Y'a d'la joie (19/02/2021)
"Je chante du soir au matin"... Rien que l'association de ces paroles de chansons et on sait de qui on va parler : Charles Trenet.
Aujourd'hui, il y a exactement 20 ans que le "Fou Chantant" nous a quitté.
Plus question de dispute et de rivalité entre des chanteurs comme il était question dans "Cheveux longs et idées plus ou moins courtes", sinon une certaine complicité parallèle avec Maurice Chevalier qui, dans la manière de chanter, l'avait précédé.
L'amour et la nature, Trenet les chantent avec fougue et passion.
Dans la série "Le temps d'une histoire", le film "Charles Trenet l'enchanteur" est passé vendredi dernier sur une de nos antennes belges dans le cadre de la fête des amoureux.
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L'histoire de sa vie en abrégé
Auteur, compositeur, interprète français, Charles Trenet est né Louis Charles Augustin Georges Trenet le à Narbonne (Aude) et mort le à Créteil (Val-de-Marne), à l'âge de 87 ans.
Surnommé « le Fou Chantant », il est l'auteur de près de mille chansons à l'inspiration souvent poétique, dont les plus célèbres "La Mer", "Y'a d'la joie", "L'Âme des poètes", "Ménilmontant" ou "Douce France" demeurent des succès populaires intemporels, au-delà même de la francophonie.
Né dans une famille bourgeoise de province le 18 mai 1913 grâce à son grand-père maternel Auguste, marchand de bois qui s'est opportunément reconverti en tonnelier et fournit en vin les soldats en guerre.
En 1920, ses parents divorcent. Sa jeunesse et sa sensibilité à la musique se construisent entre Narbonne où réside sa mère qui joue au piano et Saint-Chinian où habite son père, notaire et violoniste amateur qui a découvert ses rythmes grâce aux soldats américains pendant la guerre.
Placé avec son frère en pension dans le collège "Pères de la Trinité" de Béziers, il vit très mal l'absence avec sa mère. Se sentant une attirance homosexuelle, sa mère va devenir pendant sa vie entière, une sorte d'"épouse par procuration".
Sa poésie se découvre dans un bonheur en "sportif de la joie" d'après son expression.
Les paroles de ses chansons, frappent par leur simplicité en respirant la fraicheur nécessaire dans l'air du temps.
Il découvre le théâtre, la poésie, le sens du canular et publie des poèmes sous le pseudonyme de « Charles » ou « Jacques Blondeau » dans une période joyeuse en complicité intellectuelle avec Bausil qui l'initie aux jeux de mots mais aussi probablement aux jeux sexuels.
Dans une école d'art, il rencontre des célébrités allemandes, amies de son beau-père, se destine à la peinture et prépare un roman pendant qu'il travaille comme accessoiriste dans les studios de cinéma Pathé, Il forme le duo « Charles et Johnny » avec son ami le pianiste suisse Johnny Hess. .
Ses chansons les plus célèbres, "Y'a d'la joie", "Je chante", sont d'abord confiées à d'autres interprètes comme Maurice Chevalier.
Dans la foulée, il tourne en vedette dans les films "La Route enchantée" et "Je chante".
Maurice Chevalier, arborant son canotier, forçant volontairement son accent français et une tournée d'adieux en 1968, avait des chansons de la même veine comme "Dans la vie faut pas s'en faire". Pourtant, malgré cette chanson, parce qu'il ne supporte pas l'ennui et le manque du public, il décède en 1972 suite à des complications à une tentative de suicide.
Pour se distinguer du chapeau de paille de Maurice Chevalier et n'aimant pas son visage poupin, Trenet se crêpe les cheveux avec un chapeau de feutre mou rabattu en arrière vissé sur la tête, s'habille avec un complet veston bleu et plante un œillet rouge à sa boutonnière.
Mobilisé lors de la Seconde Guerre mondiale, il déclare. « C'est la troisième fois qu'on me tue. Je n'arrive pas à comprendre les raisons pour lesquelles on veut me trucider par persuasion ».
Pendant l'Occupation, il joue dans six films, chante à Paris aux Folies Bergère, où il interprète des chansons comme "Espoir". « Tous les jours noirs ont leurs lendemains » et Douce France, dans un hymne de la résistance tout en apportant un soutien moral aux « expatriés de force ». Cela ne manque pas d'être interprété comme un acte de collaboration. Dénoncé pour sa ressemblance avec « le juif Harpo Marx » et à l'anagramme de Netter, il fuit la Gestapo. Blessé, il retourne chez sa mère pour trouver les papiers qui prouvent sa « non-judéité » sur quatre générations.
A la Libération, il part en Amérique, mais cette sombre période qu'il vient de vivre, a tari son inspiration. Ses œuvres postérieures à la guerre n'ont plus la fraîcheur et l'insouciance de ses premiers refrains.
En tournées au Québec, à New York, il connaît un assez grand succès en parcourant pendant près de deux ans le continent américain, le Brésil et le Canada. Jusqu'en 1954, il parcourt ainsi le monde de concert en concert, sans s'arrêter d'écrire et de composer.
De retour à Paris, en concurrence avec la vague du yéyé, il se fait plus rare sur scène et se consacre à la peinture et l'écriture.
Dès 1971 il entame des tournées d'adieux. Affecté par la mort de sa mère, il s'enferme dans le silence et retourne dans sa propriété du sud de la France.
En 1983, retour à la scène, toujours indémodable et inépuisable.
En novembre 1999, son dernier concert a lieu à la salle Pleyel, où il donne trois récitals, chantant, cette fois, assis.
Fatigué, il se retire chez lui, où deux accidents cardio-vasculaires successifs l'épuisent. Transporté à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil, il meurt le 19 février 2001, à l'âge de quatre-vingt-sept ans.
Par son testament, il a légué la totalité de son patrimoine à Georges El Assidi, qui fut son secrétaire particulier pendant près de vingt ans. La presse ne manque pas de titrer leur article "Y'a d'la joie pour l'héritier". Parce que El Assidi aurait dilapidé l'héritage et pour « abus de faiblesse, extorsion, violence et homicide volontaires », le testament est contesté. On ne badine pas avec la joie. Treize ans après la mort de Trénet, l'affaire aboutit d'abord à un non-lieu. Puis en appel, la cour d'appel rejette définitivement la demande d'annulation du testament le 6 mars 2013.
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Au présent, on pressent...
Charles Trenet n'a, évidemment, pas connu l'attentat du 11 septembre 2001, ni les guerres qui ont suivi, ni la crise de bancaire et financière de 2008.
Depuis vingt ans, l'évolution a fait son œuvre de destruction de joie et le pessimisme est souvent de rigueur. Que de chansons et de styles différents se sont succédés pour le confirmer.
Aujourd'hui, les chansons de Trenet enchanteraient plus par dépits.
Difficile de chanter "Y'a d'la joie" pendant cette "Covid story" comme il fallait vraiment oser chanter cette chanson pendant la seconde guerre mondiale.
Les humoristes ont souvent pris la relève avec la parodie humoristique mais enrobée d'humour noir.
L'inspiration des chansons comiques a un genre particulier mêlé à la déprime avec l'envie intime de la supprimer.
Mais laissons Trenet se présenter lui-même sans aucune chanson à l'aide du documentaire complet "Charles Trenet l'enchanteur" qui en contient tout au long en parallèle.
Maintenant, c'était hier, c'était seulement il y a un an
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Et au futur, c'est peut-être...
Un Trénet ferait probablement beaucoup de bien à notre époque.
Un(e) nouveau chanteur(se) de la trempe de Trenet, qui veut donner du bonheur au gens par des chansons éternelles, est encore à trouver.
Comme Trénet le disait, "Pour supporter la vie, Il faut faire l'apprentissage du bonheur. Il devrait y avoir des professeurs de bonheur dans une classe qui commence de bonne heure et finit très tard".
Fabian Lecastel du Cactus de mercredi répond à la question "Comment devenir célèbre?":.
Celui de vendredi chantait "Les vannes du Nord" pour les secteurs les plus impactés pour tenter de faire entendre leur désarroi
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Ce matin dans l'incontournable, j'apprenais que, le 28 janvier, l'écrivaine Chantal Thomas allait occuper le même fauteuil que Jean d'Ormesson à l'Académie française.
Un siège de membre que Charles Trenet avait refusé en 1983 probablement parce qu'il trouvait cette Assemblée vieillotte. Experte au sujet du 18ème siècle, Chantal Thomas le décrit comme un siècle de joie. Pourra-t-elle rajeunir cette assemblée restée souvent désuète et trop sérieuse?
Trenet aimait s'amuser et faire la fête.
Les fêtards doivent-ils être éradiqués?
A mon humble avis, non. Bien au contraire...
A la fin de cette semaine de carnaval mais sans carnaval, j'ai choisi de terminer ce billet par "La jolie sardane" que l'on danse à Narbonne et à Perpignan.
Allusion ,
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Le JT en parle et pose la question aux jeunes qui chante en écoutant "La mer"
23/2/2021: L'historien Xavier Mauduit parle des couples masculins sur scène qui se sont séparés .
20/1/2021: Still standing for culture
La culture dans les starting blocks
D'où la question sur les œuvres d'art
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10/11/2024: spectacle "Y a d'la joie"
Commentaires
Bonjour de Beaune
Quel bonheur d'avoir pensé à écrire ce billet joyeux sur le Fou chantant ! Il n'y a pas de génie sans un grain de folie
Écrit par : Martine Grillon | 19/02/2021
Bonjour Martine et à Beaune,
Merci. Cela me semblait une bonne idée à revenir à Trenet alors que je sors en parallèle des thérapies chez un psy.
Écrit par : Allusion | 19/02/2021
"De Trenet à Lelouch" d'après Sylvain Rakotoarison
« J’ai roulé en chantant : "Douce France, cher pays de mon enfance, bercée de tant d’insouciance, je t’ai gardée dans mon cœur". Pourquoi j’ai chanté ça ? Les chansons de mon oncle imaginaire m’ont toujours traversée comme des souvenirs qui n’existent pas. » (Violette Toussaint, 28 février 2018).
En guise d’hommage, l’histoire de sa nièce Violette Toussaint . Une histoire touchante d’amour et d’eau fraîche. gardienne de cimetière. Un nom doublement prédestiné. Son nom de jeune fille est Trenet. Violette Trenet. Violette ? Parce qu’elle aurait dû mourir, ne pas naître, ou plutôt, elle est morte née.
Elle s’appelle Violette Toussaint et elle est gardienne de cimetière.
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Violette Toussaint n’a jamais existé, si ce n’est dans l’imaginaire, pas si imaginaire que cela, de Valérie Perrin, l’auteure du roman "Changer l’eau des fleurs" décrit avec beaucoup de joie et d’espérance des personnages qui n’ont eu que des ennuis avec la vie.
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Cette Valérie Perrin, si talentueuse, depuis une quinzaine d’années, elle partage la vie du réalisateur Claude Lelouch dont elle a coécrit le scénario des derniers films
https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/de-trenet-a-lelouch-231052#forum5992302
Écrit par : Allusion | 19/02/2021
Le décès Philippe Chatel, créateur du conte musical "Emilie Jolie", un immense succès sur disque et sur scène depuis 40 ans.
La version discographique avec une constellation de vedettes comme Brassens, Robert Charlebois, Louis Chedid, Françoise Hardy, Eddy Mitchell, Henri Salvador, Sylvie Vartan etc.. Le succès est immédiat : plus d'un million d'exemplaires sont écoulés, avec le Grand prix de l'Académie du disque français à la clé.
https://www.dhnet.be/medias/musique/auteur-de-la-comedie-musicale-emilie-jolie-philippe-chatel-est-decede-602fc4559978e2610abff12f
Écrit par : Allusion | 19/02/2021
Il y a un an, le Covid-19 arrivait à Codogno en Italie
Écrit par : Allusion | 21/02/2021
Au théâtre Le public
https://www.theatrelepublic.be/y-a-d-la-joie
http://vanrinsg.hautetfort.com/media/01/02/138588603.MP3
Écrit par : Allusion | 10/11/2024