conserve, aujourd'hui, une popularité perpétué par les «Restos du Cœur», dont il n'est pas, vraiment, l'inventeur de l'idée mais son réel fondateur. Le grand show médiatique, aussi, qui rassemble tous les ans chanteurs et artistes dans une entreprise qui dépasse peut-être l'ampleur de ce qu'il aurait peut-être voulu.

En 1974, il sortait: "L'histoire d'un mec" et tout est parti d'un trait de plume.


 

Ses sketchs qui restent dans les mémoires: le schmilblick, les sketchs qui parlaient des Belges avec un humour sarcastique.



Le 30 octobre 1980, poussé par la population, il se présente aux élections  présidentielle. Pas de programme, le parti d'en rire.

A l’époque, il rentrait de Guadeloupe et revenait de loin : depuis la fin de la campagne présidentielle, exilé dans son paradis caraïbes, il en avait croisé d’autres très artificiels.« J’ai tout essayé : le hasch, l’héroïne… j’ai même goûté au Martini » au temps de campagne électorale accro à la cocaïne.

Au sommet de sa gloire en 1980 sur scène, il lançait "Si tous les cons se présentent, moi, aussi, j'y vais".

C'est ce Coluche en campagne de l'automne 1980, qui a été choisi par Antoine de Caunes pour «Coluche, l’histoire d’un mec», avec François-Xavier Demaison dans le rôle de Coluche.

Celui qui a dit « La complexité du personnage, sa finesse, son intelligence et sa capacité à catalyser une certaine connerie à la française », méritait un acteur d'exception.

0.jpgDans un de ses sketches intitulé "Le blouson noir", il annonçait "La crise! C'est con! Vous auriez dû v'nir".

Il ne pouvait pas mieux dire tellement elle est pérenne.

Un sondage montrait qu'il avait obtenu jusqu’à 16 % d’intentions de vote, avant de renoncer en avril 1981, sous une autre pression du monde réel de la politique, par les intimidations et critiques ("Un chieur qui se prend la tête"), suite, aussi, à l'assassinat de son régisseur, René Gordin.

"Populisme", c'est-à-dire la position politique qui prend le parti du peuple contre les élites, est le mot que les politologues utiliseraient, aujourd'hui, pour définir cette situation.

Il a tout connu, tout tenté, pendant sa courte existence de 41 ans. Aujourd’hui, une statue de lui en salopette en bronze grandeur nature dont il manque la tête, trône à Montrouge, ville de son enfance.

Plusieurs centaines de badauds se souvenaient de lui à cette occasion.

En 1984, Jacques Attali lui permet de rencontrer François Mitterrand.

Rencontre pleine de quiproquos, de provocations, de malaises maîtrisés avec bienveillance par le président.

Le film "Tchao Pantin" de Claude Berri, pour lequel il remporta l'Oscar du meilleur acteur, est celui dans lequel il mettait en scène son mal de vivre.

Car le côté pile de Coluche cachait un terrible névrosé en guerre contre la société et lui-même.

En 1985, le mal d’amour et de tendresse, Coluche revenait pour se faire aimer.

Le clown triste sombre dans la dépression, l'alcoolisme et la drogue depuis que sa femme Véronique Kantor l'a quitté.

L'exode en Guadeloupe lui a permis de le relier avec une passion: fabriquer des chaussures.

Il y a invité la femme de Patrick Dewaere. Celui-ci se suicida le 16 juillet 1982 avec une carabine qu'il lui avait offerte.

Bref, Coluche attire, décidément, les drames par ses angoisses de puriste, par son approche vers le perfectionnisme de l'infini.

"Le film pornographique le moins cher du monde" est le livre, écrit par une jeune marginale, Fred Romano, qui décrit son drame.

En 1986, lors de sa dernière émission, Maryse, dans « Dimanche chez vous », lui pose une dernière question  : « Comment voudrais-tu mourir ? »

«Le plus tard possible et avec mon ukulélé» répond-il.

L’émission fut diffusée début juillet et l’ukulélé enterré avec Coluche.

«Je suis capable du pire comme du meilleur. Mais dans le pire, c’est moi le meilleur », avouait-il en direct pendant "Y’en aura pour tout le monde".

Grossier ou vulgaire dans ces paroles?

Plutôt, un culte de l'incorrection politique et de l'humanisme dans sa pureté extrême. Apprendre à oser dire merde aux cons et à la connerie sans avoir peur de passer pour grossier ni vulgaire, c'est souvent nécessaire.

Le risque que cela "déborde" avait toujours été présent.

La décennie des 80'ties était toute en contrastes en événements politiques et musicaux.

Le capitalisme avait pris ses quartiers avec force.

Le socialisme de Mitterrand n'a pu faire illusion au changement que pendant une bonne année.

De nouveaux humoristes essayent de rester dans le créneau du politiquement correct pour ne pas se faire virer de l'antenne.

La fesse et le sexe ont été remis à l'index.

La situation politique est-elle tellement différente pour avoir viré de la sorte? 

Le mondialisme s'est accentué.

L'Europe a réalisé le "spread" des problèmes et de son influence.

Les crises successives de ce 21ème siècle se succèdent et se ressemblent dans leurs conclusions. 

Les Indignés le restent dans beaucoup de pays du monde occidental.

Depuis, on fait la grève même avec humour avec un Café serré.

L'espoir a pris les voiles vers des horizons lointains.

Que serait-il devenu aujourd'hui s'il avait vécu?

Il aurait 65 ans.

Il se ferait virer d'émission en émission.

Il aurait continué à écrire ses sketchs alors que les humoristes actuels se font souvent aider.

Les Restos du Cœur n'auraient pas pris cette voie "people".

Adversaire de la politique, à jamais.

Anti bling-bling, notoire.

Gauchiste, pur et dur, rebelle, alors que le clivage droite-gauche, n'est plus ce qu'il était.

Sur Internet, il deviendrait agressif quand on constate que certains tentatives du même type, sont contestées avec le nom de "Gauche Caviar".

"Un Coluche vous manque et tout est dépeuplé"?

Un des commentaires qui suivait cet article, était significatif: "Arrêtons un peu de fantasmer sur Coluche. A la fin ça me fait penser aux documentaires à répétition sur les Kennedy. Si Coluche n'avait pas créé les Restos du Cœur, il ne serait jamais resté dans les mémoires que comme un comique troupier, et aurait à l'heure actuelle autant d'aura que Le Luron ou Fernand Raynaud. 25 ans après son décès, ce devrait être surtout l'évolution de la précarité en un quart de siècle que l'on devrait examiner au travers de Coluche, le reste n'est que roupilles de sansonnet."

Les cimetières sont pleins d'indispensables.

Les hommages sont toujours un peu nostalgiques et rétros.

Quant à moi, cela faisait plus de 6 ans que je signais mes billets hebdomadaires avec le pseudo d'enfoiré. Je me devais de lui rendre un hommage particulier.

Michel Colucci, dit Coluche, avait donc pris le Belge pour cible dans ses sketchs.

L'auto-dérision dont il fait preuve, pourrait être plus confondue à celle de l'esprit belge.

Pour gouverne, nos frites belges sont toujours là, comme bon sujet de conversation, une fois ... mais pas plus.

Mais, les blagues belges ne font plus, tout à fait, recette d'après les derniers questions posés aux Français. Faudra, peut-être, changer de registre.

En 1986, il écrivait, aussi "Comme disait ma mère ça nous empêchera pas d'aller au paradis! Ça m'étonnerait que saint Pierre soit inébranlable" dans un extrait d'un sketch suggestif, au titre évocateur, "La Pute".

Coluche, névrosé dans l'intimité à force de vouloir un lendemain meilleur. Chalenge bien dure pour celui qui veut rendre la vie toujours meilleure quand les cartes sont distribuées au hasard.

Qu'on y tende, mais que l'on accepte aussi de se tromper quelques fois.

Et si on fabriquait des chaussures et pas uniquement en Guadeloupe?

Pas d'accord? Élargissons, encore.

L'écrivain, Bernard Werber, avait 25 ans en 1986.

Cinq ans après, il écrivait son premier livre "Les fourmis" avec le succès que l'on sait.

Plus récemment, il lui a pris la douce envie d'imaginer les passés et les futurs dans ses "Paradis sur mesure".

Un monde où il est interdit de se souvenir du passé,  où un humoriste partirait à la recherche du lieu où naissent les blagues anonymes...

Si cela ne donne pas le vertige, ces deux mondes-là, qu'est ce qui le donnerait?1.jpg

Le scénario de ce dernier aurait pu plaire à Coluche: "Un comique en pleine gloire décide de tout cesser afin de trouver l'origine des blagues. Ils remontent le fil jusqu'à découvrir une société secrète, la Grande Ligue de l'Humour, terrée sous un phare au large de Carnac. Il suit ainsi la formation de ceux qui créent les boutades, découvrant l'histoire de l'humour et la biologie du rire, parvenant à devenir membre de la GLH. Pour son avenir, il s'interroge sur la Blague Ultime, celle qui serait capable de faire mourir n'importe qui de rire.".

@+ Michel, dirais-je, aujourd'hui.

Salut ma Poule, comme tu le disais à tes copains...

A quand ton prochain œuf, vu de la haut?

Ah, oui, j'oubliais, tu le chantais déjà dans Misere en citant, mystérieusement, l'année 2012 dans ta chanson.

Une prémonition? Qui sait ?


 

L'enfoiré,

 

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Citations de Coluche

 

0.jpgMise à jour 3 juin 2016: Trente ans et toujours présent comme symbole ou comme icone dans un documentaire "Coluche, le bouffon devenu roi".

 

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