Cinquante bougies pour le Jardin extraordinaire (24/10/2015)

0.jpg"Le Jardin extraordinaire est une émission de télévision centrée sur la nature et l'environnement créée le 3 octobre 1965 et programmée le dimanche vers 20h10 sur la première chaîne de la télévision publique belge francophone", voilà ce qu'en dit Wikipedia. Une émission spéciale était programmée pour le 19 octobre pour son cinquantième anniversaire. 

Le "Jardin extraordinaire", est-ce la plus ancienne émission de la télé qui existe encore ?

J'ai cherché et j'ai trouvé le top 10 des émissions télés françaises indéboulonnables.

Le "Jardin extraordinaire" se glisse entre "Le Jour du Seigneur" et "Des Chiffres et des Lettres".

Une terrible place en le Seigneur et les chiffres ponctués de lettres quand on pense à la théologie chrétienne pour laquelle le Logos est le Verbe de Dieu ou la Parole de Dieu passerait de la chair pour devenir Jésus-Christ.

L'émission Thalassa est considérée comme la plus ancienne de la télé française, mais elle n'arriva que dix ans plus tard en 1975.

Cela ne veut pas dire que le "Jardin extraordinaire" n'a pas changé depuis ses débuts. Il s'est renouvelé en profondeur en trois générations de présentateurs. 

Le principe de base est resté le même : La protection des animaux, de la nature et de la vie reste immuables. C'est la présentation et l'organisation qui ont évoluées.

Les consultants se suivirent : Edgar Kesteloot, Paul Galand, Thierry Hance, Johan Michaux et bien d'autres prirent ce rôle.

Entre 1965 et 1978, Maryse, l'épouse du producteur de l'émission, était présentatrice des animaux en studio.

0.jpgCharles Trenet inspira le titre à l'émission avec sa chanson "Le Jardin extraordinaire".

L'anecdote est délicieuse. Après un gala à Stockholm, il fut invité à un dîner à l'ambassade de France, mais n'ayant pas envie d'y aller, s'était promené dans un parc dans lequel il vit les statues qui bougeaient la nuit. Il imagina le parc empli avec des animaux qui parlaient et des statues qui prenaient vie. 

Voyant « passer la plus belle des filles », il se retrouva dans le bois sous « la douceur d'une couchette secrète ».




...

Qu'est-ce que la fin de l'année 1965 évoque dans la grande Histoire ? 

Septembre : la Chine s’engage à construire au Mali un des plus puissants postes émetteurs du continent africain.

Octobre : la guerre civile au Congo-Léopoldville. Le président Kasa-Vubu révoque Moïse Tshombe. La crise s’intensifie jusqu’au coup d’État du général Mobutu, commandant l’armée du Congo, qui rétablit l’intégrité du territoire en mettant fin aux luttes armées le 24 novembre. Déclaration sur la subversion qui interdit aux membres de l’OUA toute intervention dans les affaires d’autres États. Résolutions contre le gouvernement de la minorité blanche en Rhodésie, boycott total de l’Afrique du Sud, enlèvement à Paris de Mehdi Ben Barka, chef des opposants au roi du Maroc Hassan II. 

Novembre: Les violences raciales en Afrique et déclarations d’indépendance se suivent (Rhodésie, Ghana, Tanzanie, Centrafrique). Ruptures des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni, panique à New York plongée dans le noir pendant quatorze heures, Elizabeth de Belgique est morte, ouverture de la campagne présidentielle en France...   

En résumé, le continent africain se réveille est prêt à bouillir et l'Occident s'endort sur les lauriers de son passé.

...

Les souvenirs du "Jardin extraordinaire" 

Ils se retrouvent dans les archives de Sonuma et dans la tête des acteurs toujours vivants de l'époque.

0.jpgL'émission anniversaire enregistrée, est encore accessible.

Au départ, les animaux étaient en studio. On ne savait pas trop les risques que l'on pouvait prendre, mais on les prenait.

Dans les studios, au départ, puisque la technologie ne permettait pas de s'en extraire facilement. Déplacer les grandes caméras sur le terrain était quasiment impossible.

Le producteur, Raymond Dastra, avait vu juste. Son épouse, Maryse aimait les animaux et présentait les animaux qui venaient du zoo d'Anvers.

Les documentaires étrangers étaient achetés et commentés en direct dans l'improvisation par des consultants scientifiques qui se devaient de rester clairs et compréhensibles par le grand public.

0.jpgComme émission familiale et transgénérationnelle, la "lovestory" avec les téléspectateurs se produisit dès le début. L'exotisme faisait rêver. 

La présentatrice, Arlette Vincent devint son icône pendant 26 ans. Le relais fut assuré par Claudine Brasseur pendant 22 ans après une courte pause. 

0.jpgDe bimensuelle, l'émission passa au rythme hebdomadaire le samedi soir avant de passer au dimanche bien plus tard. 

Lors d'une première sortie d'Arlette Vincent, Jean-Claude Valère Gille reprit l'intérim en ouvrant le plateau vers l'extérieur. Bon présentateur, celui-ci n'avait pas le charisme d'Arlette Vincent qui avait imposé son style.

En tant que productrice de l'émission, Arlette reprit du service avant de tourner la page définitivement après 25 ans d'émission de défense envers la nature et les animaux. 

De contemplative, l'émission était devenue plus engagée politiquement.

La succession par Claudine Brasseur, plus incisive, confirma cette voie.

Les catastrophes écologiques vont défiler pour soutenir celle-ci: Bophal, Tchernobyl, les marées noires, les chasses à la baleine, les assassinats de jeunes phoques sur la banquise pour leur fourrure, le conditionnement de transport des animaux, le massacre des dauphins à cause des filets dérivants, le traitement des grenouilles dont on coupait les cuisses pour la cuisine, tout cela fut présenté et a jeté un froid d'émotions dans le public.

Des organisations comme le WWF et des manifestations comme la Convention de Washington, la Conférence de Rio épaulèrent la tournure qu'avait pris l'émission.

Celle-ci sortit du divertissement pour impliquer le public et le conscientiser dans l'idée que la Terre ne nous appartenait pas.

L'écologie politique se structurait. 

La suppression de l'assassinat des jeunes phoques pour leur fourrure, Brigitte Bardot en avait fait une croisade.

Petit à petit, entrait dans les consciences le fait que la liberté des animaux entrait dans le besoin des consciences que toutes les espèces vivantes avaient leur importance dans les cycles de la vie et que les jeux de massacres sur les animaux à cause des hommes se retourneraient, un jour, contre eux-mêmes.

0.jpgLa dernière présentation en studio d'un hippopotame en studio qui stressé, était mort au retour, sonna le glas au studio. Laisser les animaux dans leur milieu naturel devint obligatoire. 

L'arrivée de la télé couleurs apporta la touche réaliste qui était celle des milieux naturels.0.jpg

Les documentaires en provenance de grandes productions ou de particuliers à petits budgets, apportèrent une extension vers l'extérieur inexploré du monde.

0.jpgEn 2014, nouveau choc, nouveau vide.

Claudine Brasseur prit sa retraite. Tanguy Dumortier qui avait présenté un documentaire à l'émission, releva le gant et changea complètement le canevas de l'émission.

Le nouveau générique confirma l'externalisation de l'émission.

Le monde était devenu un studio en plein air grâce aux moyens technologiques du numérique pour appuyer cette transformation.

0.jpgEconomie de moyens avec les drones pour les prises de vue à partir du ciel quand il était impossible de recourir à la prise de vue en hélicoptères.

Les conseillers scientifiques ne vinrent plus à l'émission, c'est l'émission qui allait à leur rencontre dans le cadre de leur travail.

Comme les téléspectateurs étaient également devenus des voyageurs lointains grâce à la démocratisation des vols aériens, il devint nécessaire d'accumuler plus de connaissances avec le rythme et la musique pour apprendre le vivant pour devenir des "Enfants du jardin".

0.jpgQue de vocations en biologie chez les jeunes, n'ont pas créé cette émission ?

Claudine revenait comme tous les dimanches matin pour présenter l'émission du soir.podcast

Le 18 octobre date anniversaire, l'émission commença par un appel aux jeunes qui entreront peut-être dans le futur de l'émission. 

0.jpg

Chacun d'eux a pu ainsi se familiariser avec les méthodes utilisées au Jardin.

Comment visiter les fonds marins ?

Comment se mettre à l’affût des animaux avec patience pour capter les meilleurs images ?

Comment manipuler les instruments de l'image et du son en touchant le monde de l'infiniment grand à l'infiniment petit ?

Le film "Freedom, la légende des aigles" ponctuait la soirée. 

...

 Conclusions

0.jpgComme toujours, les moyens financiers sont nécessaires pour ce genre d'émissions.

Ces moyens, la BBC les a souvent eux et cette chaîne anglaise a produit des films époustouflants sur la nature.

Nicolas Hulot a permis aux Français de voir ce qu'était le monde "Une vie plus haute que ses rêves " disait-il en pensant à Ushuaïa et Okavango.

Toutes deux, non remplacées, ne sont plus disponibles que dans les souvenirs. 

0.jpgLes budgets sont toujours limités à la taille du pays.

S'y adapter, c'est faire preuve d'imagination. 

0.jpgSentir le moment où il faut se renouveler ou mourir de la belle mort de ses souvenirs, c'est un choix stratégique.

L'intérêt du téléspectateur peut naître sans l'avoir préparé, mais en général, il s'émousse très vite.

Cinquante ans, c'est un succès inégalé...

Les souhaits de bon anniversaire des collègues furent nombreux.

Aujourd'hui, via le biomimétisme, la nature nous inspire bien plus que nous l'inspirons.

Avec l'anthropomorphisme, les animaux nous font rire.

0.jpgLa question reste : est-ce que les animaux ont de l'humour, eux-mêmes ? 
Vinciane Depret répondait pour le chien :podcast(*)0.jpg

Maintenant, il y a moyen de jouer comme eux, mais n'ayez pas peur d'avoir l'air bête : podcast

Mais comme le dit le "Moustique", les animaux nous ruinent : 1,3 milliards d'euros par an en Belgique.

Animaux de compagnies qui n'apportent parfois de "compagnie" que de nom.  

...

Le cinéma et les animaux

Une histoire mêlée de peur, d'amour ou de haine avec les animaux. Au cinéma, la peur est plus rentable que l'amour.


Heureusement, la chanson de Moustaki "Un jardin qu'on appelait la Terre" nous réconcilie

L'enfoiré,

 

Citations:

...

Aujourd'hui, autre anniversaire

Le 70ème anniversaire de l'ONU qui devait régler les problèmes entre les nations.

Une histoire d'hommes lourde d'événements dans laquelle les animaux n'ont pas droit au chapitre.

Le professeur en Droit International à l'ULB, Olivier Corten en donnait la situation actuelle:podcast

que Alex Vizorek rectifiait avec humour: podcast

(*)  31 octobre: Vinciane Despret donne la suite podcast

29 mai 2016: Puisque l'histoire du Jardin est revenue sur nos antennes, laissons parler celle qui en a fait partie pendant 20 ans : Claudine Brasseur:
podcastpodcast

| Lien permanent | Commentaires (6) |  Imprimer