Du Caprice des dieux au Parc Léopold (16/12/2011)

0.jpgComment une promenade est déviée de ses objectifs et se révèle tout aussi intéressante, en définitive.

Les Eurocrates sont-ils trop payés?

C'était une Question à la Une qui valait le détour. Alors, comme une expo leur est consacrée, cela valait le déplacement pour essayer de remettre les pendules à l'heure.

De l'Europe, de sa crise, de sa disparition éventuelle, on ne fait qu'en parler sur les plateaux de télé ou ailleurs en se bousculant entre droite et gauche pour l'expliquer.

Samedi dernier, il faisait beau. Froid, mais beau.
Jogging habituel, direction le nouveau Parlamentarium de Bruxelles dans le quartier de l'Europe.

"Géniale, cette expo", m'avait-on dit. Des panneaux qui invitent à le visiter.
Entrée gratuite. Pourquoi ne pas écrire un article sur le sujet?

Une heure de visite devrait suffire.

A la réception du Parlamentarium, je demande:0.jpg

-Puis-je prendre quelques photos à l'intérieur?
-Avez-vous une carte de presse?
-Non, mais j'ai l'intention d'écrire un article sur le Parlamentarium avec quelques photos annexées.
-Si vous prenez des photos de votre famille à l'intérieur, c'est Ok, sinon, ....
-Quand je veux prendre des photos de famille, je les prends à l'extérieur, en général. Pas besoin d'autres décors. Je suis seul, si vous n'avez pas remarqué. Désolé, j'arrête ici. Merci et à bientôt.

Et je suis parti, réservant cette visite pour un avenir plus radieux, moins capricieux. Je n'aime pas les caprices, même s'ils sont des Dieux.

Nous sommes justement dans le quartier de l'Europe, dans l'environnement du bâtiment que l'on a appelé "Caprice des Dieux", en effet.

Débobinons la pelote de laine... mêlons l'histoire à l'actualité.

La publicité pour l'événement "Parlamentarium" existe, bien en vue, partout à Bruxelles. On y veut des visiteurs. Alors, pourquoi ne pas préciser, "caractériser" cette volonté et la faire connaître avec ce qu'on y fait dans ces bureaux de l'Europe?

Europe qui pourrait subir un scénario à la japonaise, si l'on n'y prend garde.

0.jpgEn sortant, il y avait bien d'autres choses à photographier.

L'Europe et l'euro, ce sont les deux pièces maîtresses dont on parle actuellement dans le monde. Alors explorons.

Le visiteur étranger de cet environnement commencerait peut-être en arrivant en sortant de la gare de Luxembourg.

Celle-ci est méconnaissable pour celui qui ne serait plus passé par ici depuis une dizaine d'années, perdue dans un ensemble plus vaste de gratte-ciel et, puis, à l'arrière, il y a le quartier du Parc Léopold qui rappelle l'histoire.0.jpg

Première constatation, pour le visiteur qui en semaine, dans les environs de ces immeubles, rencontrerait les lobbies les plus divers, des travailleurs qui déambulent, des navetteurs, quand arrive le soir et le week-end, c'est le désert qui s'installe.

Après le boulot, il y a le dodo. Et ce dodo se passe en périphérie. Bruxelles est devenu, ainsi, le parent pauvre de la Belgique. Les navetteurs bénéficient des avantages de la ville mais paient leurs impôts là où ils résident.

Le niveau de richesse de Bruxelles est le seul à avoir baissé, alors que la Wallonie est en progression et que la Flandre suit se poursuit. Les communes les plus pauvres sont, bien sûr, Saint-Josse, Molenbeek, Saint-Gilles et Schaerbeek, mais les environnements plus riches demandent aussi du répondant.

0.jpgCette semaine, le Vif-L'Express parlait de Bruxelles, de ses habitations et de ses bureaux dans un article dont le titre était "Dormir au bureau n'est plus un rêve". 

Les bureaux ne font plus recette. Les affiches telles que Jones Lang, fleurissent un peu partout.

En cause la tendance à la réduction de la surface moyenne accordé à un employé. Une surface de 11 à 25 m2 maximum.  Cela grâce à l'informatisation du travail, de l'économie potentielle des charges locatives, le travail à domicile, les business centers qui font moins de volume nécessaire pour travailler.

Aujourd'hui, à Bruxelles, il y a 1.420.000 de m2 de bureaux inoccupés que l'on cherche à réaffecter en séniories, en écoles, en hôtels et  en appartements d'habitations. 

Si 2000 habitations sont prévues et 33 projets espèrent une réalisation prochaine, il y a pénurie de logement et l'augmentation des prix résultante n'arrange rien.

C'est que la population bruxelloise augmente. Entre 2003 et 2010, la population accroissait de 10%. On attend près de 200.000 habitants de plus pour 2020. L'exode vers la périphérie devient insupportable avec ses bouchons.0.jpg

Nous ne sommes pas dans une ville chinoise, qui a construit plus de logements à appartements et qui, trop chers pour le niveau de vie, ne trouvent plus d'acquéreurs. Pas question de réhabiliter le problème des subprimes comme là-bas.

Ici, les moyens pour acheter existent, mais les terrains résidentiels deviennent particulièrement rares. Il faut démolir pour reconstruire.

Bruxelles n'a pas vocation de devenir une mégapole comme Paris. Le prix au mètre carré y reste encore abordable. Fixé en moyenne à 2500 euros en dehors des bureaux, les prix restent à mi-course de ceux pratiqués à Paris. Le seul problème qui subsiste pour la récupération des bureaux est la différence de prix entre les locaux réservés aux logements et ceux assignés aux bureaux. Un ratio reste élevé entre 1 à 10.

Si on entend parler d'élargissement de Bruxelles comme solution, cela ne résoudrait rien dans les navettes qui deviennent trop importants aux heures condensées du matin et du soir, autour de Bruxelles et à l'intérieur de ses rues étroites.

Le point positif de la ville est qu'elle est restée à dimension humaine. Un vélo suffit pour se déplacer et en découvrir les aspects les plus caractéristiques. Les vélibes ont de plus en plus de succès. Alors, en faire, une mégapole avec des quartiers qui ne se reconnaissent plus, ce n'est pas trop un désir charnel.

Mais, revenons à nos moutons,... à notre "Caprice des Dieux" avec le Parc Léopold comme cadre et refuge du repos des "guerriers eurocrates". La place ne semble pas y manquer.

On ne va pas en faire une pub de fromage, même si l'immeuble concerné pourrait y faire penser. Pas plus de beaux messages d'amour, non plus.

Si cette similitude d'apparence au sens propre de "Caprice des dieux" comme nom que les Bruxellois ont donné, ironiquement, au Parlement européen, au sens figuré, ils se rappellent les expropriations que cela avait créé dans les années qui ont précédé l'inauguration de 1999. Le Quartier est encore dans les mémoires des anciens. Si la polémique avec Strasbourg avait fait rage, à l'intérieur les pétitions n'ont pas été plus calmes pour calmer les ardeurs de gigantisme et le nombre de mètres carrés a été réservé aux Eurocrates.0.JPG

Le Parlement européen partage, désormais, avec le Conseil de l'Union européenne le pouvoir législatif communautaire. C'était écrit et ce fut réalisé.

Commissions, sous-commissions, commissions spéciales y ont élu domicile dans le bâtiment en hémicycle avec le nom de Paul-Henri Spaak, l'un des Pères de l'Europe.

L'histoire va peut-être nous réconcilier avec le présent.

0.jpgL'ancienne gare de Luxembourg (1854) est œuvre de jeunesse de l'architecte Gustave Saintenoy. En style néo-classique, il annonce l’Eclectisme. Sa forme ancienne a perdu totalement sa fonction, entourée de bâtiments ultramodernes de la CE qui se greffent à une esplanade surmontée de passerelles de connexion entre eux.

Le magnifique Parc Léopold est classé depuis 1976. On y découvre un platane d'Orient bicentenaire et un arbre Sri Chinmoy, planté en 1991, symbole de paix et de l'union et dédié de ce fait, à l'Union Européenne.

Un arbre de Paix, mon dieu, que l'idée est bonne. Avec le nom d'un gourou indien qui est dit écrivain, musicien, peintre et sportif. Les gourous, c'est ma tasse de thé même de Ceylan. Mais faisons contre mauvais jugement, bonne figure... et continuons notre chemin.

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Jusqu'en 1880, il fut le cadre d'un jardin Zoologique. Il comporte toujours une série de bâtiments prestigieux de l'époque glorieuse de la Belgique et une étendue verdoyante avec en son centre un étang du plus bel effet.

L'idée d'en faire une Cité Scientifique avait germé dans l'esprit complice d'Ernest Solvay et de Paul Héger.  Cinq instituts universitaires allaient y naître. Mais, au lendemain de la guerre 14-18, ce sera le site du Solbosch qui sera préconisé dans cette fonction et le Parc Léopold est tombé en désuétude comme un sous-ensemble.

La Bibliothèque Solvay était un des plus impressionnants exemples d’Éclectisme de Belgique. Elle date de 1902. Comme ancien institut de Sociologie, l'immeuble était devenu la proie du vandalisme alors qu'il contenait un riche décor de bois précieux, de mosaïques et de vitraux.

Puisqu'on parle de Solvay, une parenthèse. Actuellement le siège social de la société Solvay, il se cherche une restructuration de ses locaux. Transformés, cela ferait quelques 50.000 m2 de surface à échanger de fonctionnalité. Un investissement qui s'élèverait à 100 millions d'euros.

En continuer la visite dans le Parc, il y a aussi l'Institut dentaire de George Eastman, véritable curiosité architecturale en art déco. Curieux, vous direz-vous. Oui, c'est bien lui, le même Eastman qui lança le premier appareil photographique sous la marque Kodak. Le bâtiment fut un ex-institut d'hygiène qui permit de soigner des enfants défavorisés.

Cela ne s'invente pas.

Le Lycée Emile Jacqmin, fondé en 1922 par Ernest Solvay, fut consacré à la Chimie et à la Physique. Le grand Conseil de prestige date de 1927 sur le thème des électrons et des photons pour y discuter de la mécanique quantique. Y étaient présents entre autres:  A. Einstein, M. Curie, M. Planck, H. Poincaré, H. Lorentz, N. Bohr ou encore E. Schrödinger.

Sur les 29 participants, 17 ont reçu le Prix Nobel.

Sur les façades, on peut lire "1895" et les noms prestigieux de l'époque qui sont souvent devenus inconnus ou des symboles à de rares exceptions de gauche à droite et en le contournant,: Joule, Plateau, Faraday, Jean Müller, R. Mayer, A Lavoisier, F. Magendie, Claude Bernard, J.von Liebig, Jean Stas. Carl Ludwig Matteucci

Einstein, sceptique au sujet des principes de l'incertitude d'Heisenberg lança alors:

- Dieu ne joue pas aux dés. (« Gott würfelt nicht »), pour marquer son opposition à l’interprétation probabiliste de la physique quantique.

0.jpg-Qui êtes-vous Albert Einstein pour dire à Dieu ce qu’il doit faire ?, répondit Niels Bohr.

Ben, oui, il a ses caprices, Dieu.

Et, ils ont toujours raisons, les Dieux.

Parlementer dans le forum d'un Parlamentarium européen, mène à tout, fait parler de tout, au delà de son espace et hors de son temps...

Tout cela en photographies, c'est ici

 

L'enfoiré,

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Mise à jour 23 mars 2012: Le take-up en bureaux pour 2011, avec 350.000 m2, était déjà inférieur à celui de 2010 de 30%. Les entreprises doivent réduire leurs coûts et le déménagement coûte cher. En 2012, on espère garder le statu quo. Mais comme, on a construit relativement peu vue les prêts qui sont devenus parcimonieux...

 

 

 

 

Citations:

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