Futurologues en goguette (07/01/2009)

0.jpgLa futurologie a de plus en plus de candidats à la recherche des tendances qui vont faire le futur. Et, si on faisait le travail à l'envers? Si on faisait un travail de Sherlock Holmes à la recherche des erreurs par une comparaison entre le budget et l'actuel comme on le ferait en comptabilité?

(*)La goguette, née, vers 1820, dans des sociétés secrètes, est une pratique chansonnière consistant à placer sur un air populaire un texte propre.  

De plus en plus, Madame Soleil, grand style, est concurrencée par de nouveaux "gourous", prédicateurs ou prévisionnistes... Le futur est décidément porteur. En période de crise, c'est encore plus flagrant. Beaucoup d'esprits à la recherche d'un peu de vision sur l'avenir sont demandés. On les appelle aujourd'hui en anglais de "trendwatchers", les "à l'affût des tendances", des soi-disant "nouveautés" et des "moyens de répondre au présent".

Alors, quand il y a de la demande, il y a de l'offre. Elle devient en plus officielle et gratuite. Ce sont des interviews, des articles, des livres. Les résultats de la consultation de la boule de cristal se retrouvent dans les journaux économiques, scientifiques, informatifs... dans tous les domaines. Inflation de visions futuristes qui aident à y voir plus clair mais qui, aussi, tentent d'influencer les lecteurs dans la perte de repères de leurs ouailles. Internet est loin d'être absent dans cette mise en conformité avec la pensée dirigée. Ce n'est même plus de la pensée unique, c'est de la pensée tout azimut en controverse. S'en sortir pour débroussailler ce qu'on entend ou lit est devenu encore plus difficile dans ce dédale d'opinions. Est-ce un mal d'être averti et d'obtenir une vision d'extrapolation analytique sur l'avenir? Absolument pas à condition que cela ne cache pas un esprit plus pervers.

"La futurologie consiste à prévoir des tendances fortes qui construisent l'avenir. On parle aussi de prospectives ou en anglais de"technological forecasting". Les anglo-saxons appellent aussi les futurologues des futuristes. En fait aujourd'hui, la futurologie s'appuie sur une série de méthodes bien définies telles que : l'extrapolation linéaire, l'analyse fonctionnelle, la simulation sur ordinateur, les Delphi, les arbres de pertinence et l'usage de scénarios. Le plus souvent, on fait une combinaison de ces différentes méthodes pour arriver à mieux étudier notamment les tendances convergentes.", résumait Joël de Rosnay

En début d'année, fleurissent les plus écoutés d'entre eux.

Jacques Attali, pour ne citer que lui, n'a jamais eu autant d'audience auprès de la presse et des émissions télé de tout ordre (la preuve). Ce n'est pas trop grave de donner son avis, de répondre aux interviewers, c'est plus grave si c'est faire peur aux gens déboussolés, si donner le tournis est le but de la manœuvre sans donner de solutions éprouvées et directives à la sortie des examens. Dernièrement, sur un site citoyen, je me suis fait torpiller par un commentaire qui suivait le mien qui se voulait le plus objectif. Je communiquais ce qui était dit dans la presse vis-à-vis des événements très controversés du conflit au Moyen Orient. "La télé, c'est de la m...", était-il répondu de manière un peu moins exotique par "J’aime toujours cette suffisance bébête qui consiste à relayer 'ils l’ont dit à la télé'".

Nous sommes passés de l'exclusivité des médias à une foule de sources d'informations. Sur internet, se côtoient de nouveaux gourous mais qui, souvent, se basent sur des impressions et des intuitions tout aussi partiales. Le citoyen doit s'intéresser mais garder un esprit de plus en plus "analytique" pour se sortir d'un fossé d'opinions.

0.jpgLa confiance a été perturbée en 2008. Les situations qui se présentent et désarçonnent le citoyen. Raison de plus de chercher par soi-même où sont les vérités et les tendances du futur en analysant tout ce qui se dit dans le monde sur un sujet donné. Étudier comment les choses fonctionnent demande du temps. Des spécialistes en ont fait leur métier. Extrapoler le passé pour donner une idée du futur immédiat d'accord. Aller plus loin relève de l'affabulation.

Pour les entreprises, avoir une vision stratégique dans le court terme se révèle déjà comme un jeu d'équilibristes. Le budgété pour un an est loin de respecter ses objectifs de rentabilité et n'est là que pour rappeler le but à atteindre. La stratégie n'est même plus transmise vers les membres inférieurs de l'organisation de peur d'être ridiculisé à terme échu. Trop de paramètres manquent devant l'imprévisible. Si par hasard ou miracle, les prévisions tombaient juste, ce serait "je vous l'avais bien dit", sinon ce serait le silence radio, le blackout. Paco Rabanne, avant le passage à l'an 2000, avait rassemblé les fatalistes derrière lui. La fin du monde, rien que ça. Il s'est moins vanté de ses prédictions, par après. J'avais en son temps, jouer à ce jeu dans "Le bâton et plus beaucoup de carottes". Amusant, ce jeu de l'imagination. Un rêve de tendances mal contenues d'un auteur qui voudrait démontrer l'indémontrable, mais voulait passer un message en toile de fond.

Tirer les raisons, les tendances du passé sont déjà moins simples qu'il n'y paraît avec la lecture des documents d'époque à interpréter pour les historiens. Aucune logique. Seule des hommes face à eux-mêmes et à leur manière de pensée à un moment donné. J'ai fait l'exercice par l'intermédiaire de l'uchronie que j'avais appelé par 'un néologisme l'Alterologie (Alterologie 1) (2 (3). C'est vrai qu'il suffit de tellement peu de choses pour faire changer la face du monde.

Pour le futurologue, s'il présente une suite de scénarios pour technique avec la seule méthode objective, nous pouvons espérer mais ce n'est pas toujours le cas. On passe vite du modèle scientifique au spéculatif et à l'étalage de sa propre peur.

L'Apocalypse est pour demain. 2012 n'est-ce pas une belle année pour en finir? Alors pourquoi ne pas jouer au terroriste? Faire passer son rêve au niveau du cauchemar est devenu souvent un moyen de faire parler de soi. La population aime se faire peur. Les bonnes nouvelles ne font pas recette. Alors, la peur, cela mousse bien, ce shampoing-là.

L'écologie joue aussi dans l'effrayant amplifié par le cinéma dans le "Jour d'après". Je ne parle pas des écologistes de terrain qui eux ne font que constater et faire remonter les problèmes. Je parle de l'écologie politicienne et de l'imagination du cinéma catastrophe très rémunératrice.

0.jpgNe nous trompons pas sur notre compte: l'homme a été conçu dans l'évolution comme un prédateur et un déprédateur. Pas d'erreur, là dessus. Son intelligence a des effets secondaires notoires qui n'ont plus rien à voir avec l'instinct de la conservation de l'espèce. Les effets collatéraux au progrès sont bien réels même s'ils ont pris du champ dans la virtualité.

L'évolution et la nature restent, malgré tout, les chefs d'orchestre. Elles se chargeront de le lui rappeler, plus durement, s'il ne parvient pas à corriger le tir de ses excès. Raboter les extrêmes. Aucune fatalité là-dedans. Seul un jeu de « rollback » ou de « flowback » dans une autorégulation d'actions et réactions face à une foule de données enregistrées dans le passé.

Nous sommes dans une chaîne de vies et de morts en plusieurs chapitres. Toujours dans le même cycle parallèle de respect de l'un par rapport à l'autre. Les animaux apprennent, par le jeu, leur devenir de chasseur ou de chassé. Peut-être par le jeu vidéo. Toujours à la recherche d'un idéal parfait qui ne sera jamais atteint, ce qui fera le charme de l'inconnu à la poursuite de son salut. A nous de prouver que l'on peut passer les étapes les plus difficiles avec patience et réflexion. L'universalité d'Internet dans la confrontation des idées est un atout à condition de ne pas le polluer.

Des exemples d'erreurs magistrales d'appréciation d'un futur possible sont nombreux?

Dans les mois qui ont précédé, le pétrole est passé en quelques mois d'un prix de 150$ à celui de 40$. Spéculation? Évidemment. Mais, ce n'est pas tout. Il y a la demande qui a chuté et les stocks au zénith qui sont aussi des signes de gestion au coup par coup, soit suite à un hiver plus ou moins rigoureux, soit suite à une rationalisation des moyens.

0.jpgIl y a l'"effet Obama" qui commence à apporter ses effets. En été, l'inflation n'avait jamais été aussi forte depuis plusieurs années, elle est tombée à 1% en fin d'année. Le dollar reprend du poil de la bête par rapport à l'euro. Nos exportations européennes reprennent du coup des couleurs. La Bourse, elle-même, qui anticipe toujours, a pris le chemin inverse à la descente aux enfers.

La pollution dans les villes est trop forte, on réduit les vitesses jusqu'au moment où cela s'arrête.

L'argent n'existait plus dans les caisses des États. La crise arriva et des geysers d'argent se présentèrent comme sortis de nulle part.

Les prix baissent quand il y a une perte de pouvoir d'achat.

0.jpgNon, la peur n'est pas le meilleur moyen de faire prendre conscience de l'avenir. Il y a les réactions aux réalités et, peut-être, l'utopie que l'on oublie et qui brise aussi certaines frontières. Les réalités ont tellement besoin de l'innocence pour se motiver.

Motivé par le rêve, l'envie d'apprendre, d'appréhender les réalités en connaissance de cause, voilà peut-être les moyens d'assumer le futur. Elle ne pourra se faire que de visu dans le monde du vivant sans intermédiaires.

La nature, elle sera toujours là comme professeur, comme garde-fous ou comme ennemie si l'on n'y prend garde. Voilà, une autre manière de présenter le futur. Abdel Malik chantait "Circule Petit, circule". Aller s'informer des situations sur place et en rapporter des anecdotes qui comblent les trous des écrits officiels et des dictionnaires. Alors que ce soit de "Vu du ciel" ou du plancher des vaches, il faudra s'y intéresser. Sortir de ses frontières pour aller voir sur place dans le monde. Trop de protestataires aux événements se brûlent les ailes à la seule question "êtes-vous allé sur place pour constater et vérifier?".

Du côté des bides dans la futurologie, il y en eu dans beaucoup de domaines: les fausses espérances de l'aviation, l'éclatement du bloc soviétique, la crise d'aujourd'hui, qui même si certains en sentaient les prémices, n'en ont jamais imaginé l'ampleur. Pourquoi le futur nous intéresse tant? Pourquoi vouloir vieillir plus vite que le temps? Questions sans réponse.

Et si on prenait le temps de faire l'analyse a posteriori de certaines de ces prévisions? Comme j'ai quelques livres de futurologues de profession ou de tendance, je vais m'atteler à en retrouver les points forts et les faiblesses de leurs prédictions. Cela viendra bientôt.

Dans notre vie que l'on dit post-moderne, il faudra de plus en plus consacrer de temps au traitement de l'information analogique, celle des hommes, comme on s'est intéressé à celle du numérique avec les ordinateurs en fin du siècle dernier. Les conseilleurs ne sont toujours pas les payeurs et certainement pas en virtuel.

Car, tout est dans tout et inversement.

 

L'enfoiré,

 

Sur Agoravox, des futurolgues?

 

Citations:

 



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A regarder les télés, à écouter les radios, à lire les journaux, on se demandait, ces jours-ci, si la consommation n'était pas le surmoi des médias. Car voilà, j'ai passé deux semaines où les questions traditionnelles, du genre : « Y aura-t-il de la neige à Noël ? », furent remplacées par ces interrogations postmodernes et contemporaines que sont désormais : « La crise affectera-t-elle les cadeaux de Noël ? », « La récession aura-t-elle un impact sur les réveillons ? », « Les soldes vont-ils connaître une dépréciation ? »… Mais, au fur et à mesure, comme si l'on nous livrait des nouvelles du front, nous fûmes progressivement rassurés. Le cours de la dinde restait stable, comme celui du sapin et celui des paquets sous le sapin. Les cotillons avaient la cote, les confettis s'égaillaient, le feu d'artifice même fut de retour. Quant au premier jour des soldes, il se solda par un communiqué de victoire et pour ce qui était des séjours à la montagne, on nous fait vite savoir qu'il n'y avait plus un ski à louer ni une chambre à trouver. Nous vécûmes ainsi, 15 jours de confiance retrouvée. De sorte que l'on se demanda aussi de quel enthousiasme il nous faudrait encore faire preuve, nous autres consommateurs, pour que les médias s'en aillent dire aux bourses d'enfin rebondir et de sautiller encore. De sorte aussi que nous sortîmes de ces 15 jours passablement harassés : car ça oui, nous l'avions fait, notre boulot ! Petits porteurs de cadeaux et de cabas, sans doute, mais ouvriers qualifiés de la croissance positive, certainement. Aussi bien, nous autres qui sommes piètres économistes, voudrions avancer deux solutions qui n'en font qu'une : que les prix soient plus bas tous les jours et que ce soit fête toute l'année. Certains d'ailleurs l'ont bien compris puisque c'était hier l'Epiphanie et que c'est aussi demain. Nous aurons donc deux fois l'occasion de tirer les rois. Mais à bien y réfléchir, fêter deux fois Gaspard, Balthazar et Melchior n'est pas du luxe par ces temps bibliques. Car aujourd'hui, voyez-vous, on pense beaucoup aux Rois Mages et aux difficultés qu'ils auraient eu à choisir la bonne étoile avec toutes ces lumières dans le ciel, en terre sainte. Allez, belle année et puis aussi bonne chance." , Paul Hermant de la RTBF

 

 

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