Mouvements perpétuels (27/05/2006)

Les restructurations dans l'entreprise ont une histoire en boucle assez tragique orchestrée par la mondialisation à outrance. 

Préambule:

D'entrée de jeu, je dirai que les points qui vont suivre n'ont certes rien de nouveau. Nous en sommes les acteurs avec chacun son propre rôle à jouer. Pourtant qui ne voit pas les cheminements d'un processus par le menu doit s'attendre à vivre des moments pénibles. Au milieu de cet enchaînement, on ne se souvient plus du pourquoi nous en sommes arrivés là. La pièce a déjà commencé, alors montons sur les planches du carrousel. Accrochons-nous, ça va décoiffer.

Contexte international:

Difficile d'affirmer que l'OMC n'a pas ouvert la boîte de Pandore en voulant organiser le libre échange à travers le monde.

En théorie, pas de problème, que du positif, que de belles et nobles idées généreuses. Donner la chance que l'on avait soi-même pour la partager partout ailleurs ne mérite que les félicitations du jury à première vue.
En pratique, comment procéder en toute équité pour les anciens et les nouveaux dans ce club des gens biens ou de biens?

Voilà la question primordiale que quelqu'un aurait dû se poser au départ pour ne pas avoir à se creuser la cervelle aujourd'hui et devoir freiner la glissade en douceur vers la déchéance d'un côté et entrer dans une réelle augmentation du bien être de l'autre.

Le souci d'écouler sa marchandise devenue excédentaire grâce à la technologie et aux machines était à la base d'une volonté de s'étendre vers d'autres horizons. La mise en chantier de cette expansion n'a pas eu les effets désirés d'amélioration globale, mais plutôt une stagnation avec des petits soubresauts de résistance très couteux mais parfaitement inefficaces. Ne pas avoir compris les règles de base de tout accord, de tout commerce en harmonie était pour le moins dangereux.

Un commerce doit avoir dans sa charte, des règles de fair-play, de respect dans des similitudes quant à la manière de produire ce que l'on veut vendre et de le présenter à la concurrence.
Du côté des anciens, plus "stables", on s'enorgueillit de posséder des règles internes bien rodées et bien acceptées par tous et de l'autre, des challengers veulent casser le marché sans vergogne avec des lois inexistantes de protection sociale allouant un revenu au ras des pâquerettes rendant les charges quasi inexistantes. On ne joue tout simplement pas dans la même cour. Marché de dupes?
Le principe des écluses et des vases communiquant existe également dans les relations entre les hommes. Deux vases que l'on rejoint, avec l'un ayant de l'eau qui plane vers les 5 mètres et un autre dont l’eau se déplace à une altitude restreinte du mètre, il ne faut pas beaucoup d'imagination pour imaginer le résultat.
Garder l'esprit de compétitivité est plausible dans le cas d'une compétition où les niveaux de coût varient à quelques pourcents prêts. Pas beaucoup de vagues, alors. Dans le cas que nous avons vécu, il s'agit d'un déluge avec beaucoup de «noyés» au fond du bassin.

Après une histoire déjà longue de combat de revendications de salaires, de lois sociales, de recherche de bien être, la masse des populations dites "occidentales" s’était mise à espérer continuer dans la même voie des protections salariales et sociales. Mais, un changement drastique s'était opéré après cette ouverture de vannes sans filet de protection. La vie en entreprise n'était décidément plus un long fleuve tranquille.

 

Les vagues en boucles:

Des vagues successives et destructrices de l'emploi, tel un mouvement perpétuel, allaient se produire de ce côté du mur dans un ordre aux variantes peu représentatives.

• L'administration publique qui, par définition pouvait se considérer comme intouchable, a rejoint ou rejoindra progressivement les autres sociétés privées par la privatisation. Même les gouvernements ont besoin d'argent pour continuer à vivre. La vente des "bijoux de famille" a, bien entendu, ramené un peu d'oxygène aux finances publiques en mal de liquidités. Les sociétés privatisables rejoignent le privé sans trop de dégraissement de personnel en général. On ne veut pas laisser une mauvaise impression dès le début.
• Comme le privé avait des problèmes plus aigus encore de conservation du niveau des bénéfices vis-à-vis des actionnaires. Le souci de rentabilité n'en a été que plus dur.

• Pour un temps, les machines ont permis d'accroitre la production à un prix compétitif. Ensuite, les rentrées bénéficiaires d'argent se sont mises à fondre ou à ne plus suivre la production malgré ce fameux coup de pouce des machines.

• Le travail par l'introduction de l'intérim ou en provenance de sociétés spécialisées a fait son entrée dans les murs des sociétés. Rien d'anormal à cela. Un surcroit de travail justifie une initiative de ce type.

• La sous-traitance par des sociétés moins solides socialement a suivi.

• Comme le côté coût de la main d'œuvre devait être préservé au mieux pour conserver les accords avec les syndicats, la recherche de débouchés de nouvelles forces de travail devait être entreprise. Le recrutement de celles-ci s'est effectué en première instance par l'immigration en provenance des pays du Sud, Italie en premier. Cette "importation-là" s'est relativement bien déroulée, surtout qu'on en veut oublier les difficultés avec le temps, les deux partis du "contrat" étant demandeurs.

• L'importation de produits finis ou semi finis en provenance de pays moins protégés socialement est une autre étape moins appréciée. La concurrence pure et dure, tout doucement, s'est installée. Nous en profitons et nous la subissons à un moment ou un autre.

• La délocalisation des sociétés qui, avec armes et bagages, se sont installées dans des pays aux salaires moins élevés. La crise chez les travailleurs a été cette fois encore plus durement ressentie. Laissés en rade, les travailleurs se rebellent. Les sociétés en arrivent à se concurrencer elles-mêmes car elles ne parviennent plus à écouler leurs marchandises dans le pays qu'elles avaient choisi pour délocalisation de leur production. La société Inbev, par exemple, productrice de bière, annonce ce 24 janvier qu'elle va se délocaliser en Hongrie et que 360 postes auront à chercher à se recycler ailleurs. La société annonce pourtant de plantureux bénéfices (904 millions d'euros) mais cela ne correspond pas, soi-disant, aux attentes du marché. Il ne suffit plus d'être le plus puissant, être le plus rentable est encore mieux. La bière se boirait-elle avec une tasse?

Les maisons mères des sociétés privées se retrouvant à leur tour dans la tourmente à cause du coût élevé de production, n'ont plus eu qu'un ressort: diminuer ce coût par des restructurations avec diminution d'effectifs en personnel. Siemens, 3 milliards de bénéfices et 6.000 emplois en moins, Deutsche Telecom, 4 milliards de bénéfices, 32.000 emplois en moins. La rentabilité partiellement retrouvée ensuite n'offre pourtant pas une garantie de durabilité. En général, comble de cynisme, dès l'annonce d'une diminution de personnel, les cours de bourse rebondissent et repartent vers le haut. Car, bien sûr, une augmentation de bénéfice se réalise soit par une augmentation des revenus, soit par une diminution des coûts. C'est mathématique.

La gestion classique devient un louvoiement entre un besoin d'équipes fortes compétentes mais qui ne peuvent néanmoins pas devenir "un état dans l'état" et doivent donc se reconstruire en permanence en suivant le principe du "divide ut imperes".

Comme les Technologies de l'Information et les Communications (TIC, curieux le diminutif) le permettent de mieux en mieux, l'idée de garder ses meubles à domicile pouvait, comble de "bonheur", s’envisager par l’outsourcing du travail dans des endroits du monde moins à cheval sur des règles de protection salariale.

L’offshore, aussi, n'a pas mis longtemps à germer dans les esprits des financiers. Pour fournir à l'informatique la main d'œuvre nécessaire, l'Inde forme 400.000 ingénieurs par an. Là-bas, les salaires grimpent, pourtant et heureusement depuis, de 20% chaque année et le turnover s'élève de 25%. Le gap entre les salaires de l'Asie et de l'Ouest diminue donc mais ne s'équilibrera peut-être pas avant que la "machine à produire" occidentale ait baissé les bras. L'offshore n'est pourtant pas la panacée. McKinsey évalue un retour sur investissement négatif (0,86) pour chaque dollar investi par les entreprises hors du territoire national. Le différentiel entre les gains et les pertes d'emplois est bien inférieur à celui annoncé fièrement par les pouvoirs de décision. L'offshore, très rémunérateur, cela dépend donc pour qui. L'Inde, la Chine et bientôt encore d'autres se présenteront sur la liste des pourvoyeurs de main d'oeuvre à bon marché. Oui, mais, la Chine, avec son "armée de réserve" (parole d'Erik Orsenna), verra-t-elle ses salaires bien vite augmenter comme la fait la Corée, la Malaisie, Taiwan? Là, détrompons-nous. Des centaines de milliers d'habitants de l'intérieur de ce grand pays agricole se bousculent et se battent pour venir travailler à l'Est et remplacer ceux qui voudraient avoir des velléités de revendications interdites. Donc, cela va mettre du temps pour atteindre un niveau de vie dépassant les 100 euros par mois.

Alors qu’il faudrait aller de concert avec l'augmentation de la longueur de vie grâce à la médecine et avec la période active du travailleur, il faut admettre que vieillir pour le personnel informatique (ou autre) est la pire des tares. Les carrières brisées jonchent les pas de la flexibilité et de la concurrence des plus jeunes formés aux nouvelles technologiques.

•  La compétitivité de nos vieux continents n'a de cesse d'être contestée par de hauts stratèges de la finance.
• Les sociétés parlent de "paternalisme économique" pour désigner cette obligation de trouver des solutions quand il s'agit de responsabiliser les travailleurs. La compression du personnel est toujours tôt ou tard envisagée. La valeur de l'individu semble pour le moins bafouée par l'économie libérale. Le "Ni foi, ni loi" se retrouve dans le "cynisme" capitaliste des discours de la finance. La rigueur, le savoir faire, l'expertise ont tout à coup perdu de leur valeur et sont remplacés par un troc de diminution de salaire pour obtenir ou garder une place dans l'entreprise. Sur le seul secteur des hautes technologies toujours en croissance, on observe l'économie libérale qui bafoue l'individu dans sa personnalité. Etre expert n'est plus équilibré par la rétribution à la mesure de l'investissement personnel du travailleur. Pourtant, l'efficacité technique ne peut se dissocier de l'efficacité sociale.

L'augmentation des cadences dans les chaînes de montage pour compenser les pertes d'emplois, ne permet plus d'ajuster son temps à la besogne qui passe sans s'arrêter. Les "Temps modernes" de Charlie Chaplin ont fait contagion et sont sortis de l'usine pour se retrouver dans d'autres postes de travail. Faire plus avec moins, devient le leitmotiv. Nous en arrivons à un schisme des hommes. D'un côté, superman, l'homme "bionique" qui ne sait plus où donner de la tête car de nouvelles tâches laissées vacantes se sont ajoutées. De l'autre, celui qui se retrouve en jachère aux muscles atrophiés qui attend l'emploi qui ne vient pas ou plus.

Malgré des protections par l’index qui devaient être efficaces, le pouvoir d'achat a baissé sans contestation possible. Les filets de l'indexation régulée par des indices ont eu des mailles de moins en moins fines.

Le journal "L'Echo" titrait, le 13 février, un des articles : "Consolidation, le mot en vogue du début 2006".
En d'autres termes, concentration des activités au niveau européen si pas mondial.

Coups de butoirs successifs et opposés des syndicats et du management des sociétés et retour à la case départ.

Les multinationales sont perçues comme les agents moteurs de cette mondialisation. Elles se structurent en se complexifiant et en répartissant dans le monde leurs composants intégrés en suivant seul le critère de "coût".

Les acquisitions, les fusions d'entreprises sous formes d'OPA (Offre Publique d'Achat) ou d'échange OPE, caractérisées comme hostiles ou amicales, se suivent parfois touchant les mêmes entreprises à plusieurs reprises, pour supprimer toute concurrence et suppriment les redondances au niveau infrastructure en matériel, immeuble et personnel en dégraissant les postes de travail des employés et des ouvriers. Les actionnaires sauront trouver le meilleurs "compromis". Dans ce cas là, le bon vieux principe de précaution a trouvé meilleur repreneur par le principe de réalité. La vision industrielle n'a que peu de poids face à la vision financière ou aux accords syndicaux qui s'éroderont à chaque serrement de main. Cockerill, Arcelor, attaqué par le méchant raider Mittal Steel, et a pris le parti de se fiancer avec le "chevalier blanc" russe SeverStal. Dernier rebondissement, ce 25 juin, Mittal Steel offre plus dans la balance et retour à de meilleurs sentiments d'Arcelor et rupture avec dédommagements pour le russe. Le russe aurait-il été mari volage ou avide de liquidités? Rien que des changements d'étiquette? Les rachats se passent naturellement par des visites chez tous les acteurs de décision avec des sourires les mieux appuyés et les plus rassurants. On se veut tout simplement "irrésistible" en se trouvant dans une logique "actions-réactions" quitte à mettre des masques pour cacher l'avidité réciproque. Cette année, le domaine de l'électricité va certainement, lui aussi, battre des cartes de plus en plus lourdes dans ce jeu. La chasse aux gaspis est ouverte. On ne fait que dire que les sociétés n'ont pas le choix: muer par les acquisitions pour croître encore. Manger de peur d'être mangé. Les résultats au niveau social seront du "Wait and see". Dans le même temps, des "troubles fêtes" rappelle que l'autre voie est tout aussi profitable. Le "Small is beautiful" est pourtant toujours en piste et des sociétés qui ne suivent pas l'adage général, scindent leur entreprise en entités plus proches du coeur plus particulier de l'activité. En Belgique, CMB l'a fait en créant Exmar et Euronav. En France, Total avec son pôle chimique Arkema. Aux US, Unisys. if faut un salaire approuvé par les actionaires pour arriver à virer du "monde de son horizon" sans remords ! Alors, quand ce monde-là n'y est pas.

"Ma petite entreprise, ne connaît pas la crise", chante Alain Baschung. 


Conséquences de ces mouvements "boule de neige": la grogne, les démotivations, le désespoir des jeunes et des moins jeunes, les grèves et le chômage. Celles-ci n'ont pas qu'un impact au niveau de la société elle-même, mais au niveau du pays qu'elle entrave dans son fonctionnement. Le patronat dans ce genre de conflit ne comprend pas l'obstination des travailleurs à vouloir "détruire" son entreprise par le manque de décision ou parce qu'on lui empêche de prendre les "bonnes décisions" de sa préservation naturelle.
• Mais le malheur des uns fait le bonheur des autres. Il existe un type d'entreprise qui ne connait pas la crise et qui tire son épingle du jeu. Je veux parler des sociétés d'"outplacement". En Belgique, pour 2005, près de 2400 personnes licenciées ont bénéficié d'un accompagnement pour rechercher un nouvel emploi. Rédiger un CV n'est plus dans les moeurs à partir d'un certain âge. La place de ce genre de récupération des emplois augmente en moyenne de 65% et évidemment de manière plus importante dans les régions défavorisées et bizarrement moins fort au sortir dans les grandes entreprises. Dans les coulisses des fusions, les cabinets d'avocats spécialisés recrutent. Là, aussi, on ne craint pas la crise: on ne chôme pas.

 

Pensées multiples:

Etienne Davignon interrogé à la radio le 22 mars sur les fusions possibles des entreprises européennes tournant autour de l'énergie lançait que tout mouvement de ce genre doit se décider, se réaliser par et pour les actionnaires en tant que propriétaires de l'entreprise pour obtenir le meilleur projet, la meilleure valeur ajoutée, le meilleur dividende en gardant à l'oeil un "peu" de responsabilité vis-à-vis des travailleurs et l'évolution de la société. Les travailleurs n'étaient pas mentionnés parmi les acteurs effectifs dans ce qu'il appelait l'obligation de rester tous solidaires dans la difficulté. Quand à la faculté de concurrence, elle ne peut pas être verrouillée par le marché et ne pas garantir une part de marché à l'un ou l'autre des acteurs. Elle doit être garantie par le contrôle d'un "régulateur" fédéral politique en pointant les Etats et surtout le niveau européen pour éviter les monopoles. Retour au politique donc. Sans avoir nécessairement le pouvoir, il a néanmoins le droit de vérifier toutes décisions qui touchent un domaine sensible comme l'énergie avec le souci de garder la sécurité d'approvisionnement en énergie et de préserver l'environnement dans l'intérêt général. La dure loi de la concurrence et du commerce par excellence!

 

La société suédoise Ikea (Ingmar Kamprad d'Elmtaryd et d'Almühlt, du nom de son créateur et de la ferme et du village dans lequel il grandit) a sa véritable saga dans l'histoire des entreprises. Dès le début en 1955, il comprit les débouchés possibles en se fournissant à bon compte en Pologne pour ses activités de fabrication de meubles en kit. Devenu depuis l'homme le plus riche du monde (l'estimation de sa fortune personnelle atteindrait les 28 milliards de dollars en 4ème place mondiale). Ce serait instructif de connaitre la provenance des propres meubles de Monsieur Kamprad. 1 Européen sur 4 a été conçu dans un lit Ikea. "Rendre le design accessible à tous". Donc, "Votez Ikea, vive le low-cost et la mondialisation des classes moyennes". Aujourd'hui pensionné, son ex-patron n'a jamais caché ses opinions sur la question et disait: "Il n'y a que ceux qui ne dorment pas qui ne commettent pas d'erreurs. Et, seuls les médiocres passent leur temps à se justifier". A méditer. Toujours un style décallé et atypique quand, parait-il, il a toujours sa carte de réduction pour le supermarché et sa carte de senio pour les transports en commun. Il avoue, dans le même temps, qu'il espère que ses fils ne dirigeront jamais IKEA.

Certains comme Hubert Reeves vont jusqu'à penser descendre à une croissance nulle sans honte pour sauver la planète.

Le cinéma vient de primer un film sur le sujet de la mondialisation aux Césars : "Le cauchemar de Darwin". Donc, les problèmes ne sont pas à mettre dans la case des idées périmés.

 

Idées "simples" ou "simplistes"?:

Au lieu de ces mouvements perpétuellement répétés, que fallait-il faire pour se retrouver avec moins de problèmes aujourd'hui? Pas de mondialisation? Du protectionnisme? Une adaptation de stratégie?

D'après le journal l'Echo du 11 avril, le protectionnisme serait (aussi) nuisible au secteur financier de l'Union Européenne qui a une position de leader mondial.  Faute de quoi, la croissance du secteur serait amputée d'un tiers en 2020.

Le premier ministre français De Villepin le disait pourtant lors d'un passage à la télé: "Le marché est ouvert. Il doit le rester mais tout comme le font les Etats-Unis, la Chine, l'Inde, il faut cultiver en Europe un patriotisme économique et se rendre assez fort pour résister aux patriotismes des autres". Ce langage volontaire a pourtant pris très vite une courbe rentrante. Après une semaine, la polémique de départ entre les "pour" et les "contre" a subi un revirement avec un degré non négligeable. L'économie a ses raisons que la raison financière connaît très bien.

Monsieur De Villepin mettait sur la table le projet de loi d'un Contrat Première Embauches pour créer de l'emploi pour les jeunes et remettrait le contrat à durée indéterminée aux articles obsolètes qui serait la cause principale de la "paralysie des relations entre employeur et salariés". Porte de l'emploi entrouverte pour les jeunes? Porte fermée après une période bien courte après l'achèvement d'un projet. La précarité avait trouvé écho dans l'acquiescement des politiques. Le 7 mars, une manifestation d'un million de jeunes et moins jeunes défilait dans les rues de Paris. Le CPE valsait à la poubelle, poubelle que le projet n'aurait pas dû quitter.

Le 23 février, le commissaire européen, Peter Mandelson, a proposé d'instaurer des taxes anti-dumping à 19,4% du prix à l'importation, taxes qui augmenteront progressivement, sur les importations de chaussures de cuir en provenance de Chine et du Vietnam. "L'enquête de la Commission a permis de trouver des preuves avérées d'intervention publique, de dumping et de dommages à l'industrie européenne (surtout du Sud)", disait-il. Des exceptions sont malgré tout mentionnées pour les chaussures de sport ou pour enfants "dans l'intérêt des familles avec des jeunes enfants".

Jose Manuel Barroso, de son côté, essaye de modifier la mauvaise appréciation de la Commission Européenne en raclant les fonds de tiroir de l'argent alloué mais non dépensé pour accorder une aide aux victimes de la mondialisation. Sur 450 millions d'habitants, un demi-million aurait été frappé en 2005. Seulement, 50.000 entreront pourtant dans le cadre des règles strictes d'admission. Une société délocalisée dans l'Union ne l'est déjà pas en théorie. Les restructurations qui ont à voir avec la libéralisation des marchés et la course à la compétitivité n'entrent pas en compte. Après les "non" au référendum, la réconciliation n'est donc pas gagnée. La Commission Européenne a le voeu pieu de promouvoir le travail décent en une sorte de "mondialisation équitable". Poussée par les ONG, lutter contre le travail forcé et l'exploitation des enfants sont passés dans le collimateur réprobateur. La moitié de la population mondiale est privée de protections sociales et gagne moins de 2 dollars par jour. Mais la C.E. avoue que sa marge de manoeuvre est bien étroite.

La société maritime P&O anglaise possède six ports dans certaines villes des Etats-Unis. Une société arabe de Dubaï a essayé de l'acheter. Un accord de principe du président Bush au départ a vite été démenti et une opposition totale à la transaction suite aux risques concernant la sécurité du territoire. La peur du terrorisme réveillerait-elle le protectionnisme? Curieux, les paradoxes de la raison d'Etat? Sera-ce la sécurité nationale contre la mondialisation? Externaliser est encore l'alternative dans ce cas. Donc pas de triomphalisme.

En général, les sociétés en difficulté cherchent leur voie par le changement, lui aussi perpétuel. Tout bouge, même au milieu de nulle part. On n'a pas le temps d'attendre qu'un changement précédent marche ou non. Les décisions sont parfois téléguidées de bien loin. Les chaises musicales auront, elles aussi, leur mot à dire au milieu de ces carrousels improvisés. On se sait pas où on va, mais on y va. Et on est prêt à tout pour cela.

Impressions ou réalités? 

Conclusions:

Produire toujours plus est un peu contraire au principe de l'offre et la demande. Mettre plus de marchandises sur le marché fait baisser les prix alors qu'un réajustement devrait être opéré pour retrouver une profitabilité rationnelle. Un dumping de ces prix de plus en plus flagrant par des remises de plus en plus importantes en est la conclusion.

Les fonds de pension ont un rôle bien négatif dans les licenciements par leur désir d'obtenir un impossible "return on investment" de 15% sur un an, voire plus, alors que la stratégie d'une société ne peut se construire effectivement qu'après une période moyenne de 10 ans. En Belgique, ces fonds de pension représentent quelques 40% du PIB soit entre 110 et 115 milliards d'euros à investir. Cet argent n'est pas nécessairement investi localement mais mondialement et cela, même chez la concurrence. C'est dire que cette spéculation qui se retourne contre les travailleurs pendant leur vie active avec leurs salaires pourrait être mieux dirigée vers des projets de politique durable en attendant le juste retour à la pension.

Les réalités économiques sont ce qu'elles sont. Pas moyen de tourner autour. Il existe pourtant des actions à prendre pour éviter les catastrophes dans le domaine. Laisser faire le marché n'est pas nécessairement la bonne attitude.

Une prise de conscience et briser la chaîne de ces mouvements perpétuels, revenir à l'origine du "bien" ou "mal" suivant le point où l'on se place pourraient orienter la destinée de l'homme vers le rêve ou le cauchemar. De retour donc, à la Croissance zéro pour sortir de ce cercle infernal?

En attendant, tous sont pris à la gorge, le travailleur sans travail, le "middle management" qui ne peut s'affranchir de la 'ligne du parti' pris souvent entre le marteau et l'enclume, la direction, elle-même, qui doit séduire le marché et apporter des résultats à 2 chiffres, marché qui en veut toujours plus pour combler les plans de pension, ceux-ci se faisant un point d'honneur à rechercher les meilleurs rendements pour leurs assurés. Revoilà à nouveau la valse à mille temps...

Pour couronner le tout, dernier "moulin", la bourse, qui malgré des efforts consentis du côté des entreprises, va saigner de manière chaotique et sans fondement explicite les entreprises cotées sans trouver une raison de "solidarité" entre tous les acteurs.

Ce 11 mai, le journal l'Echo titrait en parlant de l'emploi en Belgique: "Un Belge sur quatre craint d'être viré dans l'année". Plus de 2 sur 3 estiment en plus qu'il serait difficile de retrouver un emploi d'un salaire comparable. (Sondage du bureau Right Management Consultants). Le dernier baromètre Manpower est assez favorable pour le 2ème trimestre. N'est-ce pas la confiance qui mène le monde?

Les jeunes en jachère ressentent aujourd'hui une impression "de ne servir à rien". Cette impression a été le résumé d'une longue enquête qui a suivi l'émission radiophonique "Quand les jeunes s'en mêlent".

Prise de conscience, débat de société par excellence ou combat d'arrière garde?

La véritable question est maintenant: "Comment consommer toujours plus dans un monde fini?". Le Club de Rome se penche sur ce problème depuis plus de trente ans sans trouver de réponse. Les sources d'énergie vont en s'épuisant, l'écologie nous rappelle que nous avons déjà dépassé un seuil qui se répercute sur le réchauffement de la planète, les dégâts à l'environnement et les catastrophes naturelles qui l'accompagnent. Alors, de nouveaux comportements à la clé? Se poser la question s'est chercher à se donner une solution pour éviter l'impasse. Consolider et économiser ses avoirs par des développements technologiques bien pensés, le contrôle de la pollution et du recyclage avec l'idée du "oil peak" dépassé en arrière plan.

Moralité: la capacité de la terre à se régénérer n'est pas infinie et même ainsi, il y a de quoi faire.


Le but de l'histoire est de se rappeler point par point du départ, de la progression et du point de chute au bout de la bataille et d'une situation de simili confort. Cette histoire n'a certes pas dit son dernier mot. Ce qu'il faut en attendre n'est pas nécessairement ce que l'on craint ni ce que l'on espère, mais peut-être une troisième voie plus fructueuse ou inattendue encore.


Mais, j'ose espérer tout simplement que ce ne sera pas « MAD MAX ».
 

"Quand ils ont viré les comptables,,
Je n’ai rien dit, je n’étais pas comptable.
Quand ils ont viré les techniciens,
Je n’ai rien dit, je n’étais pas technicien.
Quand ils ont viré les secrétaires,
Je n’ai pas protesté, Je n’étais pas secrétaire.
Quand ils ont viré 59+ et les 60+,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas encore 59+.
Puis ils m’ont viré,
Et il ne restait personne pour protester.

D’après
"Quand ils sont venus chercher les communistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher
Et il ne restait personne pour protester.
Martin Niemöller (1892-1984), pasteur protestant

L’enfoiré,



Compléments:

Ce 31 janvier, la chronique européenne signée par Anne Blanpain de la RTBF parlait de la situation européenne.
Encore une fois Hugues Le Paige, autre journaliste avait cette réflexion le « rêve général » bien dans l'actualité.


 
Citations:
 

 

Les images en mouvement

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