Haro sur « jobdumping.de » (27/04/2005)

1.jpgInternet ne génère pas que des choses idéales.

Dans la liste des gens inconscients et irrespectueux de l’Homme, je mettrais dans les cases de tête ce personnage à l’esprit opportuniste et franchement inhumain qui a lancé « jobdumping.de » en Allemagne.

Ce personnage, avec le plus grand cynisme, défend sans vergogne le site internet qu’il a lancé, qu’il déclare d’utilité publique mais qui fait renaître un marché de l’esclavage aboli depuis des temps révolus.

Ce faisant, il incite les demandeurs d’emploi devenus très nombreux dans ce pays à brader leurs services par un système d’enchères à la baisse.
Le prix du salaire horaire fixé très bas à la base est lancé au départ de l’enchère pour l’embauche, ensuite l’eBay des services peut démarrer: gagnera le boulot, celui qui aura accepté de travailler aux meilleures conditions pour l’employeur.
Travailler par enchères pourrait ressembler à « eBay.com », mais cette fois, il s’agit d’hommes qui sont le produit de la vente.

Analysons et comparons les procédures:
eBay, par son intermédiaire, permet aux vendeurs de marchandises de les présenter à la vente en fixant un prix attractif de base aux acheteurs intéressés.
Ces acheteurs vont se décarcasser en faisant grimper les enchères et essayer de décrocher la timbale en tentant d’obtenir le meilleur prix final.
Jobdumping par son entremise, donne aux vendeurs – travailleurs la possibilité de se présenter eux-mêmes par leur travail aux acheteurs – entrepreneurs en dégradant de plus en plus leur salaire horaire pour obtenir une embauche éventuelle.
Les acheteurs - entrepreneurs n’ont pas d’autres actions à prendre que d’attendre paisiblement la fin des enchères pour ramasser sans effort ni annonces coûteuses dans les journaux les fruits mûrs avec l’assurance de prix plancher.

Ce marché malsain et totalement vicieux s’adresse actuellement uniquement à de petits jobs temporaires sans qualification. Mais, pourquoi s’arrêterait-il en si bon chemin. Le pli est pris, il faut seulement l’étendre à d’autres emplois mieux gratifiés.
L’Allemagne n’est d’ailleurs pas une frontière à ses agissements pervers et des versions françaises et anglaises de son site sont en marche.
Inauguré en novembre 2004, ce site, usant de l’état de désarroi , de désespoir dans lequel se trouvent certains rejetés de l’économie allemande, a déjà permis de ‘recaser’ certains chômeurs déboussolés de notre marché de consommation.
En ressortiront-ils grandis et plus rassurés sur leur avenir ? Rien n’est moins sûr.
Comme garde fou, une barrière infranchissable a été fixée d’entrée de jeu de 3 Euros par heure minimum pour leurs prestations généreuses.
Évidemment, les syndicats allemands se révoltent mais se retrouvent désarmés légalement pour réagir efficacement.
Se réfugiant derrière la constatation que le prix du travail était monté trop haut en Allemagne en comparaison avec les autres pays d’Europe, ce personnage renie et oublie toutes les luttes ouvrières des siècles derniers. De son propre chef, il estime qu’il faut revoir complètement l’échelle de valeur et se moque de la presse qui n’arrête pas de lancer flèches de tout bois.
Il n’arrête d’ailleurs pas ses ravages à son seul pays et les contrats qui découlent de telles filières avilissantes sont actuellement considérés comme légaux pour cause de l’acceptation des deux parties.
Il n’en demeure pas moins que l’on oublie une fois de plus que nous avons affaire avec des Hommes de chair et de sang dont on utilise la fragilité à son propre intérêt.
En effet, ce personnage ne s’est certes pas oublié dans les transactions qui auront lieu par son entremise. Comme tout « chasseur de tête » en place honnêtement, une récompense l’attend certainement sous forme de pourcentage sur les transactions, pour son travail ardu et ainsi rétribuer son ‘ingéniosité’.
Le monde du travail subit déjà suffisamment de plein fouet les affres du sous emploi par les délocalisations, l’outsourcing, l’offshore .pour avoir à combattre cette nouvelle concurrence déloyale et indigne du genre humain.
Ne cherchons pas un rapprochement avec les bénévolats effectués par des pensionnés qui eux ne génèreront pas de revenus par essence, l’argent étant mis à l’écart d’entrée de jeu.
De cette remarque découle certainement cette limitation fatidique du minimum de 3 euros par heure: la commission pour l’entremetteur ne serait pas assurée tout simplement.
Quand on se rappelle que l’on punit de peines d’emprisonnement les passeurs d‘émigrés clandestins venant d’Afrique, n’oublierait-on pas d’en faire autant dans ce cas-ci ?
Si la forme est différente, je ne vois pas beaucoup de différences dans le fond.
Les autorités des pays où de telles pratiques sont exercées, prises de vitesse, n’ont malheureusement pas encore défini de limites à ne pas franchir et pris les dispositions qui s’imposent à cause de la nouveauté du procédé. Ce petit malin s’est immiscé dans les brèches du vide juridique.
Un nouvel article ou une adaptation aux Droits de l’Homme pourrait prendre le relais de cette manière :

« Aucun homme ne peut mettre en esclavage un autre homme pour son propre intérêt et cela même avec l’accord ou la complicité de ce dernier»

 


L'enfoiré de service

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