Le futur antérieur des pouvoirs selon Alvin Toffler (03/11/2018)

0.JPGSouvent, on se demande comment on est arrivé à notre situation actuelle qui parfois ou même souvent ne nous sied pas toujours.

Le sociologue américain, Alvin Toffler, né enet décédé en, a été l'un des futurologues les plus célèbres de son temps accompagné dans ses voyages de sa fidèle épouse Heidi Toffler.

Ses livres sont devenus des best-sellers mondiaux et ont contribué à modifier les idées sur les grands changements de la fin du 20e siècle.

Après 30 ans de repos dans ma bibliothèque, le livre "Les Nouveaux Pouvoirs" (traduction de "Powershift") en est ressorti.

Toffler a modélisé une vision de l'avenir en imaginant les conséquences du changement de paradigmes associés à l’avènement de l’ère de l’information au travers de trois livres parus au cours de trois décennies à partir de 1970.

...

En 1970, "Le Choc du futur": la société est dans une phase de transformation structurelle énorme de la société industrielle en une « société super-industrielle ». L'accélération des progrès sociaux et technologiques les amène à se déconnecter du monde, en proie à un « stress et une désorientation destructeurs appelée "future shock" à laquelle il attribue la majorité des problèmes sociaux. Dans la foulée de son exposé sur ce genre de « chocs », il introduit le terme « surdose d'information ». Cette transformation a commencé à déconcerter les gens.

En 1980, "La Troisième Vague"  qui suit la vague agraire, la vague industrielle passe à celle de la connaissance liée au secteur tertiaire et à celle du savoir en symbiose avec les techniques aérospatiales de l'époque.

0.JPGEn 1990, "Les Nouveaux Pouvoirs" décrivent les changements radicaux par la violence, la richesse, le savoir, les transferts de pouvoirs entre individus, entre sociétés ou gouvernements au travers des supermarchés, des hôpitaux, des banques, des bureaux, des syndicats et des médias en affectant tous les domaines de la vie professionnelle et affective.

Le moteur de ces convulsions est un "système de création de la richesse" totalement inédit, fondé principalement sur le savoir et la communication en établissant de véritables forteresses de pouvoir.

Le livre est écrit en 7 parties et 34 chapitres dont les titres sont parfois humoristiques par l'amalgame qui en est fait avec leur contenu, "Les Nouveaux Pouvoirs" montrent comment ce système sape l'autorité des patrons, des médecins, de la police, des réseaux actuels de télévision, des géants de l'industrie, des partis politiques, de même qu'il secoue et remet en question les anciennes alliances politiques.

  1. Le nouveau sens du pouvoir
  2. La vie dans l'économie super-symbolique
  3. Les guerres de l'information
  4. Le pouvoir dans la firme flexible
  5. Nouveaux pouvoirs et politique
  6. Transferts de pouvoir à l'échelle planétaire
  7. Hypothèses sur lesquelles reposent le livre

Dans son livre, Toffler fait une césure et résume les 4 premières parties en 12 points:

  1. Le nouveau système repose sur les échanges de données, d'information et de savoir pour créer le savoir de manière accélérée
  2. Il passe de la production de masse à une production flexible personnalisée en fabriquant en petites séries des produits variés.
  3. La terre, le travail physique, les matières premières et le capital perdent en importance, remplacés par le savoir symbolique.
  4. Le moyen d'échange devient une information électronique rendant la fluidité des nombreuses sources de capital au point de se rassembler ou de se disperser rapidement.
  5. Biens et services deviennent modulaires, constitués d'une multitude de systèmes avec des normes spécifiques révisées en permanence tout en créant des guerres pour le contrôle de leurs informations.
  6. Les lentes bureaucraties sont supplantées par de petites unités en ad-hocraties, par des alliances complexes. Les hiérarchies sont aplaties  à flux libres pour accélérer les décisions  
  7. Les unités organisationnelles se multiplient et se diversifient en effectuant des transactions entre elles, accroissant le volume d'information et des communications.
  8. Les travailleurs ne sont plus interchangeables et accroissent leur la richesse  par des symboles en disposant de moyens décisifs et irremplaçables de production
  9. Le héros n'est plus l'ouvrier en bleu, ni le financier, ni le manager, mais l'innovateur qui associe le savoir imaginatif et l'aptitude à l'action
  10. La création de richesse est reconnue comme un processus circulaire où les résidus sont recyclés en ressources utilisables pour la rotation suivante sous le contrôle par un ordinateur et un savoir approfondi en données scientifiques ou environnementales.
  11. Le consommateur apporte son argent, mais aussi des informations vitales pour le processus sur le marché et les modèles de produits. Consommateurs et producteurs tendent à se fondre en un "prosummateur".
  12. Le système de création de richesse est localisé et planétaire. Les fonctions débordent les frontières intégrant un commun effort de production des activités.

Quelques phrases au vol précisent et complémentent ce résumé:

L'histoire de Blanche neige et les sept singes explique...

...

Les conclusions du livre:

"Sous forme d'un coda, Toffler parle de liberté, d'ordre et du hasard qui font basculer le pouvoir lié à la nature même d'un univers aléatoire qui nous rendrait impuissant avec seulement une illusion du pouvoir, prisonniers de notre destin, avec un minimum d'ordre et un désir constant de nouveauté entre le pouvoir des États et celui du public, entre le "socialement nécessaire" et le "superflu". Plus les nations avancent dans la voie de l'économie super-symbolique, plus elles ont besoin d'autorégulations horizontales dans lesquels l'argent demeurera un formidable outil de pouvoir.

"Tel est le dangereux, mais ô combien passionnant, le mystère de l'ère des Nouveaux Pouvoirs", écrivait-il.

Alvin Toffler n'a plus pensé écrire de suites en 2000 et en 2010, après "Les nouveaux pouvoirs".

En 2007, après sa trilogie, il reprenait la route de l'écriture sans plus vraiment apporter de nouvelles prévisions mais pour confirmer les bouleversements majeurs successifs tout en persistant à voir la connaissance comme la panacée du savoir.

Ensuite, "Guerre et contre-guerre, survivre à l’aube du XXIe siècle", "Créer une nouvelle civilisation : la politique de la Troisième Vague" et "La Richesse révolutionnaire" se targuent de garder le cap contre vents et marées.

Au sujet des communications, à la fin des années 80, qui a servi à l'analyse de Toffler dans son livre des "Nouveaux pouvoirs", le minitel vivait ses derniers instants de gloire.

0.JPGEn 1990, on parlait déjà d'informatique mais le World Wide Web sortait à peine du cerveau embué par l'enthousiasme de Tim-Berners-Lee.

Les connexions par téléphone sans ADSL, nécessitaient d'aller chercher un café entre chaque page lue à partir d'Internet. Pas question de pratiquer le "home working".0.JPG

 

Coïncidence de projet, le Vif publiait cette semaine un dossier sur les années 80 qui les situent dans la décennie décisive.

Elle a marqué la tendance comme avant-gardiste, créative, source de réalités qui conditionne en lames de fond,notre quotidien actuel. 

Tout était encore documenté, pour devenir arbitrairement acceptable et incontournable dans la suite.

On commençait à voyager en charter pour parcourir le monde. 

En 2011, j'écrivais "Décennies 80'ties, toute en contrastes".

Extrait: "La gauche entre au pouvoir en France  avec Mitterrand comme président pendant 14 ans. Le contexte international allait dans le sens inverse, sur la pente savonneuse de la droite et du pouvoir de l'argent. Le socialisme était niaisé et considéré comme rétro et responsable  de la crise et trop coûteux pour être suivi dans le futur. L'économie libérale capitaliste se mettait en place avec des restructurations qui dépiautaient, une à une, les "poupées russes". Dès 1982, le slogan "Changer la vie" avait tourné à l'aigre. La même année, le film prophétique "Mille milliards de dollars" présentait les processus par le sommet des multinationales.

La propriété privée devenait la récompense d'une lutte entre gagnants et perdants dans laquelle seul le maximum de profits permettait de grandir et de ne pas mourir sur le grand échiquier mondial. Racheter les entreprises moribondes à bas prix, restructurer et revendre en morceaux avec bénéfices au passage, en était une première version. Ces bénéfices pouvaient encore être réalisés soit par une augmentation des revenus des ventes ou par une diminution des coûts dont les salaires constituent les postes importants. Au début, (mal)heureusement, les produits fournis étaient construits pour durer par une qualité qui se voulait solide. Cela ne permettait plus le renouvellement assez rapide par la consommation. Alors, faute de trouver de nouveaux acheteurs, les revenus des producteurs multinationaux commencent à baisser. Les exportations étaient difficiles car en concurrence avec l'extérieur, toujours plus énergique. La comète du profit entraîne dans sa chevelure, les salaires qui commencent, dès lors, à stagner localement, et puis, à baisser aux États-Unis et en Europe.  Au Royaume Unis, le rapport de force entre travail et capital se mue en véritable guerre civile à la suite de revendications des mineurs en grève, soutenues par les syndicats, mais cassée par l'armée et le gouvernement de Margareth Thatcher. Cette grève par sa longueur reste le symbole de la défaite du monde du travail et du recul des conquêtes sociales, face à l'émergence du néolibéralisme. Elle fit 20.000 blessés et  200.000 arrestations grâce à toute la panoplie répressive engagée. 1.jpgL'individu, aveuglé, était dépassé, à tous les postes, par ses propres objectifs de grandeur. L'inflation s'élevait avec des pointes de 14%. Le dollar fixé coûtait encore à presque 10FF ou à 50FB. Pour éviter la perte du pouvoir d'achat, une fausse progression des salaires correspondait, de moins en moins, à l'inflation galopante. Un index à la consommation était créé en catastrophe qu'une indexation automatique calculée en fonction de produits de premières nécessité, sauva en partie les "meubles", mais elle sera amputée  de biens  de l'importation et surtout par l'énergie. Une fausse impression de gagner plus, en résultait. Pour les entreprises locales, rattraper le retard s'imposait. Vendre pour écouler les stocks mais pas nécessairement sous la forme du "More money" pour garder la pensée positive et, être couronnée plus tard, par une banale idée de vivre de ses rentes. Les inégalités se creusaient, avec ou sans frics. Si le citoyen en avait les moyens, il fallait qu'il épargne. A posteriori, cela a été un parachute quelque peu troué, pour les décennies suivantes. La spéculation, pour les citoyens lambda, ne s'est présentée que lorsque l'inflation dépassait les intérêts de leur épargne. Un faux goût du risque mais qui était manifestement mieux payé... jusqu'à un certain temps, car, en Bourse, aucun arbre ne parviendra jamais à monter jusqu'au ciel. Le mur de Berlin était tombé derrière les affres de rêves de liberté. L'Est et l'Ouest allaient-ils se réconcilier? Ce fut seulement la mondialisation commerciale qui se pointait à l'horizon, si ce n'est suite à un colonialisme latent grâce à des matières premières maintenues au prix planché par Wall Street à la recherche du prix minimum. La spéculation sur un avenir qui devrait être plus radieux ne fait que commencer.".

1.JPG

Le Vif écrit: "En Belgique, pendant cette décennie, l'endettement public augmente. L'individualisme triomphe pour suivre la loi du marché, mais on veut encore se payer sur la bête en profitant des pouvoirs publics. L’État devient un simple gestionnaire. Plus d'investissements dans les infrastructures. L'Affaire de la Générale est le point de basculement de l'économie belge puisque la Société Générale gérait un quart du PIB national. Les premiers bijoux de famille sont vendus". 

La biodiversité en perdition ne se ressent pas encore, mais c'est la naissance du parti écolo....

0.JPG

S'il fallait ressortir une vieille chanson de Charles Aznavour,

je choisirais "le Palais de nos chimères", même si cette chanson date de 1955.


 

Eriofne,

 

Dans deux semaines, on revoit les prévisions de Toffler dans l'actualité.

 

0.JPGEn préambule:

2/11/2018: Partis-pris débattait deux sujets de l'actualité:podcast

Quand on parle de l'Europe, on retourne à Bruxellespodcast

Nicolas Vadot était invité pour parler de sa situation de dessinateur de presse: podcast

 

| Lien permanent | Commentaires (5) |  Imprimer