Un arbre, des bégonias et des jeux (24/08/2014)

0.jpg... pour paraphraser la locution latine "Panem et circenses"? Non. Trois événements à rassembler en deux weekends à Bruxelles, pourtant. Un arbre planté appelé Meyboom, un tapis de bégonias et un festival de jeux.

Chaque année, le 9 août, issue de légendes médiévales, la plantation de l'arbre de mai (ou arbre de joie) est un événement populaire et typique. Une tradition folklorique, suite à une légende assez cocasse: en 1213, dans le lieu-dit "Marais aux Cygnes", lors d'une noce, des Bruxellois étaient venus ripailler et déguster de la lambic à bon compte hors des murs de la ville pour éviter la taxe communale. On ne sait pourquoi, leurs éternels rivaux, les Louvanistes, vinrent chercher querelle et furent repoussés.

En 1308, Jean III de Brabant récompensa cet exploit par une fête qui, fusionnée avec les Serments des Arbalétriers, poussait à protéger la ville de Bruxelles des agressions par des villes voisines.  

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Depuis, chaque année, un arbre est planté par les Bûûmdroegers ("Porteurs d'arbre"). 

Pourquoi un arbre? Un esprit écolo avant l'heure? L'histoire ne le dit pas. 

Ce 9 août, c'était un samedi matin. Beau temps. Manneken Pis, déjà vêtu pour l'occasion. Arrivé, devant le café du Meyboom, personne encore au départ de la procession. Tout était calme. Retour vers mes pénates. Je les ai retrouvés dans un estaminet de Schaerbeek, pendant qu'en principe selon la tradition, à l'extérieur les Gardvils, gardaient le hêtre sélectionné dans la forêt de Soignes quelques jours plus tôt.

Freddy Thielemans, l'ancien bourgmestre de Bruxelles, passablement éméché, un verre dans une main, a serré dans l'autre, la main de votre serviteur qui n'en demandait pas tant. Puis, il a fallu partir. Obligation de planter l'arbre avant 17 heures pour éviter la malédiction qui s’abattrait sur la ville.

Un scénario, presque digne d'un film comique d’épouvante? 

Des bus pour ramener la troupe à la rue du Marais pour chercher du renfort auprès des Compagnons de Saint-Laurent. Retour à la Grand-Place. Ouf, les géants Bompa et Boma sont là, portés par les Poepedroegers. Sauvés, l'arbre a été planté dans les temps..  

Porter un arbre reste un sport d'après ce qu'en disait le petit bourgmestre (et maire) nouveau.

Il était dit que Bruxelles ne pouvait pas se planter dans sa 706ème édition.

Au fait, que sont devenus les 705 autres arbres? Une nouvelle forêt bruxelloise?

Personne ne me l'a dit. Dommage que les voitures ne se plantent pas et ne restent pas immobiles. 

« L’arbre cache la forêt.  » dit un proverbe français


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Composition florale de bégonias

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Tous les deux ans, elle recouvre le temps d'un weekend, la Grand Place de Bruxelles.

Le weekend du 15 août, lui, a été désigné avec le spectacle d'un son et lumière, d'un feu d'artifice, d'un concert de jazz et présentations folkloriques. Ce fut la veille, l'inauguration. 

Pourquoi le 15 août? Parce qu'on a congé.

Pourquoi a-t-on congé ce jour-là?

Il peut y avoir tellement de raisons comme l'écrivait Marcel Sel.1.jpg

Les bégonias constituent l'essentiel des fleurs choisies pour la diversité des couleurs et leur résistance. Plus de 900 espèces cultivée dans la région de Gand depuis 1860. 

Découvertes au 17ème siècle dans les Antilles, la Belgique en est devenue la première productrice mondiale. En 1706, le botaniste français Charles Plumier donna le nom en hommage au gouverneur de Saint-Domingue.  

Tout avait commencé en 1971, à la Grand-Place, lorsque séduits par les tapis de fleurs d'Oudenaerde, des échevins de la ville décidèrent de reproduire l'idée à Bruxelles.

Il faut dire que la Grand-Place avait, avant, pris des airs de plus "grand parking à ciel ouvert de la ville", ce qui était, il faut bien le dire, tout à fait anachronique dans le décor baroque de la place. 

Jusqu'en 1986, l'organisation de cet événement resta irrégulière, puis on passa au rythme de biannuaire.

L'association "Tapis de Fleurs de Bruxelles" naquit en collaboration avec la ville, le Brabant et les commerçants "Francs-Bourgeois" pour réaliser une tapisserie de fleurs.

Un tapis dont le thème choisi reste un secret jusqu'au dernier jour. 

Un véritable travail artisanal exécuté par des bénévoles et des architectes paysagistes pour ce tapis de 75 mètres sur 24, constituée en une après-midi et inauguré le soir.

Trois cent fleurs au mètre carré, environ 750.000 bégonias.

Cette 19e édition célèbre les 50 ans de l’immigration turco-marocaine par l’édification d’un tapis de Turquie, d'Anatolie, au 16ème siècle. Manneken Pis avait encore sa valise en carton.

Une homogénéité dans l'orange, le rouge et le brun, qui avait nécessité certaines nuances supplémentaires sur 250 m2 de dahlias, d'écorces d’arbre pour le brun et d’herbe pour le vert.

Ce matin du 15 août, une drache naissante en jogging vers la Grand Place. 

Malgré la pluie, la foule était à l'arrivée. Beaucoup de touristes qui devaient remonter dans leur car après la vision du tapis, mais pas seulement.

Les thèmes des années précédentes:

« Le géranium, le zinnia, le bégonia distillaient en l'air le plus plat les arômes de la Champagne.  », disait Jean Gireaudoux 


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Puis, ce fut le Games Festival.

0.jpgLe 17 août, même scénario dans le déplacement, mais avec un vent qui faisait voler les idées. Pas de Manneken Pis avec un jeu à ses pieds.

Perso, je ne suis pas un grand amateur de jeux.

Le jeu d'échec est considéré comme le maître jeu.

0.pngUn seul défaut, s'il fallait en trouver un, se le représenter à l'image de la société d'aujourd'hui: ses seules 64 cases, son nombre limité de pièces pour représenter le champ d'investigation, ses règles peut-être trop simples et trop immuables... avec la lenteur "stratégique" en plus qui fait cogiter les neurones dans leur bocal crânien.

Ce jeu a une histoire longue qui remonte à la nuit des temps.

Pourquoi ne pas la rendre plus en rapport avec les situations de l'actualité qui se complexifie à la vitesse grand V rendant les décisions de l'homme moderne en grand W?  

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J'avais entendu qu'une version 2.0 était présentée dans ce Festival des Jeux.

A l'arrivée sur place, des joueurs sur la rue, le plus souvent face à des sortes de jeux de l'oie, sophistiqués ou non.

Le stand de ce joueur d'échec 2.0 qu'on annonçait "scénarisable" était dans la galerie. 

Un brin de causette avec le présentateur et en effet, plus de pièces et un champ d'actions plus étendus en faisait partie. 

Rien n'était encore installé. Je ne pourrai donc pas donner mon avis sur le jeu. 

Pourtant, j'ai eu l'explication sur ce qu'il pouvait représenter de renouveau et cela semblait répondre à mes souhaits. 

Une version 2015 était déjà prête. Une espèce de Wargame échiquéen qui aurait pour cadre l'anniversaire de la bataille de Waterloo.

Des experts de ce jeu dans sa version 1.0 pourront l'apprécier ou le dénier. 

Puis, m'est arrivé cet article, concernant la version 1.0, d'un joueur d'échec amateur du Guardian qui se demandait si c'était un sport de l'extrême?

Deux morts dans une compétition d'échecs à Tromsø. Il donnait comme conclusion « Nous avons tous besoin d’être en meilleur forme pour participer à ce jeu exigeant. La société doit reconnaître qu’il s’agit d’un sport qui exige des joueurs autant de tension dramatique, d'excitation et d'efforts que tous les autres sports. Une fois que ce fait sera admis, les deux joueurs, victimes d'échecs, ne sont pas morts pour rien ».

Bien. Mais, là, cela pourrait vraiment craindre avec cette nouvelle version 2.0.  

0.jpgTant que le jeu de société permet de ne pas voir le temps passer, bon ou mauvais, on se trouve dans l'acceptable avec à la base, une volonté de gagner par le Mat et l'acceptation de perdre implicite.

Si aux échecs, la sortie en Pat permet de garder l'honneur sauf, dans la vie, le Pat devrait peut-être mieux accepté. 

« Celui qui se libère, loin d'être incapable de jouer le jeu, le joue encore mieux car il voit la vie comme un jeu.  » disait Allan Watts

Bientôt l'automne et l'hiver, le moment de ressortir les jeux des tiroirs.

"La température définit votre prix d'entrée" disait les affiches de la pub dont je ne citerai pas le dépositaire ludique.

Cette fois-là, ce sera sans prix d'entrée à payer.



... 

 Réflexions du Miroir

La question était "Qu'est-ce qui réunit ces trois événements?".

Je dirais la tradition.

« La tradition, c'est la somme des valeurs vieillies.  » me contredirait Kazimierz Brandys.

Non, c'est plutôt tout l'art de l'inventivité à ajouter à la tradition.

Aujourd'hui, si ce n'est plus vraiment du pain et des jeux, le fait de boire et de manger ne peut jamais être dissociés de la tradition, d'un arbre, des fleurs et des jeux... 

Mais il faut savoir comment les présenter... 

 

 Les photos de tout cela, en un clic 

 

L'enfoiré,

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