Espace vital (10/03/2007)

LogementPlus connu sous la fameuse expression "Lebensraum", notre espace vital dans nos logements se restreint de toutes parts à coup d'augmentation de prix de ce sempiternel mètre carré.

En 2005, l'immobilier résidentiel battait record sur record. 2006 a continué sur les mêmes chapeaux de roue. Pour 2007, on s'attend à un léger tassement tout de même. Cela reste à vérifier dans les faits. Accéder à la propriété est le but de beaucoup de Belges qui, paraît-il, ont une véritable brique dans le ventre. Le Salon International de la construction, de la rénovation et de l'aménagement Batibouw de Bruxelles a fermé récemment ses portes et a attirer comme chaque année près de 400.000 visiteurs. La tendance est aux mouvements. Au cours d'une vie, le lieu de résidence ne cesse de changer. Mais, les habitations sont occupées à se rétrécir. Nous ne sommes pas encore dans le monde de Lilliput, mais vu l'augmentation du prix au mètre carré toujours élevée, les maisons, les appartements ont dû prendre un peu moins de goût à l'extension. 

16% de surface en moins ont été comptés depuis 2000 et 15% en plus dans le prix pour le même bien est une moyenne très dépendante de la région où est situé l'habitation, ville ou en dehors, de son type et de sa catégorie. Les appartements ont carrément doublé de prix depuis 2000. Dans les villes, les budgets du logement ne se contiennent plus.

Ce 6 mai, l'Echo publiait un article qui annonçait "Après l'envol des prix, la brique atterrit en douceur" et qui accompagnait une enquête sur l'immobilier en Belgique. Les 16% d'augmentation de 2005 en moyenne annoncés tout en étant ensuite contestés et réduits par les notaires, étaient supportés par des taux hypothécaires alléchants et ont étonné plus d'un professionnel. En 2006, les taux d'intérêts qui tendent à reprendre le chemin de la hausse, vont avoir un impact inverse sur les prix pratiqués dans l'immobilier. Pas de baisses prononcées pourtant. Le marché restera soutenu par la rareté des biens à acquérir, par des taux qui ne grimpent toujours pas outre mesure et par les astuces que les organismes financiers trouveront pour contourner le problème. Une idée de la ministre de la Justice Belge, Madame Onkelinx, voudrait quadriller le marché locatif pour obtenir une vision plus précise et pour bloquer les loyers au-delà de l'augmentation de l'indexation dans les zones de forte spéculation. Mais personne n'imagine par quelle procédure et dans quel "serpent monétaire" (Echo 23-juin-06).

La disponibilité des terrains à bâtir se raréfiant, les populations se concentrant dans les villes pour diminuer le nombre de kilomètres vu le coût croissant du pétrole sont des raisons bien naturelles qui suivent l'offre et la demande. La TVA pour la rénovation d'un bien s'élève à 6% tandis que celui du nouveau à 21%. Les taux d'intérêt très bas que nous connaissons ont évidemment poussé les investisseurs. La fougue à l'achat vit un plein boum et les prix s'envolent. La bourse a été très performante. Le creux de la vague vient d'être franchi et la remonté des taux s'annonce. Le crédit hypothécaire suit le même chemin et monte de 4 à 5 %. Jusqu'ici, il ne grève le budget d'un ménage qu'à concurrence de 30% au maximum. Il restera très amorti dans sa remontée, dit-on. Le frein que cela pourrait avoir ne prendra effet que bien plus tard et la courbe des hausses de prix du loyer et du prix d'achat d'un bien immobilier n'en sera abaissée que bien plus tard.

En Belgique, 330 habitants par km2 cela fait du monde à loger.

logement"Mais jusqu'où aller trop loin?", pourrait-on se demander. Pour Bruxelles, on est encore bien loin des sommets en comparaison avec des villes comme Londres ou Paris. Le tarif de la vente et de la location dans l'immobilier est nettement en dessous de ces capitales qui ne jouissent pas, elles, de l'étiquette de capitale de l'Europe.

Mais, qui pourra s'offrir une maison ou un appartement dans un futur rapproché? En moyenne, 48% d'augmentation des maisons unifamiliales en 5 ans. 96% dans la région bruxelloise. Les moyennes de loyer d'un studio, 400 euros, d'un appartement avec une chambre, 550, de deux chambre, 825. Un jeune sera d'office exclu vu la chute des salaires en début de carrière et les risques de ne pas pouvoir assumer pour cause de restructurations programmées par la logique commerciale et les fusions des entreprises pourvoyeuses du plus grand nombre de travailleurs.

Une enquête en caméra cachée avait démontré en effet que les banques refusaient d'accorder un crédit à ces jeunes qui apportaient une garantie aléatoire. On ne prête qu'à celui qui peut déjà prouver qu'il a mis de l'argent de côté et qu'il l'a aussi devant lui. Quadrature du cercle bien peu admissible quand l'imagination des interlocuteurs qui ont les répondants fait défaut. Le crédit ne se trouve malheureusement pas sous le sabot d'un cheval. Alors quand celui-ci ne veut pas lever la patte! Le risque ne fait manifestement pas partie de la "grande maison" au réservoir à espèces sonnantes et trébuchantes. Les parapluies sont du parcours même quand il ne pleut pas. Dans le même temps, en Belgique, les 4 plus grandes banques affichent une santé de fer avec 11,5 milliards d'euros de bénéfices nets en 2006 !

Récemment, pour corser un peu ou pour laisser un semblant de "générosité", les banques ont même lancé des emprunts d'une durée de 40 ans. Plus d'une génération devra bientôt assumer l'achat d'un bien. Il reste à espérer que la construction soit solide type "château fort".

Avoir un "profil atypique" pour une banque est la cerise amère sur le gâteau. Être en position de faiblesse à la demande d'un prêt pour cause de "précarité", de "maladie", d'âge trop canonique dans l'emploi que le jeune occupe est le plus mauvais statut imaginable. Des taux intéressants et l'impossibilité d'accomplir son rêve est devenu pourtant chose courante.

Les habitations sociales sont aussi trop peu nombreuses. C'est endémique. Cent mille ménages en Flandre attendent un logement social avec, pourtant, les critères d'acceptation en poche.

Il y a aussi différents acteurs qui font monter les prix des loyers et des ventes. Internet (par ex immoweb) permet de placer des annonces, ce qui est un progrès. Les agences sont les premières à être à l'affût de prospects éventuels. Le but de celles-ci n'est pas le même que le vendeur ou propriétaire de biens à louer. C'est leur raison d'être. Les 3,63 % de commissions (TVA comprise) sont le gagne pain. En échange, il y a un réseau qui s'agrandit après chaque signature de contrat. La publicité, pour elles, n'est plus à payer puisqu'elle s'intègre dans les valves des immeubles ayant biens en location ou vente. Pas besoin d'être très précis sur les annonces. Laissons venir le candidat et ensuite proposons le bien «de visu» et s'il ne convient pas, au pire en présenter un autre. Ce procédé en réseau n'est évidemment pas à la portée du particulier.

Entre l'acheteur et le vendeur, le locataire et le propriétaire, elles se sont installées un intermédiaire de plus en plus obligé. Des règles propres deviendraient plus claires, depuis le 1er février 2007. Ces règles ont été instaurées pour fixer le délai de réflexion à 7 jours avant le contrat. Un compte-rendu mensuel au consommateur à fournir par l'agence, un contrat d'exclusivité limité à maximum 6 mois sont d'autres avancées. Une indemnisation de la partie qui se sent lésée par une rupture de contrat unilatérale est également fixée de manière plus précise.

La main d'oeuvre qualifiée est recherchée et celle qui est disponible n'est pas en adéquation avec les besoins. Donc, les prix suivent la demande et montent.

La construction est-elle plus chère à réaliser? Pas sûr. A l'arrivée, oui. Au départ, des travailleurs venant de pays moins "fortunés" encore viennent à la rescousse pour bien moins cher et surtout "moins fiscalisé" ("La bonne soupe noire"). Mais ce n'est évidemment pas une généralité et les contrôles s'intensifient.

Le pourcentage des frais de notaire et impôts est connu et un peu "envahissants", bien sûr. Le prix des terrains et leur diminution dans les grandes villes expliquent aussi la "folie" des prix.

A Bruxelles, en plein avenue Louise, se trouvait la Tagawa, un hôtel 4 étoiles, abandonné depuis 1995. Un squat de niveau "top". Une clientèle particulière y a élu domicile depuis 2003: famille, chômeurs, artistes, étudiants...en tout, 320 logements. La précarité n'a pas le même prix. Mais, attention, c'était très vite complet et puis il fallait bien préserver un peu d'espace vital. En accord avec le propriétaire, ils prenaient en charge la gestion de l'immeuble sans bail. Ils investissaient même pour la préservation du bien et sa rénovation. En 2007, il était question de remettre les pendules dorées à l'heure.

On parle ainsi de 30.000 unités de logements inoccupées dans notre ville. La légalité n'est pas vraiment le point névralgique pour organiser le même "modus vivendi" ailleurs. Il est plus à catégoriser dans un problème de "mœurs bien ancrés" qui préfère laisser les immeubles vides en attente de rénovations urgentes..

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Plus troublant, encore, les grandes villes sont la proie des promoteurs qui veulent rentabiliser au mieux les mètres carrés disponibles. Pour réaliser ce rêve, les habitations passent au second plan pour laisser le champ libre à des immeubles de bureaux. Bruxelles n'est pas exempt de cette "manie" qui laissent souvent ces beaux bureaux vides pendant des mois. Il n'est pas moins vrai que même si cela n'était pas le cas, il faut penser que les occupants diurnes de ces beaux bureaux auront besoin de rentrer dans leur pénates le soir venu et cela dans le minimum de temps.

Le 18 août 2006, l'Echo osait parler de mue des bureaux bruxellois qui se seraient transformés en logements à Bruxelles. Les permis nécessaires pour le réaliser ont permis d'entrevoir une ouverture de ce côté. Mais l'accroissement des surfaces de bureaux n'en demeure pas moins prépondérant. La mode "loft" reste encore marginale. Elle reste à la portée des plus nantis. Donc, c'est plus facile à dire qu'à faire.

"Il est venu le temps des cathédrales".

Dans le même temps, en Wallonie, 42.000 logements sociaux sont espérés. Le logement public ne fait pas le poids face au logement privé. 27% des loyers sociaux sont impayés. En moyenne, 188 euros comme prix moyen pour le loyer mensuel de ces logement sociaux. Qui dit "social" implique des réductions drastiques dans les prix de la construction entraînant par là même des frais de fonctionnement plus importants par la suite. Tout ces points expliquent peut-être cela.

Le logement social peut aussi signifier "propriété privée" pour les revenus modestes. Cela resterait concurrentiel par rapport aux loyers généralement déboursés pour des logements similaires à trois chambres. S'adapter pour les entrepreneurs est donc devenu une priorité par des critères d'économie bien pensés.


Fait divers tragique à Bruxelles. Le 30 novembre 2006: un homme apparemment sur le point d'être expulsé par huissier de chez lui, s'est retranché dans sa maison et menace de la faire sauter. Dénommé comme forcené dans l'annonce, a-t-il raison ? Est-ce sa faute d'arriver à cette extrémité et de penser qu'être jeté sur la rue par la société après probablement avoir été rejeté par elle ? Le social sera toujours en contradiction avec le pouvoir de l'argent. La raison vacille toujours quand la raison de vivre n'y est plus!

Les Néerlandais sont logés à la même enseigne avec, parait-il, l'équivalent de 1200 terrains de football réservés à une surface de bureaux inoccupées. Chez eux, toutes ventes, toutes locations transitent par l'intermédiaire d'agences.

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En France, encore, vu la rareté des logements sociaux, les "Enfants de Don Quichote" ont lancé un pavé dans la marre: de petites tentes de camping se sont érigées à Paris le long de la Seine. Au vu de ces représailles, le gouvernement a pris des dispositions dans l'urgence. Comme cadeau de nouvelle année 2007, Jacques Chirac avait lancé l'idée des "logements opposables". Ce droit au logement opposable devrait forcer les maires à faire construire plus de logements sociaux. Il y a, cette fois, une obligation de résultat. 800.000 personnes sont comptées comme réellement sans abris en situation précaire. Il ne sera pas gratuit pour les bénéficiaires, mais plus accessible aux démunis de la vie. La Constitution devrait contenir manifestement une garantie de logement pour tous. Est-ce de la poudre aux yeux? Logement opposable ou imposable? Comme partout, la spirale des prix a mené ceux-ci vers des sommets. Réquisitionner des logements vides d'occupation a été souvent proposé. Les propriétaires se plaignent d'avoir des loyers impayés. Une assurance obligatoire pourrait-elle donner une solution?

A l'opposé, l'idée de rendre tout le monde propriétaire est un leurre. C'est ce que préconise Nicolas Sarkosy. Comment donner, comme il l'espère du travail à tous, par la flexibilité et la mobilité, et espérer stabiliser les travailleurs sur dans un espace vital aussi restreint qu'un bien en propriété familial? Vite la voiture pour effacer les distances, peut-être?

Travailler uniquement dans l'urgence pour loger les plus démunis coûte bien plus cher que de planifier des constructions nouvelles.

L'immobilier est devenu le piège pour les candidats à la présidence française toute proche (l'Echo du 10 mars 2007). L'imagination tout azimut pour s'attirer la bienveillance des électeurs. Les sans-abris, les prêts à taux zéro, toutes les clés sont sur la table encore faudra-t-il trouver les trous de serrures correspondants par la suite.

Aux États-Unis, le crédit immobilier est aussi entré en crise mais pour des raisons inverses. Les candidats à la propriété deviennent aussi de moins en moins solvables. Le goût du risque a toujours été la tarte à la crème dans ce pays. Des montages financiers ont même permis de dépasser le prêt nécessaire pour l'accession à la propriété. Cela pouvait marcher tant que les prix restaient sous contrôle et aidé par des taux d'intérêts bas. Mais cex-ci sont passés de 1% à 5,25%. 2 millions d'américains commencent à trouver le prix de leurs mètres carrés un peu chers. La Fed s'en inquiète et les marchés sont nerveux.

Une brique dans le ventre, ça se digère doucement, ça ne s'avale pas avec un entonnoir. Un rédacteur d'Agoravox reprenait le problème global: "SDF, le logement en France, un merveilleux problème". Une autre étude y a aussi été faite : "Les politiques de l'urbanisme, du logement et de l'immobilier : pour une stratégie globale, adaptée et efficace".

A y réfléchir, voilà bien une revanche du Sud sur le Nord. Le jour où il ne sera plus possible de payer ni loyer, ni appartement, ni maison et qu'il faudra se réfugier sous la tente et le sac de couchage, au moins dans le Sud, le climat s'adaptera un peu mieux et les claquements de dents feront là-bas un peu moins de bruit.

Droit au logement, qu'ils disaient...


L'enfoiré,

 

Le même sujet en pleine discussion sous le toit d'Agoravox 

 

Citations:

 

 

 

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