Au cœur de la tourmente (10/11/2013)

0.jpgEn 2014, c'est le centième anniversaire de la première guerre mondiale. Alors les musées et les médias préparent le terrain du souvenir.  L'exposition "Au cœur de la tourmente" au Musée de la Guerre de Bruxelles amalgame les deux guerres mondiales.

Cette semaine a vu le départ de cette année souvenir à Charleroi-Marcinelle.  

Demain, un 11 novembre d'armistice plus spécial que d'habitude. Le film documentaire colorisé "Apocalypse 14-18" se prépare pour réveiller le souvenir.

Un travail de mémoire multiforme pour ce centenaire de la Grande guerre...

Devoir de mémoire d'un lourd passé comme celui-là qui rejaillit sur les générations suivantes. Enfants et petits-enfants devront probablement encore le porter sur leurs épaules encore longtemps. Je ne dis pas qu'il faille tourner la page définitivement même s'il y a longtemps prescription. Tellement de choses sont encore non-dites ou tenues sous silence. 

Déjà en mars, l'hebdomadaire en parlait: "Climat de guerre froide en vue du centenaire de 1914-1918: la montée en puissance du pouvoir fédéral agace la Flandre. Son ministre-président, Kris Peeters (CD&V), ignore la main tendue: la commémoration se fera aux conditions flamandes. Imbuvables pour la communauté internationale".

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Le Vif L'Express, début novembre, présentait un aspect inattendu: les budgets octroyés pour la récupération des événements par régime linguistique, par communauté.

En France, quand ce n'est ainsi, c'est autrement comme cette nouvelle "Illusion tranquille de la ligne Maginot". Amalgame de citer l'Etat qui peut tout? Pas vraiment, quand on pense que le Ministère de la Guerre est à ce niveau et que le ministère de l'amour reste au niveau du citoyen. Récupération aussi de la part du Président Hollande tenté par l'union sacré face à la démobilisation générale.

Les nationalismes étatiques, régionaux, communautaires se réveillent un à un en Europe.

Nouveau titre, "Les non-dits flamands du Centenaire" du Vif L'Express.

Il est dit que "l'histoire est manipulée. La Flandre politique ose biffer le rôle de la Belgique de ses commémorations de la Grande Guerre". L'Yser et Ypres pris comme centre de ralliement. Les historiens n'étaient pas conviés pour le "100 ans de Grande Guerre en Flandre". "Yser, the place to be". Le mot d'ordre, "Pas d'empêcheurs de flamandiser en rond. Eviter les sujets et les dates qui fâchent. Pas de le "Raad van Vlaanderen", ni de "Flamenpolitik" qui ambitionnait de faire sortir le 'peuple fier de l'ère de la francisation'.".

Le mythe du brave soldat flamand sacrifié sur l'autel de la francophonie ne tient pas puisqu'il y eut autant de morts wallons - pas francophones car ils ne parlaient que wallon et non français - que de flamands et ceux qui ont payé le prix, ce sont les Anglais dont 70% sont morts pour la défense de l'Yser.

Hier, ARTE avait un documentaire "La Grande Guerre, les tunnels de la mort". Des fouilles dans un gigantesque réseau de galeries souterraines à Messines.

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En mars 1917, la scission des ministères et à Bruxelles proclamée capitale de la Flandre. Le 28 mai 1918, "l'Unionsakte" est signé. Le 22 décembre 1917, le "Raad van Vlaanderen". Le mythe du soldat flamand sous les ordres incompréhensibles donnés par des francophones. Geert Bourgeois, ministre du tourisme, veut effacer le mot "Belgique" par les "Flanders Fields"

Aucun patriotisme "à la belge", une fois... 

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1914, une année de grandes batailles, d'élections, aussi, programmées pour le 25 mai, alors que la Belgique allait être envahie au mois d'août...

Une erreur d'appréciation qui pourrait s'expliquer par l'absurde ou par simple surréalisme? 

Aujourd'hui, la récupération de l'histoire ancienne est là pour meubler l'histoire du présent.

En Belgique, elle devient une occasion de sortir du cocon noir-jaune-rouge pour la Flandre en support aux dernières idées de confédéralisme.

"Plus jamais de guerre", "Nooit meer oorlog", d'accord à 100%.

Mais, ce n'est pas en plaçant de nouvelles frontières plus que linguistiques que cela se concrétisera.

Joseph II, en despote éclairé, avait déjà eu l'idée de créer une Belgique confédérée en 1789 ans dans une éphémère république des "Etats Belgique unis". Mal, lui en a pris, un an après, c'était la révolution.

En 1914-18, rebelote, même tentative de diviser pour régner avec les Allemands à la manœuvre.

La Belgique était au tapis et l'occupant allemand s'est retrouvé à pédaler dans la semoule à Ypres, alors qu'il espérait un ticket de passage pour en découdre rapidement avec la France. 

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Le centenaire de 1418 s'égare dans les mémoires, se disperse dans la presse en fusionnant les effets avec avec ceux de la deuxième guerre 40-45.

Celle-ci n'était qu'une suite logique de la première, même si chacune a ses spécificités.

Dans l'Expo actuelle au Cinquantenaire de Bruxelles, "Au cœur de la tourmente", le centenaire de 14-18 était presque confidentiel et à peine mis à l'avant-plan.

La deuxième guerre de 40-45, avec la Shoah, Hitler, les uniformes de cette époque, le débarquement et tout le reste prenait bien plus d'espace.

A tout mélanger, c'est se tromper d'époque et fêter la fin de la 2ème Guerre 40-45, sans s'en rendre compte.

0.jpgMais l'anniversaire de cet autre événement viendra en temps voulu.

On apprenait que "Tempora" organisera quelque chose pour l'événement du centenaire, mais c'est, en dehors du Gouvernement Fédéral qui, lui, n'a octroyé qu'un budget d'à peine un million d'euros, tandis qu'en Flandre, les médias qui parlent du centenaire, se précipitent.

Ce dimanche, à Ploegsteert Warmeton-Commine (ou Plugstreert), s'ouvre  une exposition qui devrait être exemplaire.  

"On utilise la mémoire avec un regard d'aujourd'hui et si tout s'était déroulé comme prévu, il n'y aurait pas eu de Soldat inconnu". est-il écrit dans le journal du weekend. C'était le le 11 novembre 1922, un souvenir récent.

La Wallonie et le tourisme de la mémoire semble plus s'intéresser au bicentenaire de 1815, de Waterloo avec la route Napoléon comme colonne vertébrale de l'événement. Demain, 11 novembre, au soldat inconnu, plus de poilus de cette première guerre.

Au cœur de la tourmente d'accord, mais de quel tourmente s'agit-il?

Alors, je me suis replongé dans ma documentation, dans les livres qui m'ont été légués de génération en génération comme des reliques de guerres. Bien rangés dans ma bibliothèque, je les ai ressortis au moment opportun.

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D'abord le récent "Chronique de la Belgique" avec un titre...

"La guerre a été un frein pour le mouvement flamand" qui dit qu'une petite minorité de Flamands ont voulu collaborer avec les Allemands. Ils pensaient obtenir ainsi une Flandre autonome. Après la guerre, le mouvement flamand a été discrédité par cette minorité. La Seconde Guerre ne sera pas une répétition de la Première, mais des Flamands travailleront avec l'occupant. L'opinion publique de droite, en Flandre, pense que les Flamands ont été punis trop sévèrement par les francophones. Ce qui est faux puisqu'il y a eu plus d'exécutions en Wallonie. 

Le 29 juillet, à la maison du peuple de Bruxelles, puis au Cirque Royal, devant 8000 personnes, Jean Jaures prononçait son grand discours pour la paix. Charles de Broqueville croit encore que le territoire ne subira aucun dommage, mais qu'il faut accomplir les devoirs imposés par la neutralité. Ultimatum de Karl-Konrad von Below Saleske d'octroyer le droit de passage est refusé par Albert Ier.

Résistance héroïque des forts de Liège. Repli sur Anvers. Les Allemands entrent dans Bruxelles sans rencontrer de résistance. De violents combats à Namur pendant 20 jours. Un Zeppelin bombarde Anvers. Le 22 avril 1915, les gaz toxiques sont utilisés, pour la première fois, dans les tranchées sur le front de l'Yser. Le pessimisme n'empêche pas d'élever le Roi chevalier au niveau d'un mythe. A partir du 28 septembre 1918, c'est le retournement de situation par les alliés. L'armistice sera signé le 11 novembre à 11:00 à Rethondes. Le bilan de cette guerre en Belgique: 26.338 décès des suites de blessures, 14.029 des suites de maladies ou disparus, 44.000 blessés, 62.000 civils morts et 30.000 avec la grippe espagnole à cause de famines et du froid. L'infirmière britannique, Edith Cavell fut fusillée pour haute trahison, le 12 octobre 1915.  Gabrielle Petit, elle, était exécutée, le 1er avril 1916, à Schaerbeek, alors qu'elle était chargée de faire passer des soldats aux Pays-Bas. Devant le peloton d'exécution, celle-ci s'est écrié "Vous allez voir comment meurt une femme belge".



Dans ma bibliothèque, une histoire de la guerre 14-18 qui explique les tenants et les aboutissants de cette première guerre mondiale. Quatre volumes bien brochés, un legs à titre posthume de mon grand-père. 

1.jpg"La Belgique et la guerre" publié en 1924 avec une préface de Henry Carton de Wiart qui date du 31 janvier 1920. Le résumer n'est pas possible. Je n'en reprendrai que les titres qui y sont traités. Cela démontre quel a été l'état d'esprit juste après la première guerre, alors qu'il ne pouvait se rendre compte qu'il y en aurait eu une seconde.

1. La vie matérielle de la Belgique durant la Guerre mondiale.

L'attentat de Sarajevo. Juillet 1914. Les procès Caillaux et Wilmart. L'assassinat de Jaures. Une réunion ironique pour la réconciliation à Paris. Mobilisation. Réquisitions. Optimisme et pessimisme. Un 1er ultimatum allemand. Agitation et inquiétude. Enrôlement de volontaires. Des drapeaux sur toutes les façades. Panique financière dû à la pénurie de monnaie en pièces. La panique alimentaire. La physionomie spéciale de Bruxelles. Réfugiés liégeois. Les blessés. Les derniers trains. Le Bourgmestre Max. Les rumeurs. La terreur. Les procès. L'héroïsme. Les loisirs. Les déportations. L'activisme. Les traîtres. La Presse muselée. La charité. Le rapprochement social des classes. Les ravitaillements. Le "Comité national". Les accords internationaux. Le département "Secours". Les vêtements et le chauffage. Les œuvres de l'enfant, des soldats. Les magasins Communaux. La solidarité sociale. Le Comité Hispano-Néerlandais. L'offensive. La fuite de civiles allemands. L'évacuation. La délivrance du 22 novembre 1918. Le Gouvernement d'Union Nationale. Les Syndicats. Les Fonctionnaires. La vie chère. Les bénéfices de Guerre et la restauration. Les leçons de la guerre (annexées aux photographies).    

2. L'invasion allemande.

Etat d'esprit en Belgique et en Allemagne avant la guerre: on n'y croyait plus après 3/4 de siècle d'une paix ininterrompue, à part une petite alerte en 1870. Les Francs-Tireurs. Les Province de Liège, de Luxembourg, de Namur, de Brabant et d'Anvers. 

3. Les opérations militaires.

Situation militaire de la Belgique à l'aube du conflit mondial. Les fortifications. La résistance des Forts. Les combats de Haelen et de Hautem-Sainte-Marguerite. L'alerte. L'attaque. Anvers, le pivot de manœuvre. La jonction de l'armée belge avec les armées franco-britanniques sur l'Yser. La guerre d'attente sur le front retranché. Dans les airs: Guynemer, Thieffry, De Meulemeester. Organiser les arrières. La Campagne d'Afrique. L'offensive de la victoire: la bataille de la Crète des Flandres. Les prisonniers. La rentrée triomphale à Bruxelles.    

4. Histoires diplomatiques 1914-1918. 

Belgique, Prusse, France et Angleterre de 1830 à 1914. Le Traité secret des Forteresses. Les causes de la Guerre. La gloire. Jeu des Alliances et les Neutralités. La violation de la neutralisé belge. Le second ultimatum allemand. La guerre au Congo. L'offensive calomniatrice. Le Pacte de Londres et la Déclaration de Sainte-Adresse. L'entrée en guerre de l'Italie, de la Roumanie, de la Bulgarie, de la Grèce et du Portugal. Les propositions de paix de 1916. L'intervention des Etats-Unis. Les Paix séparées. L'intervention Pontificale. L'armistice.    

0.jpgLa guerre 14-18 est aujourd'hui, numérisée.

Le but est de témoigner du quotidien des soldats dans les tranchées avec l'horreur des attaques et de l'ennui de l'attente. 

Douze militaires ont été fusillés pour abandon de poste, insubordination ou autres raisons: 7 en 1914, 3 en 1915, et 2 en 1918. Après plus de peine capitale. En France, ce sont 600 poilus qui ont été passés par les armes.1.jpg

Des films sur ces épisodes ont été nombreux. "Le pantalon" est peut-être le plus ridicule. 

Fin 1919, 23 inculpés pour trahison s'ajoutaient en Belgique.

"Au cœur de la tourmente", un titre sinistre vu sous cet angle.

Pourtant, la guerre 14-18 n'est pas totalement "soldée". 

Il a suffit récemment d'un livre d'histoire, écrit par Max Gallo, qui déviait de la version communément acceptée pour que reviennent les contestations et les polémiques.

0.jpgOn apprend aussi qu'à l'occasion du centenaire sortira une nouvelle bière belgo-russe. Une bonne initiative qui arrive bien à propos pour leur permettre de sortir de leur guindage à la vérité unique. C'est blindé. On ne rigole pas avec l'histoire. Il faut savoir, quand un colonel le dit et qu'en plus, cette fois, il a raison de le dire, faudrait pas un historien français qui biaise l'histoire en parlant d'un événement qui s'est déroulé sur notre territoire belge. Se réfugier en France? Pour quoi y faire puisque les Allemands voulaient justement y aller?

Ensuite, ce fut la parade inutile, la ligne Maginot ou ligne Siegfried.  

Les enfants et petit-enfants des "exécutés belges pour l'exemple" de 14-18, demandent aujourd'hui, justice et réhabilitation. En visitant le Musée, j'ai pu m'apercevoir q'il y avait plus de visiteurs que d'habitude, que les enfants, toujours attentifs, recevaient toujours les leçons d'histoire de leurs aînés. 

Le film "Joyeux Noël" donne un peu d'espoir et d'émotions lors d'un Noël.

Jeudi, il y a eu le "jeune Alex Vizorek", 32 ans, qui est bien loin de tout cela avec sa vision très particulière que j'aime, avec son café serré sur le sujet.

0.jpgIl se définit, avec humour comme "une oeuvre d'art" et comme un "vulgarisateur des temps modernes", car il ne peut pas l'être "des temps anciens". Un petit droit de réponse s'impose.

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Cher Alex,

Si votre grand-père n'a pas pu vous raconter des histoires de la guerre 14-18, ma grand-mère, née en février 1900, a pu le faire avec beaucoup de détails. Mon grand-père, lui, est mort en 1926, des suites de l'inhalation de gaz moutarde. "Effets retards", comme on dit. Quant à mon arrière-grand-mère, elle a eu encore son mot à dire dans ma prime jeunesse avant de céder face à la vieillesse.


Vous dites: "Pétain plus drôle à boire de la bière à Verdun que de l'eau à Vichy. Le flair des Américains qui arrivent quand les choses se terminent".

Ça se tient. D'ailleurs, aucune patriotisme dans les propos qui précèdent. De simples réflexions. Tournons la page. 

0.jpg"La Der des Ders" en inspire toujours en Belgique... 

Le livre "La Chute des Géants" de Ken Follet est à lire pour se remettre dans l'époque du début du 20ème siècle.

Les chansons "La Madelon", "Rosalie", "On ne passe pas" pourraient encore le faire croire.

En France, "Le Der des Ders" a cédé le manche à 110 ans en 2008.

Des photos du Musée de la Guerre au Cinquantenaire et des caricatures de l'époque.

 


 

L'enfoiré,

 

Articles annexés:

A lire sur le sujet dans un roman de Ken Follet "La chute des Géants

Romancée, en trois chapitres:

 

Citations (plus que d'habitude):

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Mise à jour 27 décembre 2013: Le Vif reprend les 100 ans pour en définir le "comment la Belgique a changé".

0.jpgMise à jour février 2014: Le Musée du Cinquantenaire a ouvert une exposition sur 14-18 du 7-2 au 26-4-2015. Dommage un peu tard, au moment de la publication de ce billet. Ça va faire un peu réchauffé. 

 

 

 

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