09/02/2021
La thérapie psychologique de Abdel
Suite à la présentation de la série "En thérapie".
"Installez-vous, la séance commence" était-il dit.
Jeudi dernier, la série "En thérapie" a commencé à la télé sur ARTE en présentant les quatre patients du psychanalyste, Philippe Dayan, dans un cabinet de psychanalyse du 11e arrondissement de Paris. Cela s'est terminé par Philippe, lui-même, chez Ester, son amie et ancienne psy.
Sur le site internet de ARTE, tous les 35 épisodes de la série sont accessibles, présentés du début à la fin.
Avec ce premier billet, je présente du début à la fin de sa thérapie, le patient, Abdel Chibane, un policier à la BRI, premier impacté par l'attentat du Bataclan.
C'est aussi un moment pour réfléchir au rôle du flic et aux risques qu'il encourt dans son métier...
(chaque épisode est visible en cliquant sur les dates des épisodes)
Abdel Chibane
17 novembre 2015: Adel était dans l’équipe d’intervention qui est entrée dans le Bataclan le soir du 13 novembre. Depuis, il a des symptômes de stress qu’il ne s’explique pas. Il prend contact avec Dayan, plein de réserves et de méfiance. Première question: "Il y a des règles?". Il a enquêté sur le psy avant de venir. Il a des troubles du sommeil pour que cela ne se reproduise pas.
24 novembre 2015: Adel est revenu plus cool. Mais il a beau s’être renseigné sur les compétences de Philippe, il se montre réfractaire aux principes de la thérapie et au travail de l'intérieur de soi alors que l'extérieur est dangereux. Lors d'une nouvelle intervention chez des salafistes, il veut tout maîtriser, et pourtant, les angoisses sont là suites aux racontars de médias et de la politique. Il se sent mal après qu'on lui dise "traître". Dans ces cas, le côté humain disparait au bénéfice du chien ou de l'oiseau. Il est là pour parler de son épouse qui est souvent fatiguée et contrariée par son job. Philippe tente petit à petit de gagner sa confiance et de trouver comment le rassurer en le poussant à remonter dans son enfance et une famille en Algérie et en parlant de Freud.
1 décembre 2015: D’un air inhabituellement enjoué, Adel raconte à Philippe sa rencontre, un jour plus tôt, avec Ariane qui est aussi la patiente de Philippe et qui lui plait. Une psy a contacté le groupe de Adel sans apporter de résultat probant sur la méthode groupée. Il a quitté son épouse sans parler avec elle et est allé chez son père avec son fils, informaticien, qu'il considère intelligent. Du respect, du silence partagé mais jamais des paroles c'amour. L’invitant à faire le lien entre son couple qui dysfonctionne et celui de ses parents, Philippe le ramène à ses propres tourments. Troublé, Adel lui parle d’une photo retrouvée chez son père, ancien boulanger qui reste silencieux. Il profite pour lui demander ce qu’il pense d’Ariane qu'il trouve très ouverte d'esprit.
8 décembre 2015: Imaginant les revenus de Philippe, Adel s’indigne de la modestie de son propre salaire, qu’il juge dérisoire au regard des risques de son métier alors que les criminels sont relâchés à cause de la lourdeur des lois. Une opération dans laquelle des terroristes arabes ont pris de otages. A cause du stress, il y a eu une hallucination par l'odeur du sang des victimes. Après un entraînement très violent, ses angoisses sont réapparues pendant sa soirée avec Ariane pendant laquelle il s'est ressenti comme le chassé alors qu'Ariane est plus délurée que lui. En mal de liberté, être jouet vis-à-vis des femmes, de l'autorité, de son père, crée une révolte contre ceux qui assignent des règles qu'il ne peut assumer. Philippe pense qu’Ariane n’est qu’une distraction pour Adel, qui dans le brouillard, l’éloigne du vrai problème et qui le dirige vers une explosion personnelle. Il est décidé à comprendre ce que la photo retrouvée chez son père cristallise en lui comme souvenir d'Algérie.
15 décembre 2015: Adel annonce d’emblée qu'il a rompu avec Ariane. Il pense avoir repris les rênes alors que c'est elle qui reste décider de l'avenir. Dans une bouffée de colère,, il convaincu qu’elle est manipulée par Philippe qui agit comme une araignée en spectateur alors que lui est dans l'action. Il dévoile à Philippe tout ce qu’il a découvert à son propos : sa fille, son père en Ehpad, sa femme qui le trompe… Inconsciemment, il cherche à influencer Philippe à son image qui sert à quelque chose alors que sa vie est sans joie. Philippe avoue qu'il a ses problèmes personnels et minables mais il ne méprise pas les autres comme Adel qui en souffre par une violence première. Il parvient à l’apaiser et tente de l'aider à se remémorer l’Algérie, mais il est touché par cet interview quand son épouse rentre.
22 décembre 2015: Adel revient pour apporter des excuses d'avoir tenté d'avoir transmis sa peur et sa haine. Il trouve enfin le courage de raconter l’événement traumatisant qu’il a vécu en Algérie quand il était enfant. Tous morts à la suite d'une attaque du GIA. L'événement, il l'avait refoulé de sa mémoire mêlé de nostalgies heureuses et malheureuses. Depuis, son père vit dans le silence. Le fantasme de Adel le pousse à penser que c'est lui l'ennemi donc une preuve actuelle de sa simulation dans les forces de l'ordre. Alors qu’il avance considérablement dans sa thérapie, se sentant coupable. Impulsif, il s’apprête à se retirer, à prendre quelques mois sabbatiques et à partir en Syrie pour s'attaquer au terrorisme. Le caractère autodestructeur dans sa fuite ne fait aucun doute pour Philippe, qui tente de l’alerter.
4 janvier 2016: Avec le père d’Adel, Mohammed Chibane, la conversation prend un tournant accusateur. Il vient tenter de comprendre ce qui a poussé son fils à consulter et à partir en Syrie où il est mort. Il l'a aimé mais, d'après lui, Adel avait trop d'espoir pour réparer ce qui est cassé dans le monde. Il voulait être un héros. C'est au tour de son père de briser le silence du passé au sujet du traumatisme en Algérie qu'ils ont connu ensemble, devenus par la force des choses, des émigrés en France. Il se sent coupable d'avoir laissé mourir une partie de sa famille en Algérie et de ne pas avoir parlé, de ne pas lui avoir dit qu'il l'aimait. Il accuse Philippe de ne pas l'avoir aidé et de l'avoir envoyé vers sa mort.
Commentaires
Reda Kaleb définit son rôle lui-même dans un portrait "Chibane":
"Sur les attentats de 2015, j’ai regardé des documentaires, rencontré des témoins. On a tous, à travers cet événement de notre histoire collective, vécu quelque chose d’intime. Je crois que les spectateurs vont naturellement trouver des échos dans les personnages de cette série. Il m’a fallu trouver ma propre respiration dans la partition du texte, pour le délivrer de manière vécue. Comme au théâtre, les choses devaient naître de la seule puissance du verbe et de l’imaginaire." Reda Kateb.
Dès l'entrée d'Abdel lors de la première visite chez Philippe, on pourrait dire que c'est la caricature d'une "grande gueule" poussée par l'adrénaline dans un effet tunnel à la vue d'une cible objectivée.
En tant que chef de groupe de la BRI, il se voit un peu comme un flic "Rambo", entrainé dans l'urgence pour le job qui consiste à secourir la population dans n'importe quelle situation de crise avec tous les aléas que cela peut comporter. Il ne peut y avoir de sentiments ni positifs ni négatifs et encore moins de sentimentalisme. Le protocole du flic face à la population est que celle-ci est en droit d'avoir un refuge par les soins de la police.
Autour de lui, on l'appelle "Hercule", le protecteur alors qu'à cause de la sollicitation de son job, sa sensibilité intérieure est en contradiction avec la violence extérieure qu'il connait.
Traumatisé par ce qu'il a vécu lors de l'attentat et il ne se sent pas devoir en parler à son épouse pour ne pas l'inquiéter.
La discipline voulue par ses supérieurs accentue la pression généralisée.
Selon l'analyse de Philippe, ce flic a une crise d'angoisse.
Abdel consulte Philippe pour exprimer sa honte de guerrier derrière laquelle se cache son équipement vestimentaire, blindé et donc considéré comme invulnérable.
En poursuivant sa thérapie, on apprend son enfance et la faille de la cuirasse: sa peur vis-à-vis de son père dans une ambiance familiale où il était de mauvais ton de prendre la parole.
Si plus âgé, ses quatre vérités se terminent en disputes contre les harcèlements intelligents qu'il ressent. Mais c'est déjà plié.
En finale, malgré l'intervention de Philippe, il a trouvé son point d'incandescence dans un déraillement et la mort pour défendre une cause qui n'est pas la sienne.
Les non-dits et l'inconscient au travail sont les raisons de cette situation de son drame de conscience personnel.
Au dernier épisode, c'est son père qui reprend le flambeau des accusations dans des transferts de leur colère, de leurs peurs et de leurs désirs inconscients sur autrui ou un autre objet.
C'est vrai, dans le monde, rien n'est totalement clean.
Il existe des flics qui extrapolent leurs prérogatives et dépassent leurs droits par une autorité personnelle garantie par les privilèges octroyés d'avoir des armes dans leur fonction. C'est lors de ces erreurs de parcours que leurs chefs se doivent d'intervenir pour éradiquer des velléités outrageuses et pas en les poussant dans leurs derniers retranchements.
Dans leur fonction de maintien de l'ordre, les flics deviennent des cibles intermédiaires aux mécontentements de la foule. poussées dans le dos par leurs autorités. La caméra qui filme leurs actions n'est pas plus aimée. Les médias se retrouvent aussi rejetés par les manifestants.
Dans la virtualité, les réseaux sociaux orchestrent les réactions instinctives de la population et n'hésitent pas à présenter leurs propres problèmes psychologiques.
Dans les réalités qui ont suivi les attentats de 2015, les flics ont été soutenus par la population comme le chante Renaud ci-dessous.
Lors des épisodes des Gilets jaunes, renversement de la situation.
Suite au Covid, les manifestations récentes au sujet des limitations de liberté sont un nouvel épisode où les responsabilités ne se trouvent ni dans les mains des flics ni sous la plume des médias, ni dans la population. Le responsable est viral et c'est d'autant plus insidieux.
La semaine prochaine, Ariane dont Adel a déjà parlé dans cet épisode...
Allusion
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Commentaires
Un petit cactus sur l'ouverture de l'HoReCa
https://www.rtbf.be/auvio/detail_le-cactus-vers-un-reouverture-de-l-horeca?id=2734122
et le brouillon de culture de GuiHome
http://vanrinsg.hautetfort.com/media/01/00/2433558151.mp3
Écrit par : Allusion | 09/02/2021
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https://www.rtbf.be/auvio/detail_le-cactus-vers-un-reouverture-de-l-horeca?id=2734122
Écrit par : Allusion | 09/02/2021
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