Une femme entre Yolanda et Dalida (04/02/2017)
Nous sommes 30 ans après la disparition de Dalida.
Je n'ai pas l'habitude d'écrire des articles sur des peoples, mais tentons le coup.
La biographie officielle de Dalida serait "Mon frère, tu écriras mes mémoires" de Catherine Rihoit.
Le livre "Dalida, une vie brûlée" de Bernard Pasuito rouvre le bal avec le nouveau film "Dalida".
Un téléfilm diffusé en 2005 l'avait précédé.
La vie de Dalida est un roman qui mériterait une étude psychologique tellement sa vie a eu de rebondissements.
Sous le nom de Yolanda de son enfance, elle avait été un souffre-douleur à cause de son strabisme. Sous le nom de Dalida, elle rechercha une sorte de revanche. Droguée par la scène, droguée de l'amour dans un désir d'absolu, elle est restée incomprise par ses amants.
Sa vie est une fiction décorée de fausses paillettes qui cachait une fragilité fleur bleue sans résister aux troubles inhérents à toutes vies en couples. Ses chansons sont souvent calquées sur sa vie.
Ses 170 millions d'albums vendus sont loin et ne changent rien.
Alors, légende, icône ou mythe?
Vouloir rester Yolanda Gigliotti dans une vie normale et en même temps Dalida, c'est faire le grand écart dont elle n'a jamais compris les risques.
Yolanda a été une petite fille aux grosses lunettes à cause d'une maladie oculaire causée par une infection aux yeux qui lui a fait attraper un strabisme convergent.
Cette situation pousse ses parents à la faire opérer plusieurs fois.
La petite fille est repoussée par ses condisciples. Ce qui la rend aigrie a vouloir se venger de cet état.
Cet état en fait une petite fille plus choyée auprès du père, le Peppina qui meurt en 1945 à sa douzième année et qu'elle admirait. La Giuseppina, la mère ne fait rien pour la contredire, pour lui faire la leçon des risques d'un futur de paillettes, alors qu'elle s'y voyait déjà...
Toute la famille Gigliotti baigne dans la musique.
La musique classique hante la maison Gigliotti avec le père premier violon à l'Opéra du Caire avant qu'il décède trop tôt pour Yolanda.
Le téléfilm racontait bien son enfance son envie de brûler sur les planches malgré les réticences de ses parents
Adolescente, elle devient coquette et passe des heures devant son miroir pour aiguiser ses armes de séduction.
"Gentille mais difficile à contrôler", disent ses enseignantes.
Aux jeunes garçons qui lui font la cour, elle répond "Tu t'imagines que tu vas épouser Dalida ?".
Un premier flirt avec le jeune Carlo aux lourdes lunettes comme elle, tourne court.
Ensuite, un premier amour avec Armando se termine par un chagrin d'amour. Il s'est enfui alors qu'il lui avait promet de lui écrire.
En 1954, au Caire, elle s'inscrit au concours de Miss Égypte et le gagne.
Elle quitte l’Égypte et gagne un contrat avec le découvreur de talents, Eddie Barclay, pour la chanson "Bambino" pour lequel elle reçoit le premier disque d'or.
En 1956, Lucien Morisse, directeur des programmes sur Europe1, la propulse au zénith avec cette chanson à contre-courant alors que l'on se trouve en pleine période du "yé-yé" avec la révolution culturelle du rock et du twist.
Dans le privé, elle commence une vie de mangeuse d'hommes souvent déjà en couple. Elle réussit à éliminer sa rivale et le mariage Morisse-Dalida est scellé.
Lui est pragmatique et cartésien. Il désire une vie rangée à l'abri des lumières.
Sans ces lumières, elle étouffe et s’ennuie en manque de monde autour d'elle.
Elle le quitte dès qu'un bellâtre d'une faune d'artistes se présente.
Elle a perdu peut-être sa naïveté de jeune fille, tout en gardant une naïveté de femme.
Elle a acheté une villa de style 1900, rue d'Orchampt à Montmartre dans laquelle, la nuit, elle attire une jungle d'artistes.
Elle y joue à la couguar avec Lucio qui a douze ans de moins alors qu'elle en a 34.
L'arrivée d'un bébé et c'est la panique. Elle se fait avorter pour ne pas lui imposer cette charge qu'elle sent absente chez son jeune amant.
Son avortement mène à la stérilité et aux remords pour le reste de sa vie.
Sa compensation, c'est sous les lumières de la scène où elle triomphe avec ses chansons, les paillettes et les boys qui dansent autour d'elle. Elle a réussi son rôle de vamp qui l'a toujours fait rêver.
Dans le privé, le peintre Jean Sobiesky prend un ticket pendant quelques temps.
Puis, le philosophe mystique bouddhiste, Arnaud Desjardin partage sa vie, mais, lui aussi doit rentrer chez sa femme, le soir.
Il lui reste alors le livre de cet amant philosophe "Les chemins de la sagesse" qu'elle dévore comme un livre de chevet de références introspectives.
Richard Stillwell fait une entrée furtive dans sa liste de ses conquêtes.
Puis c'est le bellâtre, Louigi Tenco qu'elle veut lancer sur les chemins de la gloire mais qui échoue lamentablement.
Elle le retrouve suicidé sur un lit, alors qu’ils se trouvaient à San Remo pour participer au festival de la chanson italienne.
Le mysticisme du ratage entre progressivement dans sa conscience dans un voile de mystères.
Heureusement, en coulisses, la protection salutaire de son frère Orlando continue à s'exercer comme manager de sa sœur.
L’ascension sur une marche d'une hiérarchie impossible se poursuit par une relation mystérieuse avec François Mitterrand qu'elle traduit dans sa chanson "Gigi l'amoroso" plutôt que "Mimi l'amoroso" qui lui donne le surnom de "Panthère rose". ...
En 1970, le suicide de Lucien Morisse la jette dans un grand émoi.
En 1972, elle épouse le playboy, faux comte de Saint Germain, Richard Chanfray. Il est colérique, a un passé chargé.
Il vit aux crochets de son égérie jusqu'en 1983 et finit par être chassé, quand il lui dit "qu'il a toutes les femmes qu'il désire".
Ce qui n'empêche pas son playboy de se suicider à son tour plus tard.
Comme une caricature, Dalida est en permanence à la recherche d'un monde parfait, surfait alors que sous le masque souriant, réside encore la fragilité de Yolanda.
Les années passent.
Le goût du désastre se dégage et s'installe dans son histoire avec l'idée qu'elle porte la poisse à elle-même et à tout ce qu'elle touche dans son entourage.
Karim ne fait que passer furtivement.
Le dernier est le docteur François Naudy qui ne parvient pas à calmer la déception d'une vie plus haute que ses rêves.
A la cinquantaine, s'ajoute une ménopause naissante.
Les souvenirs de l'âge de ses 18 ans où tout était toujours possible, s'éteignent.
Payer pour obtenir de la tendresse devient une solution de misère pour une femme qui a eu tout ce qu'elle a imaginé.
Elle devient même une icône pour la communauté gay.
Le sentiment de solitude même avec une famille attentionnée et des amours passionnées, n'empêche pas la mélancolie, la détresse dans des douleurs secrètes à espérer mourir devant le public seul fidèle.
"Le public est mon amant et mari" écrit-elle.
Cela fait un peu trop de monde sur l'oreiller alors qu'elle cherche toujours un amant ou un mari qui soit une copie conforme à ses souvenirs.
Or, le public s'en fout de la vie privée de l'artiste préférée qu'il va voir se produire pendant l'espace d'un soir malgré les échos dans les journaux people à sensations.
Mais, ce ne sera pas sous les feux de la rampe, ce sera à l'ombre de sa villa qu'elle met fin à ses jours.
Un Paris Match récent titre "Luigi, l'enfant que Dalida a tant aimé"
Elle avait en effet, retourné son amour maternel sur son neveu, le fils de son frère ainé.
L'interview d'Orlando explique Dalida et Yolanda
Aujourd'hui, vient donc le film sensé raconter la vie de Yolanda alias Dalida.
Le film est dit larmoyant comme l’a été la vie de la chanteuse,
L'interprétation de Dalida touche par sa sincérité et rend le film par moment caricatural. Il paraît parfois en faire trop. Trop ?
Trop d'images de la vie extrême qu’a eue la chanteuse.
Trop peu dans l'évolution psychologique de Dalida.
Bruno Gigliotti alias Orlando reste le légitime légataire universel de l'héritage de Dalida.
Il connait la musique. Il s'est aussi produit dans un petit orchestre et s'est fait connaître avec la chanson "Ya Mustapha".
Fidèle aux souvenirs de sa sœur, Orlando a voulu la faire renaitre en soutenant l'initiative du film, avec les souvenirs appuyés par les fantasmes de ses anciens fans.
"Une fêlure a rendu ma sœur vulnérable", dit-il.
Mais quelle fêlure ? Est-ce que tout le monde qui a une fêlure dans une vie, passe au suicide pour la restaurer ?
Le cœur a ses raisons que la raison ne connait pas.
Un frère ne dort pas avec sa sœur.
Les confidences de sa sœur sur l'oreiller avec ses amants, il n'a pas connu.
Yolanda a vu dans la chanson de variétés comme tremplin vers le cinéma.
Du cinéma, elle en a fait dans un film dramatique égyptien réalisé par Youssef Chahine, sorti en 1986: "Le Sixième Jour".
Le scénario lui ressemble dans sa quête : "Saddika, la belle lavandière cairote, vit avec un mari paralysé et un petit-fils. Le choléra a gagné le village et la ville. L'instituteur affirme qu'il reviendra le sixième jour, car : « le sixième jour, ou on meurt, ou on ressuscite… » Insatisfaite de son ménage mais résignée, elle espère encore secrètement le prince charmant. Une nouvelle connaissance révèlera la femme derrière la mère courage.".
Qui s'en souvient encore ? Est-ce que cela valait le coup ?
Un palmarès de 500.000 exemplaires vendus, de 120.000 albums et de 40 millions de disques vendu après sa mort ont peut-être suivi le même chemin de l'oubli à part sur Radio Nostalgie?
Ce nouveau film parviendra-t-il à faire revivre le culte de la diva "Dalida" ?
Souvent, l'envie de suicide se ressent dans son entourage avant l'acte puisque son candidat au suicide y recherche un soutien et une aide.
Les indices de sa déchéance et de sa détresse étaient visibles et audibles dans le choix de ses chansons.
La honte de perdre, de n'avoir pas réussi sa vie se cache derrière tous les suicides réussis mais laisse l'entourage pantois de surprise et d'incompréhension.
Dans le passé, Dalida a eu une première tentative ratée.
"Téléphone Moi" si tu peux
Lors de son dernier Noël, "Reviens-moi" pour changer cette éternelle série d'échecs
Sa dernière apparition en public lors de la 12ème cérémonie des César exprime un regret qu'un autre film n'a pas reçu de César qu'il méritait. C'est peut-être à elle qu'elle pensait pour elle-même
Yolanda voulait atteindre les étoiles mais n'avait pas la force de s'y maintenir.
Le "vol d'Icare" fait femme.
D'après les échos, le nouveau film "Dalida" n'a, semble-t-il réussi qu'à moitié son travail de mémoire.
L'intimisme dans ce film ne faisait ressortir que superficiellement les raisons de son acte.
Quand on monte dans les hautes sphères de la hiérarchie, l'air de la célébrité devient toujours un peu absent ou vicié.
Dans un HS de "France dimanche", Dalida fait partie des destins brisés, associée à Carlos, Pierre Beregovoiy, Celine Dion, Linda de Suza.
Pas de relations avec ces autres personnalités du showbiz.
Question âge, Dalida s'associe mieux avec Brigitte Bardot dont l'âge ne diffère avec elle que d'un an.
Les hommes ont aussi occupé les nuits de la jeunesse de Brigitte aujourd'hui âgée de 82 ans.
Contrairement à Dalida, Brigitte s'est réfugiée à la Madrague en s'entourant d'animaux pour retrouver la paix du cœur et la fidélité des sentiments.
Trop de paillettes, trop de rêves, pas assez de fond de soutien, pas assez de projets plus lointains pour ses rêves de vieille dame.
Son frère cadet ne voyait en elle qu'un des aspects de sa personnalité.
La mémoire des hommes et des femmes célèbres s'oublient vite sans réouvertures d'un bal de maudits qu'il a voulu réaliser en représentant sa sœur sous les traits d'un ancien mannequin italien qui a fait ses classes à New York en mixant la vraie et la fausse Dalida.
A-t-elle été belle ?
La beauté est un concept très suggestif à prendre en considération au levé du lit sans fard et sans décorum.
Retour au 3 mai 1987.
Dalida dans un déshabillé de soie, avale des pilules de toutes les couleurs.
Elle écrit "La vie m'est insupportable. Pardonnez-moi".
Son frère, Orlando qui voit en elle une idole, n'aurait pas pu la sauver de son mal de vivre.
Il n'a fait que suivre l'ombre d'elle-même dans les lumières.
Depuis, c'est à titre posthume qu'il fait connaitre les affres de cette chanteuse qui a eu le succès que beaucoup de chanteurs d'aujourd'hui voudrait avoir.
En faire, un biopic ou interpréter une vie est toujours difficile quand celui ou celle n'est plus là pour le contester et que la plupart des acteurs de son entourage ont également disparu.
La jeune Sveva Alviti ne pouvait retransmettre l'état d'esprit d'une femme qui murissait difficilement ses cinquante ans.
Mais elle a su exprimer la chanson
qui résume sa fin dans "Je suis malade"
Briser la coquille de l'esprit se fait sur l'oreiller ou sur le divan du psy, ni devant le public ni même un frère.
Je pensais terminer sur une note sans humour avec l'histoire de Dalida.
C'est alors que jeudi, Laurence Bibot avait un Café serré sur un bébé "ligre". Un bébé qui est le croisement entre un lion et une tigresse :
Si vous ne voyez pas de relation avec le reste de ce billet, relisez-le...
Eriofne,
Citations:
- “L’amour est un genre de suicide.”, Jacques Lacan
- “La résignation est un suicide quotidien.”, Honoré de Balzac
- “Le suicide n'est pas un acte. On est saisi par le suicide comme par un vertige, on subit le suicide.”, Jean-Guy Rens
26/1/2017: Mike Connors célèbre pour son rôle de détective privé dans la série Mannix (de 1967 à 1975) est décédé d'une leucémie à 91 ans. D'origine arménienne, Kregor Ohanian était le cousin de Charles Aznavour
Commentaires
La pièce de théâtre "Pleins feux" de Mary Orr était présenté sur France2
Fin des années 50, Alice Margaux est une star incontestée des comédies de boulevard...
Au sommet de son succès, Alice Margaux, monstre sacré des comédies de boulevard, a tout sacrifié pour sa carrière et ne compte pas s'arrêter là.
Extravagante, sincère et explosive, elle mène son jeu à la vie comme à la scène, jusqu'au jour où l'arrivée d'une parfaite inconnue fera basculer le cours des choses.
http://www.billetreduc.com/175574/evt.htm
Aucune relation avec l'histoire de Dalida?
Pas du tout. Elle a su se rendre compte qu'un jour, il faut céder la place à plus jeune.
Écrit par : L'enfoiré | 08/02/2017
12 mai
France3 présente "Dalida, la discographie"
Écrit par : L'enfoiré | 06/05/2017
Dalida et Orlando, les âmes sœurs
Si Dalida est restée au sommet tout au long de sa prolifique carrière, c'est aussi grâce à son frère, qui fut son protecteur et producteur. Avec le témoignage d'Orlando lui-même, ce documentaire raconte leur histoire, entre amour infini, succès et tragédies.
En un peu plus de trois décennies, Dalida a vendu 140 millions d'albums à travers le monde. Derrière ce succès spectaculaire se cache un homme qui lui a consacré toute sa vie : son frère Orlando, de trois ans son cadet. Nés Iolanda et Bruno Gigliotti, ils grandissent avec leur frère aîné au sein de la communauté italienne du Caire. Devenue reine de beauté à 17 ans, la jeune femme fait quelques apparitions à l'écran avant de s'envoler pour Paris fin 1954. Lors d'une audition à l'Olympia, elle est repérée par le producteur Eddie Barclay et le directeur d'Europe n° 1 Lucien Morisse, son futur mari, qui matraque ses chansons sur la station et la propulse à l'international... Bruno, qui a tenté de marcher dans les pas de Dalida sous le pseudonyme d'Orlando, renonce bientôt à la scène pour devenir son directeur artistique, association qui les conduit à créer leur propre label. Forte de cette indépendance artistique et grâce au flair de son frère, Dalida s'est alors essayée à tous les styles, du raï au disco, enchaînant les tubes année après année... Mais ce triomphe est obscurci par des drames - la découverte de sa stérilité, puis les suicides successifs des hommes qui ont partagé sa vie.
Deuil impossible
"Tu ne mourras jamais", promit Orlando à Dalida alors qu'elle venait à son tour d'attenter à ses jours, le 3 mai 1987. Entre biopics, remixes et expositions, le fringant octogénaire déploie toujours toute son énergie pour faire vivre l'héritage de sa soeur adorée. Mêlés à de riches archives et aux témoignages d'amis et de collaborateurs (l'ex-PDG d'Universal Pascal Nègre, Amanda Lear, l'ancien maire de Paris Bertrand Delanoë...), ses souvenirs recomposent la trajectoire de la chanteuse, entre joies et tragédies, et éclairent la relation fusionnelle qu'il continue d'entretenir avec celle dont il dit qu'elle aurait pu être sa jumelle.
https://www.arte.tv/fr/videos/111047-000-A/dalida-et-orlando-les-ames-soeurs/
Écrit par : Allusion | 04/08/2023