L'influence des médias et des réseaux sociaux (23/01/2016)

6.jpgA l'ère du numérique, quel avenir pour la presse écrite ?

Tant de sujets déjà traités sur cette antenne en tant que consommateur de médias. 

Recevoir la version du côté producteur d'informations par la radio et la télé pourrait être intéressant.

Ce 19 janvier, au Centre "Les Pléiades", j'ai assisté à une conférence dans laquelle Jean-Jacques Jespers, docteur en droit et licencié en journalisme, en parlait et répondait à des questions de consommateurs avisés des médias. 

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Voici l'enregistrement de la présentation de J.J. Jespers, suivi des questions de spectateurs : 

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Contenu résumé et commentaires de la conférence 

Tout en faisant partie de notre quotidien, les objectifs et comment les médias fonctionnent, restent méconnus. 

En théorie, les médias du secteur public apporteraient une représentation sociale et une image de la société en suscitant l'intérêt pour en obtenir un débat citoyen.

Comme un relais, ils interfèrent, en vérité, sur ce que les consommateurs doivent penser.

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Par une logique du miroir, ils sont loin d'être une fenêtre sur le monde à donner un reflet de l'actualité en apportant un retentissement maximal à ce qui "marque" dans le marché de la publicité.

De là vient une réalité biaisée dans la presse populaire devenue une industrie comme une autre depuis le 19ème siècle. 

3.jpgLa publicité couvre plus de la moitié du prix d'un journal papier et la totalité des revenus de la télé privée.

Le besoin de la finance dépasse ainsi le devoir d'informer.

La conclusion est que pour "performer", les loisirs sont plus appréciés que les valeurs d'usage et que la culture. 

Le service social pour apporter un débat démocratique et l'obligation d'être rentable construisent une dualité de fonctionnalités à l'information médiatisée.

Pour mieux faire passer les pilules, les astuces des chaînes de télé passent par les feuilletons qui apportent le suspense et tentent de maintenir le spectateur à l'écoute d'épisode en épisode.  

Une relation de connivence intervient entre les fournisseurs de programmes et les spectateurs qui sont plus attirés par le côté émotif, par le cœur et moins par le cerveau.

Si certains médias de la presse écrite sont en crise et disparaissent progressivement au bénéfice d'Internet, il faut peut-être rechercher la raison dans cette volonté de limiter sa culture comme le reste à ce qui est gratuit ou le moins cher.

C'est souvent du "faux gratuit". Le manque à gagner est compensé par la pub et celle-ci peut devenir un véritable lavage de cerveau caractérisé. 

Les thèmes porteurs tel que la violence sont les plus faciles à traiter et constituent la "tarte à la crème" pour celui qui parvient à l'introduire au moment opportun dans un débat et pour apporter une réponse jusqu'aux plébiscites des suffrages. 

Ouvrir les médias au public en le faisant participer par l'interactivité des idées via Internet est une bonne chose, mais là aussi, du côté pub, cela fait coincer les neurones.

On apprend que la gratuité d'accès à Internet pour les plus démunis est à l'étude.

Cette semaine, eux-mêmes disent que la connexion aux réseaux est plus intéressante et serait privilégiée plutôt que tous les autres moyens d'information tels que la presse écrite, le téléphone ou la télévision. Ce choix est privilégié parce qu'Internet a un champ d'investigation plus large que les autres. 

C'est peut-être là le danger : élimer les autres sources de l'information.

La pub et la propagande s'insèrent de plus en plus sur les pages de ce Net qui mérite bien sa traduction de "filet".

Chaque consommateur potentiel est soumis en moyenne à 350 spots publicitaires par jour dédiés à notre inconscient.

Ce n'est plus la presse officielle qui touche les bénéfices mais les premiers acteurs à la base du système de réseau délivrant l'information comme Google et Facebook en les filtrant.0.jpg

Une dichotomie se creuse entre l'information de qualité payante et celle qui est gratuite et moins validée par des recoupements.

Facebook et Google sont un intermédiaire qui se fait payer en fonction des clics sur ses pages et attirent plus par les atouts des pages de sport et de loisirs que par les aspects culturels. Il faut le dire, s'instruire fatigue...

Si la télé monopolise le temps des téléspectateurs belges pendant 3h50 par jour à 98% et 80% d'entre eux sont connectés sur les réseaux sociaux.

0.jpgLes infos n'y sont plus recherchées mais apportées suivant des algorithmes construits pour créer des bulles filtrantes correspondant au profil de ses utilisateurs pour ne pas les gêner. Profil très vite catégorisé pour proposer des contenus qui pourraient générer des rentrées financières à l'annonceur.

La "fortitude" d'accès à la créativité et à l'originale en est réduite d'autant.

Plus le contenu de l'information est riche, moins il est consommé parce que le consommateur veut se divertir avant de s'instruire.

La politique est présentée avec le sensationnalisme des scoops ou du buzz comme sur Internet.  

0.jpgTous les utilisateurs deviennent des journalistes en puissance. Tout le monde se vaut et plus rien ne vaut puisque l'information reste brute, sans validation puisqu'il est considéré qu'il n'y a plus rien à vérifier.

Le travail critique et de recoupements journalistiques des informations disparaît. Ce qui arrange évidemment ces grands acteurs à la source de la soi-disant information.

Plus personne n'a la dimension suffisante pour contrer ce nouveau phénomène sinon par l'entremise des entreprises citoyennes qui travaillent en "open source", non-propriétaire et généraliste comme l'est Wikipédia qui doit demander de manière cyclique une contribution pour continuer à garder une raison d'existence.

Fédérer ce qui intéresse avec de l'info réelle est mis entre parenthèses par des infos très ou trop sélectives. Si les investissements dans les communications augmentent toujours, l'information réelle diminue au niveau contenu.

2.jpgQuelques niches résistent encore ?

On été cité dans la conférence, la chaîne ARTE qui, dans un consortium franco-allemand, est considérée de qualité mais qui ne représente que 3% de l'ensemble des télés publiques.

Il y a 11 chaînes sur le territoire wallon.

Les télés locales plus proches du citoyen, comme Canal C, sont parfois plus visionnées que les chaînes publiques globales, mais ne sont pas plus à la fête.

Mardi au JT (11:38-14:20), on apprend que le financement et les mutations technologiques forcent celles-ci à demander l'aide du privé en dehors des 69% déjà octroyés par les subsides publics dans un flou artistique publicitaire.0.jpg

Le même jour (16:35-20:00), on apprend qu'un particulier "Influenceur de réseaux sociaux" prend des photos de la nature, qui, envoyées sur Instagram, lui permettent d'être engagé par des clients qui financent ses déplacements et lui permettent de s'évader dans le monde.

La légèreté, sera-t-elle la meilleure option pour trouver une solution ? 

- Le Soir contient trop de pages et devrait être scindé" dit quelqu'un dans l'assemblée en apportant de l'eau au moulin de la spécificité et du grain à moudre pour ceux qui essayent d'être généralistes en apportant une vision globale de l'information.

Est-ce que trop d'informations tue l'information ou est-ce un problème de ciblage ?

Ciblage qui est, aussi, un des points prioritaires de la publicité.

Les médias spécifiques avec une ligne éditoriale fixe résistent mieux que les médias généralistes.

Pour les médias audiovisuels traditionnels, l'audimat agit en maître absolu de la communication. Ce qui est, de suite, récupéré par les annonceurs publicitaires pour insérer leur pub dans les plages horaires adaptées pour apporter le plus d'impact à leurs clients et publicitaires.

Depuis les années 80, l'indépendance des journalistes est assurée sans étiquetage politique, donc ce n'est plus un argument valable actuellement pour expliquer la situation.

1.jpgQue reste-t-il à faire dans le futur ?

Le nombre de chaînes s'est considérablement accru pour le téléspectateur en même temps que la concurrence entre les chaînes médiatiques pour attirer les publicitaires. Donc, les satisfaire est une question de vie ou de mort pour que les chaînes publiques puissent encore produire et payer leurs productions. 

La Belgique a une situation très particulière parmi les grands producteurs d'informations.

Le côté francophone de la Belgique est approvisionné par toutes les chaînes étrangères, souvent françaises, qui ne manquent pas de capter 45% de l'intérêt des téléspectateurs.

Via le câble, les Belges connaissent, dès lors, bien mieux ce qui se passe dans la politique française que les Français de notre pays.

0.jpgSi personne ne réagit, ce ne seront plus que des ordinateurs qui écriront les articles à l'aide de données chiffrées au départ et l'intelligence artificielle.

Pour contrer les mouvements ségrégationnistes, les contrats de gestions ont dû forcer les médias à concéder des émissions moins publicitaires et accepter des exceptions culturelles et logisticiennes tout comme les émissions pour non-entendant.

Mais c'est souvent contraintes et forcées sans réelle volonté de mission.

La chaîne privée RTL-TVI présentait toutes les astuces de la publicité pour faire passer les messages: stylistes, photoshoppeur. Et comble du comble, ce sont les consommateurs, eux-mêmes, qui s'en mêlent et promeuvent les produits en devenant publicitaires, eux-mêmes, sans le vouloir.

Comme conclusion, ce serait peut-être de dire que nous sommes encore loin de comprendre l'influence que pourrait avoir le savoir sur le pouvoir et que la pub n'est pas prête à concéder le moindre espace culturel s'il ne lui rapporte rien...  

Pour changer cela, un effort initial est à donner par l'ouverture d'esprit et les habitudes aidant tout devient plus facile. 

0.jpgCette semaine, Joëlle Milquet, chargée de l'Education et de la Culture disait d'un ton péremptoire : "La presse dépasse les limites. L’«infotainment», cette nouvelle forme journalistique qui mêle information et divertissement, a conduit à quelques incidents ces dernières semaines. On est dans une totale transformation de la presse, une conversation privée peut vous être volée et diffusée ensuite à la télévision. On n’a pas à accepter ça sous prétexte que nous faisons de la politique. Il y a des limites qui sont dépassées. Je pense qu’il faudrait une réflexion sur des nouvelles règles de déontologie journalistique. ».
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Sans blague, si l'infotainment dérange le monde politique alors qu'il en profite, c'est plus fastoche qu'il n'y parait et on n'est pas sorti de l'auberge espagnole avec les "cours de rien". On crache dans la soupe, là ?

Alors si vous voulez un média non politisé, non publicitaire, je vous propose celui qu'Alex Vizorek nous a réalisé hier matin en nous parlant d'un inforoute futuriste :podcast

Pour ne pas trop se faire manipuler, en attendant que l'on communique un peu plus de savoir de personne à personne, que faire sinon "cotiser" comme le font les Chevaliers du Fiel :

Puisque la moyenne d'âge des assistants à cette conférence de J.J. Jespers était assez élevée, un petit rap, bien rythmé, me parait une occasion d'apporter une autre version, plus jeune, plus musicale et souvent pro-Internet


 

Eriofne,

 

Articles annexés: "La séduction n'est qu'un jeu" (concernant la publicité), "Les zakouskis de la télé"  (le statut de la télé), "Non, mais allô quoi, Fakebook?"

 

Citations :

28 janvier 2016 : Qualimat donne des points de fréquentation des magazines télés. 

31 janvier 2016: L'émission Décodeur a choisi le même sujet et les mêmes questions : Où se trouve l'avenir de la télé ? Des chaînes cherchent à rajeunir leur audience en poussant des vedettes vers la sortie. Est-ce suffisant pour retrouver les faveurs d'un public qui se tourne vers Internet ? Et si le web était l'avenir de la télé ? podcastpodcast

   
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2 février 2016: Mea culpa des publicitaires qui remarquent que sur Internet les retours sur investissements n'arrivent plus, bloqués par des logiciels :podcast

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