17/07/2008
Paradoxe ou aveuglement volontaire ?
Le dimanche 13 juillet, les pays qui entourent la Méditerranée se réunissaient en grande pompe à Paris pour parler de paix et rechercher les moyens de la dépollution de ses eaux bleues. Le lendemain, fête nationale, on se congratulait encore, en groupe, pour concrétiser la réussite de leur nouvel Union.
Lors de mon précédent article sur la façon dont les étrangers appréciaient la France et ses dirigeants dans l'article "Ne m'appelez plus jamais France", j'avais déjà souligné que le rejet de la Turquie dans la grande Europe avait quelques aspects très partisans.
L'UPM, l'Union pour la Méditerranée vient de naître. Un clin d'œil pour un autre sigle, peut-être aussi, dans la coïncidence des lettres. Gestation difficile à la base de cette réunion prévue, depuis un an et demi, dans les six mois de la présidence française de l'UE. L'Europe, on veut la faire mais on n'en est maître que pendant ces six petits mois. L'UE n'est pas le bébé de la France.
Cette fois, chassons le naturel et essayons de ne pas le faire revenir au galop avec des idées paradoxales.
On inventait la roue de la fortune. Forcément, on en oubliait l'Allemagne. Celle-ci n'a pas de côtes communes avec la mer, géographiquement. Elle s'insurgeait, politiquement. Il fallait, dès lors, revoir sa copie et accorder le ticket d'entrée à beaucoup d'autres voisins. C'était radical même, on faisait un bond de 24 à 43 membres potentiels à mettre autour d'une table: 27 de la CE et tous les autres méditerranéens. La Méditerranée était devenue la mer euro-africo-asiatique. Personne n'était d'ailleurs pas vraiment content.
Mais la Turquie, elle, était bien là dans le "jeu de quilles". C'est un grand pays qui borde justement la Grande Bleue. Y a pas photo. Elle espérait donc jouer le rôle qu'on lui refuse dans d'autres réunions où l'interlocuteur français fait des pieds et des mains pour ne pas devoir absorber ses citoyens par l'immigration et d'avoir aussi son mot à dire chez les Grands. Donc pas moyen de la sauter et ignorer la géographie uniquement pour raison politique. Deux poids, deux mesures et deux pensées sans vases communicants. Naturellement, on a dit d'entrée de jeu : "le nouveau partenariat euro-méditerranéen et l'adhésion turque à l'UE étaient deux questions tout à fait distinctes". Les Arabes, eux, subodoraient un substitut à la politique arabe en France. L'Espagne et l'Italie y voyaient un certain chauvinisme solitaire à la "française" alors que ces deux pays se voyaient avoir des intérêts considérables. Ce 13 juillet, le président Sarkozy invitait, donc, quarante chefs d'Etats et de gouvernements qui entourent la Méditerranée directement ou non.Seul la Libye se snobe, elle-même: "un champ de mines, cette conférence" qui serait préjudiciable à l'unité arabe, est-il évalué par les libyens.Pour cette occasion, on a mis Paris en bouteille et les petits plats dans les grands. Les sourires auront été de la partie, "obligatoirement", au besoin avec des sourires coincés. La réconciliation planifiée ne pouvait que susciter la paix comme cerise sur le gâteau d'une intention de paix future.Les ennemis de toujours se retrouvaient à la même table des négociations. Tout était pour le mieux. En apparence. Le dirigeant palestinien Mahmoud Abbas, très fragile électoralement, chez lui, rencontrait l'israélien Ehud Olmert, avec quelques casseroles au pied avec la justice de son pays.Il fallait rouvrir toutes les portes de l'édifice de la colombe. Point. Et cela semble avoir marché pour les photos souvenirs.La paix en a, effet, un grand besoin. Était-ce par ce biais qu'il fallait approcher le problème? Prenait-on les bons invités à bord? N'était-ce pas une autre autorité plus désignée par son expérience cinquantenaire pour jauger la bonne technique? Des questions dignes d'Harakiri "Bêtes et méchantes".
La Grande Bleue, elle, n'en revient pas. On allait s'occuper d'elle avec sa dépollution en prime.
On veut drainer cette mer qui est devenue une poubelle par nos pollutions tout en rechignant, dans un ailleurs moins conciliant, de ne plus pouvoir pécher le thon rouge. L'énergie solaire a aussi, tout à coup, pris du gallon.
Monsieur José Barroso, président de la UE, était invité. Avait-il été là pour établir un budget à cette nouvelle entreprise? Personne n'a osé toucher un mot sur ce point.
La présence de Bachar el Assad, président Syrien, a même ravivé des souvenirs douloureux dans les rangs des militaires français. Son interview sur France2 a aussi refroidi les ardeurs françaises. Il rappelait qu'il faudra attendre, au moins, le changement de présidence aux États-Unis pour espérer vraiment un processus de paix.
"Impossible n'est pas français" disait Napoléon.
Il avait probablement oublié d'ajouter que tout dépendait de celui qui tient la baguette.
Être chef d'orchestre n'est ce pas le plus beau métier du monde, surtout avec le zéphyr du dialogue "sous le soleil exactement"?
Sous son ardeur, on se soûle très vite. On en devient facilement "pompette", dirait-on, chez moi. L'ambiance Club Med avec ses JO.
Une phrase qui terminait un article du journal l'Echo m'avait interpellé en parlant de l'UPM: "C'est une heureuse initiative qui doit se fonder sur l'égalité, la proximité et le respect: après tout, la Méditerranée est trop étroite pour séparer et trop large pour confondre".
En réfléchissant, je ne sais pourquoi, cela me faisait penser à la tectonique des plaques de la Méditerranée? Mais, alors là, c'est long, très long.
Si, en attendant, si on chantait un petit karaoké avec Tino Rossi relooké ou futuriste.
Par rapport à la Brabançonne de notre ex-premier ministre, ce ne serait pas plus mal, chez nous, pour le 21 juillet, lors de la fête nationale belge.
C'est une question de choix à laquelle, je n'ai aucune réponse à l'heure où j'ai écrit cet article.
Dans ce cas précis, il s'agit vraiment d'un aveuglement involontaire.
L'enfoiré,
Citations:
-
« La paix, si jamais elle existe, ne reposera pas sur la crainte de la guerre mais sur l'amour de la paix. », Julien Benda
-
« Pour faire la paix, il faut être deux : soi-même et le voisin d'en face. », Aristide Briand
-
« La Méditerranée est une sorte de Gange, où les nombrils vont en pèlerinage. », Frédéric Dard
Publié dans Actualité, Europe, Inclassable & People | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
Les commentaires sont fermés.