28/04/2009
Sucer mais pas avaler (2)
Dans mon article précédent, je passais en survol les élections en Inde, celles d'Afrique du Sud. Pour finir par les accommoder à la mode de chez nous. Prolongeons-la cette mode.
Pourquoi ne pas commencer par une petite prière païenne avec les vues à l'occidental et les paroles modifiées, rimant avec un "Notre Père"?
Patrons du monde qui êtes aux mieux,
que vos noms soient honorés,
que vos sanctions ne nous viennent,
que vos volontés soient faites
au bureau et à l'usine pour le miel
Donnez-nous aujourd'hui
nos gadgets au quotidien
pardonnez-nous nos dépenses,
comme nous pardonnons aussi
vos excès qui nous ont souvent effrayés.
Et ne nous soumettez pas à l'imitation,
mais délivrez-nous du râle
car c'est à vous qu'appartiennent
les règles, la puissance et la gloire,
nous garderons seulement les miettes des crisettes
pour des siècles et des siècles.
Pourquoi une prière, puisque je n'y crois pas aux résultats de ses bons offices? Même si c'était le cas, le pouvoir spirituel du Vatican achèverait le processus, en déconcertant et désorientant ses ouailles, cette année.
Vers quoi se rassurer? Vers quel horizon regarder? Il y a des moments d'espoir pour les uns, d'espérance pour les autres, des sursauts pour rassurer qui viennent s'insérer dans les moments de désarrois, mais ils sont devenus tellement furtifs. Le mot "crise" est sur toutes les lèvres. Après le pouvoir d'achat, les banques, les finances, voilà la politique qui se cherche de nouveaux leaders dans le monde mais qui ne rassurent pas par leurs techniques de racolage. Le populisme, le plus primaire, est de la partie en politique mais aussi ailleurs.
Les Amériques sous l'ère Obama, c'est incontestablement différent. Un peu d'air frais, en apparence. Il se veut plus mondialiste que ne l'a été ses prédécesseurs et appelle les autres à jouer dans la même cours de jeu.
L'Obamamania est née. Elle se targue de réformer la vie américaine par ses actions et initiatives et par retour de flamme pour le reste du monde. Cent jours depuis sont installation à la Maison Blanche.
Ne pas décevoir est devenu la crainte principale. Les faux pas ne vont pas manquer, c'est planifié, il y a déjà eu des précédents. Obama déclarait ses revenus au fisc, pas plus saint que les autres de ce côté. Le supplément d'impôts puisés dans la poche des plus riches n'a pas l'heur de leur plaire. Air solide plutôt que solidaires.
Ce 15 avril, le symbole des Révoltés de Boston Tea Party en 1773 reprenait ses fonctions réactives dans les mémoires des Républicains à en avoir une indigestion de thé.
Il faut rappeler que seuls les tarifs douaniers sur les importations et les impôts indirects étaient les seuls moyens pour contribuer à la gestion des États jusqu'en 1862. En 1943, seulement, les taxes seront pompées à la source par décision politique. Un minimum de 10% et un plafond de 35% de taxes sur les revenus explicitent mieux les lois sociales au plancher. G.W.Bush était allé dans l'autre sens en 2001 et en 2003 pour se conforter auprès des Républicains. Solidarité de façade, donc.
« Grâce à Obama, les ventes d'armes s'envolent », lit-on, même s'il est reconnu comme le plus anti-armes. La délinquance fait peur et tant que le 5ème amendement le permet, l'américain se prépare. Ailleurs, il fait ses paquets et l'Irak attend le départ. Obama est souvent pris de vitesse devant l'ampleur de sa tâche. L'extrémisme du KKK, l'apartheid à l'américaine existent toujours à bord sous le couvert d'un Dieu de vengeance plutôt que de paix. Le Texas, l'État à l'étoile solitaire, songe même à prendre son indépendance car si les États-Unis représentent la nouvelle Europe, ils ne sont unis que par la langue et encore. On n'y aime pas trop que l'on vienne dire ce qu'il faut faire. Alors, parfois, on raccroche d'autres wagons quand les roues tiennent les rails.
D'ailleurs, y a-t-il tellement de différences entre la vision américaine et européenne? Historiquement, le nouveau monde est le fils de l'autre.
Le président Jacques Chirac avait sa technique que certains regrettent déjà. Lui, c'était la forme sans trop de réformes.
Le président Nicolas Sarkozy, lui, ce sont les réformes, mais perd la forme pour les réaliser. Il en perd son américanisme qui avait des fondamentaux sécuritaires dans la Bushmania, mais, tout en gardant un regard européen en courbe rentrante trop rétrécie sur la France d'avant. Mais, parfois, il y a des rebelles à ce genre de politique, chez les plus petits, qui ne regardent pas avec les yeux plus gros que le ventre.
Là bas, dans ce petit pays, en haut, on ose dire que "La Belgique va connaître sa pire récession depuis 1945", dans la gazette du jour en Belgique. Les restructurations sont programmées dans les sociétés. On le sait et on s'adapte, on fait des réserves. On sait qu'on est entré en phase de récession. Pas de secrets de fabrication. Neuf sur dix sont prêts à changer leurs habitudes, au risque d'arrêter une machine pour en lancer une autre du moment que cela fait avancer.
La nouvelle Europe en manque d'europlanisme, mais surtout d'unité pour prendre le relais et avoir une droit de réponse d'égal à égal avec les autres blocs d'influence. Voilà, qu'on trouve une initiative originale "Le bulletin de vos eurodéputés". On avait déjà entendu cela, il y a un an pour l'équipe de Sarkozy, tout en se rappelant qu'il ne faisait pas partie du "jeu".
Un coup dans l'eau ou seulement de l'eau dans le vin?
Parmi les pays démocratiques, il ne faut pas croire qu'il y ait une solidarité de bon aloi. Les sourires et les serrements de mains ne sont que pure façade pour ne pas paraître trop désunis. Les systèmes sont totalement différents. Ce n'est pas qu'une question de pluralisme des langues. Les "charismes" d'Obama et Sarkozy ne sont, par exemple, pas sur la même longueur d'onde. Beaucoup de différents comme la vision du premier, affichée mondialiste, son espoir de désarmement atomique progressif et l'adhésion de la Turquie. Sarkozy dans le ranch d'Obama l'été prochain, c'est râpé. L'ère Bush n'est déjà qu'un lointain souvenir.
Un clash entre Obama et Netanyahou n'est pas exclu non plus. Les juifs ne s'y retrouvent plus. Obama pourrait même faire jouer sa grande popularité tout neuve et faire appel aux opinions des pays, dits démocratique. Là, Sarkozy va pas aimer du tout.
Et, oui, tout évolue. D'americanophile, Sarko pourrait bien virer vers l'americanophobie à l'ombre du tableau noir de ses nuits blanches.
Même le populisme a ses limites que l'on retrouve dans la majorité des populations. "Les chants désespérés sont les chants les plus beaux", écrivait Musset. Il faudra seulement voir où ils le sont vraiment.
Alors, il y a l'"autre monde", le troisième. Celui qui pense autrement et qui veut avoir aussi ses mots à dire. A la conférence de l'ONU contre le racisme « Durban II », Ahmadinejad a fait scandale auprès des Européens. Ce n'était pas politiquement correct dans la diplomatie d'afficher des idées tellement à contre courant. Racismes contre obscurantismes et vice versa. Incompatibilité totale de vision du monde. L'occident est en recul au profit d'un orient qui lui fait peur.
Le syndrome lié au NIMBY (Not In My Back Yard) y est certainement pour quelque chose.
Ce qui veut dire en des mots moins modernes "garder les moyens de sa politique et la politique de ses moyens".
Il aura aussi ses élections en Iran en juin. Son président est revenu chez lui en libérateur, en porte parole de ce que les autres pensent tout bas. Devrait-il y avoir des devoirs de réserve vis-à-vis de son peuple ou de ses alter ego ou simplement montrer un héros lors de sa rentrée au pays? Relativiser ses propos? Pour quel résultats? Pour une régression de l'humain terrestre au bénéfice de l'hypothétique homme de l'au-delà?
Relativiser ne veut pas dire s'exclure et se taire avec la technique du "courage, fuyons". La sortie, sans un mot des Européens lors de la Conférence de l'ONU sur le racisme, équivaut à un vote nul que l'on ne comptabilisera jamais. Ce qui veut dire, en définitive, renoncer à ses prérogatives. Mais, on a voulu sauver les meubles et une Déclaration finale sur le racisme a été adoptée. Les Droits de l'Homme régressent car l'Occident a donné des verges pour se faire battre.
ARTE programmait, le 21 avril, un Thema sur "La bataille des Droits de l'Homme". On y voyait de plus près ce qui se passe dans l'enceinte de l'ONU pour y remarquer que la démocratie et les Droits de l'Homme ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes. Ses représentants étaient vite agressés pour des raisons d'Ordre du Jour puisque cela contrariait la Chine. Ce pays qui monte, mais sans droits à la parole. Dieu s'invitait et prenait une place plus importante que celle de l'homme comme si c'était les Droits de Dieu qui étaient au programme.
Le débat, ensuite, entre Kohn Bendit et l'ambassadeur de France, se jouait après le film, en flip flop, dans une démonstration de ce qui devrait être, en théorie, et de ce qui existe, dans la pratique. Les concessions faites sont, en effet, très diplomatiques mais dégradantes pour celui qui en abusent ou les organisent. L'Homme est une entité responsable dans tous les cas ou se verra toujours contré par ses propres défauts. Il n'y a pas de volet "Droits" sans celui des "Devoirs et du respects de ses propres principes". Voilà un problème de démocratie majeur.
Sans prendre ces précautions, la Charia, antagoniste aux Droits de l'Homme, fera, un jour, partie des Droits de l'Homme, mais toutes les religions ne sont pas mieux "synchros" avec tous les articles de la charte qui en est à sa 4ème génération. Alors, on oubliera certains de ses principes fondamentaux de valeurs alors qu'ils étaient signés d'emblée à l'origine du traité à l'ONU.
Un article Jacques Julliards dans Nouvel Obs osait titrer "Les faussaires des droits de l'homme".
"En détournant vers les communautés et les religions les droits reconnus aux individus, les individus de la démocratie ont remporté une triste victoire sur l'Occident. Les droits de l'homme, fruits de la victoire des démocraties sur les fascismes (1948) sont devenus une arme de guerre entre les nations par une rhétorique d'ethnologisme. L'antiracisme, devenu la vache sacrée du monde contemporain pour constituer in délit de diffamation des religions, qui est l'un des monuments les plus stupéfiants que la tartuferie moderne ait élevé à l'esprit d'oppression.", affirmait-il.
Beaucoup ont eu énormément d'espoir dans les changements avec les derniers JO qui devaient se dérouler à Pékin. Les espoirs commerciaux n'ont même pas tenu leurs promesses quand l'avenir est plus gris. Alors, les Droits de l'Homme... il vaut mieux passer au sujet suivant.
Aux dernières nouvelles "Les actions chinoises sont en passe de créer une bulle" dans l'Echo. Changer là-bas est aussi en gardant le cap d'avant. Le PIB à 6,1% est au plus bas depuis 10 ans. 530 milliards d'euros ont été injectés dans un plan de redressement pour stabiliser l'immobilier et les actions. Effet inverse à ce qui était escompté, la hausse des cours qui devrait correspondre aux valeurs dépasse les fondamentaux et l'indice du PER est passé de 12,8 à 21,6. Le Dragon chinois en avalerait sa queue.
Voilà qu'une histoire d'un autre temps qui revient dans l'actualité: la piraterie en Somalie. Un autre clash de civilisations, de cultures et de religions. Mais, on planche, parait-il, à Bruxelles. Une autre forme de politiquement incorrect, pour des yeux trop rivés à l'occidental qui réagissent par instinct dans un clignement réprobateur. On oublie ce qui se cache derrière cette Somalie qui a retrouvé le temps sans foi ni loi sans véritable gouvernement avec Mad Max comme leitmotiv.
N'est-ce pas plutôt de corsaires plutôt que de pirates dont la Somalie aurait eu besoin? Eux au moins agissaient sous le couvert d'un drapeau et pour le bénéfice d'un pays. Mais, le gouvernement y est inexistant ou inefficace.
Non, après cet inventaire d'événements qui se chevauchent en cascade et dans le désordre, on peut se poser la question: "Est-ce normal, ce grand chambardement, cette crise qui ne fait que suivre, avec plus de virulence, la précédente et qui tire dans tous les sens?". Tout n'a-t-il pas fait son possible pour que cela se passe mieux, pourtant? La politique aurait-elle des trous de mémoire ou pris des aiguillages mal contrôlés?
Jean Ziegler dans son livre « La haine de l'Occident » tentait d'expliquer le phénomène de rejet de la part des pays du Sud ou de l'Orient. Comment ne pas penser à la soumission du reste du monde quand il a connu une domination meurtrière? Comment conduire l'Occident à assumer ses responsabilités et récuser les injustices qui sont commises au nom de l'État de droit? Véritable contradiction entre démographie et pouvoir qui se donnent mutuellement des leçons de morales contre des leçons de religion comme s'il n'y avait pas, au milieu, la conscience de l'homme par lui-même et pour lui-même? La dilution des responsabilités aurait-elle fait des dégâts irréversibles? La pratique dément les valeurs qu'elles proclament et cela se termine par une bataille entre dieux de l'Occident et de l'Orient. Pour étayer les deux visions, il y a les promesses du direct pour les uns, contre celles des autres, en différé, dans un bal qui en perd le Nord et le Sud. N'est-il plus de règle d'assurer sa paix en soignant celle de son ennemi? Les Droits de l'Homme sont universels, rappelons-le.
Parler de révolution en pensant au passé est totalement illusoire dans ces résultats. On s'en rend compte mais on se questionne tout azimut. On ne refait pas l'histoire, on la complète seulement. Le passé est ce qu'il a été. Aller contre le futur est toujours rétrograde et contre productif en finale et ce futur ne sera que ce que nous en faisons aujourd'hui. Il se construit par l'évolution des événements dans une suite ininterrompue de créations sans débuts et sans fins. On ne fait que s'adapter vaille que vaille aux circonstances.
On s'adapte encore, chez nous. Désormais, on ne parle plus dans notre langage de « discrimination positive », mais d'« encadrement différencié ». C'est plus proactif même si c'est la même chose avec d'autres mots. Évolutions des idées sans révolutions, vous disais-je.
Les élections européennes et régionales auront aussi leurs bons ou mauvais mots à dire ou à ajouter sur ce sujet comme à d'autres. Le tour de l'Europe à exprimer ses envies. Mascarade électorale? Comme disent certains.
Mais, qu'est ce qui fait le bonheur du citoyen dans une démocratie? Qu'est ce qui l'inquiète ou peut l'enthousiasmer cet électeur tellement capricieux en occident? Répondre à cela relève de la quadrature du cercle. Le bien de l'un ne fait pas celui de l'autre. On ne s'écoute plus pour se répondre, on se coupe par d'autres arguments en laissant l'interlocuteur sur sa faim d'interactivités.
La politique est, sans conteste, un sujet très personnel, partial même. On n'ose pas en parler dans une conversation qui n'aurait pas été constitué dans ce cadre. Pas un parti, ni un homme ne pourrait trouver "la" réponse en commun. Sera-ce "Au diable les partis" ou faudrait-il rechercher comment réconcilier le citoyen avec ses dirigeants? Quelle est l'origine de cette hargne et de ces dissensions entre les candidats qui savent qu'ils seront d'office ou très vite mis hors jeu par la population ? Est-ce aussi une vue à court terme? Il est vrai que si les caractères ne s'accordent pas à courte distance, ils ne s'accorderont pas mieux avec l'éloignement.
En occident, il y a ceux qui sont tombés dans le chômage qui, lui, augmente avec les crises, ceux qui travaillent qui essayent de se maintenir dans une large classe moyenne, mais qui s'essouffle, qui a peur de ne plus bénéficier de ce statut de 'privilégié' pour l'époque et qui est près à fermer les yeux dans ce but, ceux qui plafonnent, enfin, au derniers étages de la hiérarchie et qui se sentent bousculés dans leurs habitudes. Ensemble, on ne sait pas vraiment où est le bout du tunnel et on ne aperçoit qu'une faible lueur à sa sortie.
S'il faut avaler, il vaut mieux que le suc ait le meilleur goût possible, non?
Alors, "Au suivant", chantait Jacques Brel, mais, la suite, ce sera dans le dernier article de ce triptyque. Et ce ne sera pas nécessairement plus "cool".
L'Enfoiré,
Citations:
-
"L'idée de l'avenir est plus féconde que l'avenir lui-même.", Henri Bergson
-
"Le projet est le brouillon de l'avenir. Parfois, il faut à l'avenir des centaines de brouillons.", Jules Renard
-
"Le seul domaine qui reste à la philosophie est l'analyse du langage", Wittgenstein
Publié dans Actualité, Asie, Europe, Inclassable & People, Organisation, Politique, Science | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer
Commentaires
Question à la Une analyse les dires du Pape http://blogrtbf.typepad.com/qalu/2009/05/au-menu-de-ce-mercredi-20-mai-le-pape-et-le-saint-suaire-la-une-20h20.html
Écrit par : L'Enfoiré | 20/05/2009
Les commentaires sont fermés.