Symphonie indienne (22/08/2007)

entrepriseL'Inde est la deuxième nation la plus peuplée du monde avec plus d'un milliard d'habitants. Véritable mosaïque mélangée entre cultures et religieux. Depuis le 15 août 1947, indépendance et démocratie. Chez nous, depuis quelques temps, dans plusieurs sociétés commerciales, l'outsourcing l'offshore, des mots qui n'ont plus de secrets. Ils existent dans les activités des TIC (Technologies de l'Information et des Communication). De l'autre côté, sur place, comment s'en sort-on?

ARTE programmait son "Thema", ce 12 août sur ce thème à l'occasion du 60ème anniversaire de l'indépendance de l'Inde.

L'immense marché potentiel indien affiche 9% de croissance par an et il est le seul avec sa main d'œuvre qualifiée qui puisse faire contrepoids à la Chine.

L'Inde est le premier exportateur au monde de services d'aide à la programmation informatique et d'experts en pharmacologie et en biotechnologie.

Huitième importateur de produits belges.

Les pierres précieuses, par exemple, représentaient en 2004, 85% des exportations belges. Les textiles indiens suivent le chemin inverse.

Un million de diplômés par an souvent en provenance des universités de type "américain".

Les sociétés d'informatique ont montré le chemin de cette importation de travail en provenance de l'Inde.

Les banques, la distribution et beaucoup d'autres secteurs de l'économie ont suivit en délocalisant leurs activités annexes, en ouvrant une filiale dans le Sud initialement rural ou en recrutant des ingénieurs locaux pour les importer ensuite en Europe et palier une soi-disant pénurie d'informaticiens.

Pénurie surtout d'ingénieurs bon marchés. 

L'Inde est constituée de 28 États avec une vingtaine de langues officielles.

Hindouistes, musulmans, sikhs, jaïns, chrétiens se partagent le domaine du culte.

La capitale du Karnataka, Bangalore, temple de l'informatique continue de manière exponentielle son Big Bang comme plus gros fournisseur de main d'œuvre qualifiée dans la haute technologie mais dont les campagnes restent malgré tout sous-développées.

Mais, l'Inde n'est pas Bangalore. Il vaudrait mieux utilisé l'ancienne dénomination: "Les Indes", au pluriel puisque le Pakistan faisait partie de celles-ci avant Mohandas Karamchand Gandhi


L'Inde tisse sa toile sur toute la planète.

Les agriculteurs ont aussi des griefs et des desiderata et eux sont bien plus nombreux. 

Seuls freins à l'expansion de l'Inde, son opposition chronique avec le Pakistan, le pouvoir des autocrates, une administration corrompue et le système des castes toujours bien ancré au sein de la société indienne.

Un tiers de la population vit avec un dollar par jour et on compte 40% d'illettrés.

C'est un fait. Mais l'Inde s'intègre, rachète des sociétés européennes et américaines si elle ne s'accorde pas facilement avec ses concurrents directs la Chine et le Pakistan.

Les normalisations bilatérales de 2003 ne sont que des exemples de recherche de dialogues.

En 2030, elle aura probablement dépassé la Chine en population.

Pour les États-Unis, elle reste le partenaire potentiel dans la gestion de l'ordre global. L'océan Indien et les relations avec l'Iran sont un peu les chasses gardées de l'Inde.

entrepriseRevenons dans le secteur informatique privilégié.

De ce côté, Jacques Dutronc devrait chanter une version du genre "un million d'informaticiens indiens et moi, et moi, et moi?"

La situation évolue très rapidement.

Les rotations et les chaises musicales ont aussi démarré en Inde.

Un nettoyage à 50% du personnel dans l'année n'est pas rare désormais.

Comme partout, on joue des coudes. Une fois qualifié, avec l'expérience requise, l'ingénieur indien a des envies bien naturelles de changer d'air et de partir chercher fortune en fondant sa propre société.

L'Europe, d'abord, souvent par Londres, en premier, puisque l'anglais est la langue secondaire.

Les États-Unis pour conclure et installer son aura de manière définitive comme base de lancement finale à sa propre société, avec l'aide du réseau des compatriotes restés au pays.

Des projets à longs termes sont les plus prisés. Des possibilités d'être envoyé parfaire les formations dans les pays européens est aussi une manière de garder le sourire.

Mais, sortons de cette vision pour faire le saut dans l'autre environnement.

Un article de l'Echo attirait mon attention en 2006.

Sous une série d'articles avec pour titre générique "Ces Belges qui travaillent à l'étranger", il s'agissait, cette fois, d'un ingénieur, Daniel Mertens, envoyé par Tractebel du Groupe Suez, qui avait dû revoir sa conception de ce que pouvait être mener un projet, seul, dans l'aventure du management avec à son bord 150 ingénieurs indiens.

Son expérience m'a paru intéressante pour apporter quelques idées annexes et des impressions vues par l'autre bout et par mon expérience.

Notre ingénieur belge, lui aussi bardé de diplômes et surtout d'expériences acquises sous toutes les latitudes racontait son histoire "Au pays des maharadjas".

Il n'en était pas à son coup d'essais, trente ans d'aventures de par le monde, avouait-il.

entrepriseDonc, les histoires du terroir et de folklore, il connaissait. Les projets qui se construisaient autour des chantiers gaziers avaient toujours été sa passion et de son métier toujours entouré de gens de couleurs et de coutumes diverses.

Le Congo, Singapour et cette fois, New Delhi se succédaient dans ses pérégrinations et ses découvertes de petit belge aventureux, comme une réédition d'un Tintin moderne.

Marié lors de son passage à Singapour, il s'était fait aider, alors, par son épouse d'origine de Singapour, pour son initiation et son intégration.

Cette fois, c'était sans tuteur ou tutrice qu'il devait se caser et trouver sa niche agréable.

Six mois avaient été nécessaires pour s'adapter et trouver des marques dans ce pays haut en couleurs mais aussi aux coutumes ancestrales très parallèles aux nôtres.

Un logement à trouver, tout d'abord, mais pas n'importe lequel.

L'Inde, c'est le pays des castes en groupes héréditaires.

Le système de castes est basé sur le karma et le dharma et serait vieux de plus de 3000 ans. Actuelles, elles sont le résultat des changements sociaux en cours depuis le 19e siècle renforcés par la colonisation britannique. Les varnas sont divisés en brahmanes (prêtres), kshatriyas (guerriers), vaishyas (marchands), shudras au service des trois premières castes..

Il ne s'agissait pas de cela, même si le temps le permettait pour établir ses pénates à la belle étoile même s'il faisait chaud.

Il fallait positionner son niveau au "juste prix" et l'habitation devait resté un luxe adapté à la fonction.

L'étape suivante, c'était équiper cette maison.

Là, les choses se corsaient vraiment. Les produits "Made in India" trouvés de-ci de-là, n'avaient pas la solidité, escomptée à ses yeux, et reflétée par les étiquettes quand celles-ci existaient.

Il fallait avoir des adresses fournies par le bouche à oreille pour arriver, enfin, à trouver son environnement immédiat à la hauteur de ses ambitions et ses habitudes européennes de confort.

Dans un pays où on manque un peu de tout, les bricolages des artisans faisaient offices de « nec plus ultra ».

Se mettre au diapason était décidément une opération de haute voltige et il fallait ajuster ses ambitions en conséquence.

Le temps passait et il fallait bien entreprendre la partie de ce pourquoi il était là.

Donner des délais, établir un planning ne semblaient plus avoir la même rigueur habituellement exigée par les grands pontes des pays dits plus conformes aux normes.

Un calendrier, on connaissait mais c'était plutôt décoratif sur le mur.

Déléguer une tâche à quelqu'un n'était pas non plus une affaire d'accord entre deux personnes.

Beaucoup de deuxièmes couteaux intermédiaires étaient de la partie et les responsabilités étaient partagées sur plusieurs étages.

La cascade d'ordres allait devoir se déverser de proche en proche, de haut en bas et remonter en douceur une fois le travail effectué.

Faire le casting de son bras droit était primordial pour effectuer les vérifications intermédiaires.

Sans cette étape, les dates butoirs n'auraient qu'une raison d'être que pour établir le nombre de jours de retard.

Ce qui ne n'était évidemment pas du goût des procédures liées au secteur gazier et à la maison mère occidentale.

Alors, quant à l'horaire, il valait mieux parler d'autre chose.

Le sacro-saint weekend ne se retrouvait pas dans la charte du travail et il fallait être disponible de 9h à 21h, weekend compris, pour être sûr de faire progresser au mieux le projet.

Si le téléphone sonnait pour questionner le chef, il fallait décrocher le cornet en oubliant sa vie privée.

Cette obligation était effective par l'interne et l'externe avec les fournisseurs commerciaux.

Dans le même temps, ou en contre partie, les fêtes religieuses ou plus prosaïquement de mariages étaient nombreuses et devaient être respectées à la lettre même s'il s'agissait de 2 ou 3 jours.

Ce chef délégué sur place, venu d'un autre ailleurs, en arrivait vite à se demander s'il était payé en fonction des heures prestées.

A l'étage du dessous, on ne discutait pas un ordre venu d'en haut même pas pour donner un avis contraire justifié par une expérience de terrain.

On ne disait pas "non" par politesse et par pure déférence à son interlocuteur gradé.

On disait "oui", même si le message transmis n'avait pas été parfaitement compris.

Le savoir devait être respecté. Le chef avait ses raisons et on s'adressait à lui comme à la "bonne parole".

Le bras droit désigné avait ses prérogatives et occupait heureusement sa place d'interface dans les tâches d'intendance.

N'étant pas indien et donc sans castes, il fallait jouer les arbitres ou de paratonnerre à force de persuasions et de bonnes volontés.

Déléguer toujours les tâches qui n'avaient pas d'importances valorisantes et seulement, ces dernières, restaient le "must" réservé sous peine de perdre une place dans l'esprit hiérarchique.

L'oublier, c'était générer l'étonnement et la grogne larvée.

L'Indien voulait bien faire son travail, c'était visible.

Mais, avec le problème de culture, allait-il comprendre toujours la finalité ou se lancer dans une interprétation de ce qu'il croyait avoir compris ?

Le pardon de l'"erreur d'appréciation" du chef étranger devait ensuite être accordé de bonne grâce avec le sourire qui effaçait les pires bévues.

Le chef, lui, avait le devoir de comprendre ses troupes pour les fidéliser.

La mentalité d'un autre monde ne s'apprendrait pas comme une science ?

L'histoire ne dit pas si l'étude de l'hindi était au programme dans son travail de parachèvement du transfert d'information par la suite.

Mais s'adapter à ce genre de situation n'était-ce pas une expérience de plus à faire valoir aussi, pour plus tard, de retour sous des cieux plus pluvieux ?

Si ça coince, il sera toujours possible de se reconvertir par après, de ressortir sa baguette et de mener le grand orchestre.

Une symphonie est toujours construite avec un allegro moderato, un andante con moto.

Espérons seulement que l'allegro con fueco finale ne prenne des allures de cacophonie surréaliste.

Cela ici ou ailleurs.

Ce ne sont qu'une série de constatations et d'expériences qui devraient se retrouver dans le manuel du parfait voyageur avec la mention "Autant savoir".

Le voyageur qui souhaite la réussite de ce grand pays peut se préparer à une amère déception lors de sa visite en milieu rural.

Tirer parti de cette population là n'est pas toujours à l'ordre du jour.

Ce témoignage datait de l'année passée. Les choses changent très vite.

Alors, en attendant, il mangeait probablement du riz très épicé et il buvait du thé en silence et religieusement.

Tout est toujours une question d'habitude.

Son retour était prévu en 2007.

Aura-t-on la suite et fin de l'histoire ?

Son rêve, il l'a dit, était de retrouver les journaux à heure et à temps, un pique-nique sur la terrasse en famille, hors de l'air conditionné, faire ses emplettes au supermarché et, pour finir, bien belge, une bière, le chocolat et le "moules et frites", mais, pas ensemble, évidemment. Il faut bien cela pour se faire une nouvelle santé.

Quant à l'histoire, elle peut être complètement différente en fonction de la caste dans laquelle se trouvera votre interlocuteur indien.

Dur, dur, la vie de cornac...


 

L'enfoiré,

 

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Autre article sur le sujet  "Le nouveau géant émergent".

 

28 décembre 2012: Ratan Tata quitte le navire indien.

 


entrepriseCitations :

 

27/4/2021: La résistance vis-à-vis de la crise du Covid avait relativement réussie. Cette fois, c'est l'apocalypse
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23/4/2023: La situation de l'Inde
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Pourquoi pas une petite réflexion blague pleine d'intimité en provenance de Bangalore en anglais ? Je n'ai pas la version hindi.

DADDY! HOW WAS I BORN?

Junior asks his dad, (His dad, who is a software engineer sighs and replies),

- Ah, my son, I guess one day you would have to find out anyway ! Well, I saw your Mom and I first got together in a chat room on MSN. Then I set up a date via e-mail with your mom and we met at a cyber-cafe. We sneaked into a secluded room, where your mother agreed to a download from my hard drive. As soon as I was ready to upload, we discovered that neither one of us had used a firewall, but it was too late to hit the delete button. Six weeks later your mom sent me an instant message saying that her operating system was showing signs of unauthorized program activity from a self-extracting file which had implanted in her BIOS. Then nine months later a little Pop-Up appeared and said : You've Got Male !

 Une famille et une odyssée de Pi ?


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